Il y a plus de deux ans, c'est plein de bonnes dispositions que j'espérais vous parler prochainement de Lux Ferre après la chronique du split quadripartite portugais Black Throne of Disease. Une pelletée d'albums de Striborg plus tard, le miracle se produit enfin, à la lueur de la sortie du second album du combo de Lisbonne. Bon, vieux motard que jamais, comme on dit dans le milieu des bikers.

La scène black portugaise n'a jamais enflammé les magazines, mais elle recèle pourtant quelques pépites qui aiment à scintiller dans l'underground. Amis du black surproduit qui trouvez les œillets vachement choucards, passez votre chemin. Car les Portos dont je vous cause aiment à piétiner ce genre de petites fleurs, car des formations comme Malleus, Ars Diavoli ou Penitencia s'adonnent à des grésillements et des distorsions de fréquences qui pourraient bien chagriner vos oreilles. Vous aurez compris que les trois projets sus-nommés ne le sont point par hasard et que c'est au plus profond de cette meule que pulse le cœur de Lux Ferre. Ainsi, le line-up derrière ce second opus de la lumière ferrugineuse (oui, c'est très approximatif) est composé de Devasth et Pestilens (tous deux Penitencia) et de Vilkacis (Malleus, Ars Diavoli), auxquels a filé un coup de batterie Pedro Madeira (Nekrokult Of Kronos).

Je ne cache pas mon amour secret pour les riffs de Pestilens au sein de Penitencia (précédemment nommé Nightrealm). En attendant le premier album du duo (ou un troisième split, annoncé depuis deux ans), j'étais très curieux de savoir comment les thèmes du guitariste allaient s'intégrer dans le projet de son compère et vocaliste Devasth, seul rescapé du sauvage Antichristian War Propaganda de 2004. D'autant plus que le six-cordistes devait marier ses mélodies aux influences morbides du sieur Vilkacis. "Let's shake your body, baby" pendant 40 minutes.

Niveau conception, Lux Ferre a enregistré dans quatre studios différents entre Porto, Faro et Vila Franca de Xira. En gros, chacun a enregistré chez lui, dans son canapé, avec sa bière, roulé dans sa robe de chambre. Le mixage mitonné par Devasth rend justice à une production du cru portugais, avec un son agressif mais très distinct (on n'est pas chez Irae, hein). Quelques approximations d'interprétation n'en ressortent que mieux, mais elles donnent également à l'album la dimension crue et directe que cherchait le groupe.

De manière surprenante, "O Caminho" qui ouvre l'album est un titre mid-tempo. Si on reconnaît sans peine les riffs de Pestilens, il est étonnant qu'un départ soit aussi ronronnant comparé au démarrage en trombe de la majorité des sorties (selon la méthode dite du "film hollywoodien", avec un gros début, une grosse fin et pas mal de remplissage au milieu). Armé de patience et plutôt émoustillé par un groupe qui joue le contraste avec sa précédente réalisation (notamment par son artwork très lumineux), je n'en fus que plus décontenancé quand je me suis rendu compte qu'Atrae Materiae Monumentum ne décollait jamais vraiment. Les mélodies distillées par de longs tremolos sont bien signées, mais le manque total de rythmique est bien plus surprenant de la part de Pestilens.

Rien à faire, l'album n'est qu'une succession de thèmes étalés de la même manière, sans chercher à entraîner l'auditeur dans le manège des morceaux. L'encéphalogramme affiche des trucs, mais le rythme global semble trop plat. Nous sommes bien loin de l'efficacité brutale du précédent opus, chez un groupe qui a eu le courage d'évoluer mais qui ne semble pas avoir terminé sa mutation. Me voilà donc très déçu par ce nouvel album, dont j'aurais tant aimé vous dire le plus grand bien. Caramba, quoi! Ah non, ça c'est italien.


Rédigé par : Prince de Lu | 11/20 | Nb de lectures : 10301