De tous les groupes de Death français ayant rivalisé en terme de popularité, tout au moins dans l’Hexagone, avec les formations étrangères il y a une vingtaine d'années, LOUDBLAST est quasiment le seul à être encore debout. Ce deuxième album après un hiatus de plusieurs années est donc, on a pu s'en rendre compte à la lecture des commentaires aux news postées sur les nombreux forums du Net, très attendu, à la fois par ceux qui espèrent encore retrouver « leur » LOUDBLAST et par ceux qui se feront un plaisir de les descendre au moindre faux pas.

Pour beaucoup, votre serviteur y compris, « Planet Pandemonium » était loin de correspondre à ce qu'on attend du groupe, et encore aujourd'hui, la déception initiale étant bien loin maintenant, j'ai beaucoup de mal avec cet album. Mais peut-être LOUDBLAST devait-il en passer par là pour revenir à quelque chose de plus traditionnel, comme METALLICA l'a fait il y a quelques années. « St Anger » était une blessure ouverte, le hurlement de souffrance d'un groupe et d'un leader submergés par leurs dysfonctionnements. Le résultat musical n'était peut-être pas à la hauteur de ce qu'on espérait, mais humainement, le groupe a fini par retrouver le goût de jouer, tout simplement. Peut-être pour LOUDBLAST, le processus a-t-il été semblable. Pas évident de revenir après une pause (split?) et de donner au public ce qu'il attend et ce, d'autant moins qu'on a toujours été un groupe essayant d'aller de l'avant, de ne jamais proposer le même album. Le LOUDBLAST de « Planet Pandemonium » devait se positionner dans une scène extrême qui avait changé, le groupe lui-même avait changé, Stephane Buriez, son leader, avait expérimenté de nouvelles choses, et « Planet » était donc le résultat de tout cela.

Qu'en est-il en 2011, vingt ans après la sortie de « Disincarnate » et un nouveau changement de line-up avec l'arrivée d'Alex Lenormand à la basse (LOCUS, SIC, CODE) et de Drakhian à la guitare (FORNICATION, BLACK DEMENTIA, GRIFFAR, ex-TAAKE) ? Visuellement, LOUDBLAST s'est associé comme à chacune de ses sorties depuis « Sublime Dementia » à Bolek Budzyn ( http://www.bolek-budzyn.com ), dont la peinture choisie est le prolongement graphique du disque : sombre, inquiétante, suggérant la désolation mais également la présence de forces énormes dont la mise en branle ravagera tout. Peut-être pas la plus chiadée des œuvres du peintre, mais une peinture qui, une fois le disque bien assimilé, se révèle parfaitement pertinente. LOUDBLAST est en effet une fois encore allé là où on ne l'attendais pas forcément, proposant un disque qui, s'il contient de grosses références au passé du groupe, va à nouveau de l'avant. «Frozen Moments Between Life And Death» n'est ni un nouveau « Sublime Dementia », ni un « Fragments » en plus bourrin, encore moins un « Planet Pandemonium » restylé (ouf!). Il est chargé de la même intensité émotionnelle que l'était « Fragments » et offre les mêmes surprises « mélodiques » que « Sublime Dementia », la froideur en moins, tout en restant plongé dans une sorte de moiteur inquiétante, une atmosphère générale se rapprochant de celle, étouffante, de « Disincarnate » mais plus riche en émotions. Peter Tägtgren, à qui a été confié le mixage, n'y est probablement pas étranger : le leader d'HYPOCRISY, dont les talents de génie du son ne seront pas encore cette fois remis en cause, a effectué l'un de ses plus beaux boulots, l'un des plus organiques en tous cas, alors qu'on pouvait lui reprocher des prods quelque peu stéréotypées et, parfois, trop propres. On retrouve ici, avec plus d'ampleur, ce qu'on pouvait trouver sur « The Final Chapter », les compos s'y prêtant d'ailleurs à merveille. Le son de batterie, tout particulièrement, est très naturel tout étant d'une puissance incroyable et d'une manière plus globale, de nombreux passages rappellent HYPOCRISY, sans étouffer le "son" LOUDBLAST mais en l'enrichissant.

« Frozen... » est un album en effet majoritairement mid-tempo, voire lent, contenant beaucoup de mélodies et de couches de guitares, un album à la base plus proche du Thrash que du Death Metal, dans la lignée de ce que le groupe avait fait il y a une quinzaine d'années, quand il avait revisité ses anciens morceaux pour les adapter à l'orientation moins « brutale » prise à l'époque et qui a été immortalisé sur le live « The Time Keeper ». On trouve également des éléments Black, probablement apportés par Drakhian, qui enrichissent le son de LOUDBLAST, comme les solos limpides et inspirés. Des mélodies qui contrastent avec la lourdeur de la plupart des rythmiques, l'une des marques de fabrique du groupe. Pas de « About Solitude » cette fois pour nous faire planer avant de nous mettre une grosse mandale dans la tronche, mais une multitude de trouvailles qui ne sautent pas à l'oreille d'emblée, pouvant laisser l'impression d'un album linéaire, et qui pourtant sont l'âme des morceaux et font de cet album une très belle réussite, presque inespérée compte tenu de ce qui nous avait été proposé avec « Planet Pandemonium ». Le nouveau LOUDBLAST se mérite et sa dégustation n'en sera que meilleure après plusieurs passages, ne lâchez surtout pas après une écoute ou deux. Il décevra certainement beaucoup d'entre vous parce qu'il ne marque pas un retour franc en arrière, mais sa durée de vie n'en est qu'augmentée : « Frozen Moments Between Life And Death » existe pour ce qu'il est et non pour des références à un passé dans lequel LOUDBLAST a toujours veillé à ne pas se laisser enfermer.

L'album se conclut d'ailleurs sur un instrumental prenant, « To Bury An Empire », qu'on aurait presque pu trouver sur un album de DOWN. L'occasion de montrer que même sans les graves profonds de Stéphane Buriez, LOUDBLAST reste LOUDBLAST et qu'il continuera à nous surprendre... Neverending Blast ?
Contrairement à ce que peut laisser penser la longueur de cette chronique, qui reflète la difficulté d'appréhender ce nouveau disque quand on est fan du groupe, il se vit et se ressent plus qu'il ne se décrit, il suffit juste de se lancer, de mettre de côté toutes nos attentes et d'apprécier...


Rédigé par : Dungorpat | 16/20 | Nb de lectures : 17211