Ou l'itinéraire d'un retour impossible.
Après avoir connu son heure de gloire au sein de l'illustre CANCER, fleuron du death/thrash british, au début des années 90, John Walker rame depuis bientôt vingt ans pour revenir sur le devant de la scène. Je conçois que ce soit cruel quand on a fondé un groupe ayant posé les bases du genre, bossé avec James Murphy sur l'excellent « Death shall rise » et poussé la collaboration jusqu'à une apparition sur le « Dreams of the carrion kind » de Disincarnate. Mais les faits sont là, il n'a absolument plus la barakah. Après le retour foireux de Cancer en 2004, John Walker plante à mon avis un nouveau clou dans le cercueil de sa carrière musicale en commettant le premier album de Liquid Graveyard.

« On est amoureux quand on commence à agir contre son propre intérêt. » (François Truffaut)
On est pourtant pas passé très loin d'une franche réussite. Mais voilà Johnny a succombé aux traits cruels de l'arc de Cupidon. Il est amoureux. Et aveugle. Ou plutôt sourd. Sourd aux qualités vocales supposées de Mme Walker, propulsée chanteuse de Liquid Graveyard pour le plus grand malheur de ses membres. Dit comme cela, je donne l'impression d'être gratuitement cruel et vaguement misogyne mais j'invite chacun à jeter une oreille sur les dix titres de ce « On evil days » afin de se faire un avis.
C'est d'autant plus regrettable que les compos témoignent d'un sens du riff imparable, secondé par une assise rythmique remarquable. Les accents thrash et death traditionnels se mêlent à des influences plus crossover ; quelques fioritures agréables émaillent l'ensemble comme cette utilisation originale des harmoniques... mais l'ensemble demeure globalement insupportable.
Raquel Walker frise l'indécence sur tous les registres. Quand elle grogne, on a l'impression saisissante d'entendre une Angela Gossow en pleine bronchite, mais le pire reste encore quand la belle s'essaie à un registre limpide voire lyrique, sa prestation renvoie alors aux meilleures heures des bêtisiers de la télé réalité. Plus sérieusement j'ai le sentiment que ses lignes de chant clair sont toujours à la limite de la justesse ou alors atrocement mal placées et dans tous les cas en rupture avec la musique elle-même tant au niveau de la texture que de sa propre mélodie. Attendez, il y a mieux encore. John Walker se paie une courte apparition au chant sur un des titres de l'album et le contraste est édifiant! Les quelques secondes où résonnent les accents rauques de sa voix sont un vrai soulagement. Il y a de quoi enrager si on s'aventure à imaginer le même travail avec ses lignes vocales sur tout les morceaux. Un beau gâchis en somme.

Notez néanmoins que cette contre-performance ne remet nullement en cause l'implication de ces dames dans la scène metal, présence qui si elle reste marginale assure doucement sa pérennité grâce à la qualité indéniable de leur apport au genre -au débotté je pense à Katherine Katz ou Laura Pleasants.
Détail insignifiant, le groupe est composé de musiciens britanniques et espagnols et possède donc sa base d'opération à Madrid, ce qui en fait un des rares groupes de metal extrême espagnol à ma connaissance (Haemorrhage, Machetazo euh...).

J'ai très rarement trouvé un(e) vocaliste insupportable au point que mon appréciation globale de la musique du groupe soit durablement affectée mais je dois bien reconnaître qu'il s'agit là d'un cas d'espèce où chaque nouvelle écoute cristallise mon irritation sur la délicieuse Mme Walker dont la sincérité évidente ne mérite pas tant d'hostilité.

Love sucks?


Rédigé par : #Guillaume# | 11/20 | Nb de lectures : 11019