Faire référence au nom d'un poème d'Edgar Allan Poe, c'est bien mignon, mais ça a un peu plus de gueule quand ça vient de Team Sleep que de la part d'un groupe de metalcore ricain de troisième division. Surtout quand le niveau des paroles frôle celui d'un Morsay au firmament de sa verve, parce que là, avec du haut niveau comme ceux de "Teenage Wasteland" ou "Hoodrat" qui devraient résonner comme des hymnes dans la caboche de gamins de 5ème, on frôle la profanation de sépulture.

Le principal souci de Ligeia, c'est que leurs diverses approches pour tenter d'accrocher l'auditeur échouent invariablement. Car que ce soit dans les parties tough guy stériles ou dans les fréquentes disgressions vers le metalcore pour garçons-coiffeurs à la Eighteen Visions, chacune de leurs entreprises est générique au possible, et vas-y que je t'envoie du cliché en barre, jusqu'à la sempiternelle ballade guitare/voix de fin d'album ("Heroin Diaries"). Néanmoins, dans ses meilleurs moments, grâce aux riffs melo sur fond de rythmique solide ("Hot Mess", "Johnny Cash"), Ligeia lorgne vers les Misery Signals et autres Architects et parvient à faire oublier sa médiocrité en faisant taper du peton, mais le décrassage de chaussure ne dure jamais longtemps. Et encore, vaut mieux pas parler anglais pour pouvoir apprécier ces rares éclaircies.

En gros, c'est l'album que pourrait pondre 36 Crazyfists en trois jours s'ils n'avaient pas de race. Puisque "Bad News" sonne vu et revu, facile, calibré, comme une version light du travail du combo d'Anchorage. Sous couvert de fun, titres tournant autour des filles faciles et de la tise, avec même des samples de piaillages du beau sexe au cas où on aurait pas compris, Ligeia essaye de lorgner vers le côté rock'n roll du metalcore ("Hoodrat"), sans comprendre que c'est pas parce qu'Every Time I Die vient de se tailler chez Epitaph qu'ils pourront reprendre leur part de marché chez Ferret.

Et les seuls passages surprenants ne le sont pas dans le bon sens du terme. Y'a personne pour prendre son courage à deux mains et leur expliquer que les scratchs comme sur "I've Been Drinking", c'est plus possible, que ça se fait plus depuis que Fred Durst se fait refouler des boîtes de nuit et que les paparazzis lui ont lâché la visière? Et pourquoi pas du slap tant qu'on y est, hein? C'est ça Ligeia: c'est pas qu'ils y mettent particulièrement de la mauvaise volonté, c'est juste qu'ils débarquent avec plusieurs trains de retard, et qu'en 2009, les kids n'ont strictement rien à carrer d'un groupe qui aurait déjà fait de la figuration au sein de la scène metalcore circa 2003.

Bref, m'étonnerait que "Bad News" trouve grand écho hors de leurs frontières, leur tournée européenne imminente en compagnie de Liferuiner et The Bridal Procession vous permettra de confirmer (ou pas) mes doutes. N'empêche que c'est à croire qu'ils l'ont fait exprès, puisque visiblement leur précédente livraison tapait plus dans le chuggahchuggahtoughguynewera à deux neurones à la Emmure/Acacia Strain, formule ayant le mérite d'être toujours plus actuelle et divertissante que cette sous-production metalcore dénuée d'intérêt. Et si l'habit ne fait pas le moine, la cover vient prouver le contraire: du tape-à l'oeil, du superficiel, du photoshopé, du plastique. Bienvenue en Amérique.


Rédigé par : Crown_Me | 9/20 | Nb de lectures : 11269