Et un album qui va faire couler beaucoup d'encre, un!

Après un "Take A Look In The Mirror" sans grandes surprises, une rupture de contrat qui faisait figure de révolte d'adolescents attardés, une compile putassière à souhait pour honorer son nouveau contrat avec EMI et le départ de leur guitariste Head parti prêcher la voix d'un Seigneur qui doit bien se foutre de sa gueule sur son petit nuage (oui, je me le représente à l'image de San Goku, ça vous dérange???), on pouvait bien se demander ce qu'allait nous sortir KORN de bien intéressant. Le premier single, "Twisted Transistor", présentait un KORN qui misait sur un son très marqué électro et beaucoup moins metal. C'est sans réelle surprise que l'on concluera que "See You On The Other Side" en est de même. Reprenant l'ambiance glaciale de "Issues" mais sans en atteindre le génie et les expérimentations électroniques de "Untouchables" en les poussant encore plus loin, KORN sort ici un album atypique dans leur carrière qui tendrait à démontrer la volonté du groupe de se démarquer de plus en plus de leur passé. Il n'est plus ici question de rage ou de mal être, marque de fabrique du groupe à ses débuts. KORN a grandit, a évolué et s'est assagit. Fini le neo (ceux qui s'en plaignent lève le doigt...), fini les influences hip-hop, place à un metal hybride mid-tempo entre pop, metal et indus.

Le son des guitares est énorme et extrêmement abrasif, typique de la scène indus chère à Justin Broadrick . La basse est toujours présente mais plus effacée avec des parties d'une simplicité étonnante pour Fieldy. La batterie remplie son rôle à merveille: Silvera se la joue boîte à rythmes pour appuyer le côté mécanique des arrangements indus ("Throw Me Away", "Love Song" dont les couplets semblent sortis d'un album de NIN, la très martiale "Coming Undone") ou bien buldozer pour insuffler aux parties metal la puissance qui transcende un tout ("Souvenir", "10 Or A 2-Way") Et attention, grande nouveauté, on a même droit à une apparition de la double jusqu'alors totalement délaissée ("Politics"). Quant au chant, c'est simple, Davis nous fait la plus belle démonstration de ses talents de vocalistes. Inventives, mélodiques (les refrains pop n'y sont certainement pas pour rien) et mélancoliques, ses parties de chant sont vraiment bluffantes, à tel point qu'on peut se demander quel pourra être le rendu live quant on connaît les difficultés rencontrées par le frontman pour s'en sortir avec les honneurs à l'échelle d'une tournée. Mais en tout cas, sur album, c'est un excellent boulot qui nous est présenté ici.

Côté bonnes surprises, ce sont les expérimentations du groupe qui retiennent le plus l'attention. Le format assez calibré des titres n'empêche pas les américains d'oser et de pondre des passages ravageurs: le pont de "Souvenir" est absolument génial avec sa rythmique jungle sur laquelle se calent des parties de guitare à la limite de l'hystérique, le titre "Open Up" avec sa rythmique lancinante qui permet à l'instrumentation et à la voix de jouer à fond sur les nuances de jeu est franchement prenant ou bien "Tearjerker", superbe titre final, ou Davis a pour simple accompagnement quasiment tout au long du morceau un clavier fantomatique qui pose une ambiance glauque à souhait.
Quelques détails déçoivent tout de même un peu comme la volonté du groupe d'insérer de la cornemuse dans ses titres mais d'une manière de plus en plus ridicule et inutile (elle ne sert qu'à appuyer des pseudos liaisons entre les morceaux, seule son utilisation à la fin de "Seen It All" est justifiée), ou bien quelques reprises d'éléments du passé qui n'ont définitivement plus leur place au sein de cette nouvelle mouture comme les tribalités vocales de Davis sur "Liar". D'ailleurs à mon goût, les titres les moins intéressants sont ceux qui rappellent le vieux KORN ("Liar", "For No One") où le groupe sort des riffs éculés qui n'ont plus beaucoup de saveur. Certes c'est efficace et ça cartonnera en live mais où est passée l'originalité?

A tous ceux qui se font une idée négative de "SYOTOS" via le premier single trop pop "Twisted Transistor", je ne peux que conseiller une écoute approfondie de l'album qui vaut vraiment le détour même si on s'éloigne de plus en plus de l'ère metal et que l'originalité n'est pas toujours égale tout au long des 14 titres. La première écoute m'aura déçu mais l'opus s'apprécie avec le temps et finit par vous séduire grâce à ce son à la fois lourd et atmosphérique. En plus, le digipack en édition limitée que je possède est franchement beau (la réalisation est sublime malgré un artwork assez... étrange) et sert à merveille l'album, le CD bonus ajouté à cette édition présentant trois inédits assez intéressants au demeurant. Parmi les fans de KORN et les personnes sensibles à ce type de groupes (car je ne parle pas de la horde de trve-metalleux pour qui KORN = grosse merde et qui auront bien entendu passé leur chemin, hein?!), les plus ouverts et non-réfractaires à l'évolution apprécieront ce nouvel album. Par contre, les fans de la première heure viendront clamer haut et fort que "c'était mieux avant"... Tant pis pour eux, un groupe qui n'évolue pas est un groupe mort... Et KORN a apparemment retrouvé un second souffle.


Rédigé par : Foofur | 14/20 | Nb de lectures : 15916