Depuis son annonce à l’automne dernier, cette sortie a fait se friser les moustaches d’un grand nombre d’amateur de prog. Tout ceci parce que KINO est présenté comme un nouveau super-groupe. Voir le battage -mérité- autour de Transatlantic il y a 5 ans et de The Tangent plus récemment. Un événement qui n’en sera bientôt plus un tant il se banalise. Un tous les 2 ou 3 ans, ça fini par lasser. C’est un fait, KINO porte d’emblée en lui tous les germes du succès garanti… A condition que les espoirs qu’il a suscités avant même sa naissance soient au rendez-vous. Il met toutefois dans sa manche un certain nombre d’atouts non négligeables et prend un minimum de risques. D’abord, le label qui le distribue n’a pas l’habitude de miser sur des tocards même si parfois il s’est un peu emballé dans ses choix. Ensuite, le C.V de chacun des protagonistes du band est on ne peut plus impressionnant. Visez plutôt; Pete Trewavas à la basse (Marillion et feu Transatlantic). Chris Maitland aux baguettes (Blackfield et ex Porcupine Tree). John Mitchell aux guitares (Arena et The Urbane, un excellent groupe de pop rock injustement mésestimé). Enfin, peut-être le moins connu de la bande, John Beck aux claviers (It Bites, formation britannique de pseudo prog ayant rencontré un certain succès dans les années 80). Avec un tel background, devrait logiquement se profiler à l’horizon, au pire, la réplique, au mieux, l’identification même distanciée à l’un ou l’autre de ces prestigieux noms. Mais, s’il est un détail ici qui peut renseigner sur le contenu de l’objet en question, c’est la pochette, quoiqu’on en pense. Et là, pas d’erreur possible, l’artwork ne verse pas dans le fantastique, le mythologique, le surnaturel ou tout autre représentation ésotérico/onirique propre au mouvement progressif. Des fauteuils de cinéma, un bol de pop corn, le tout baigné d’un halo écarlate, on est loin de l’imagerie équivoque. On s’attend à un propos résolument moderne, classieux, bien produit et en phase avec l’air du temps. Effectivement, il n’y a pas de décalage entre le visuel et l’auditif. Démonstration faite, aucune trace ici de rock progressif respectant les fondamentaux comme développé par les formations citées en préambule. Entendez par là durée des titres, complexité, longs développements, recours à des instruments « exotiques » etc.. Ceux qui en espéraient davantage en seront pour leur frais. Il se peut même que la déception pointe le bout de son nez après tant de supputations et d’hypothèses. Ce serait une erreur. Car, en fait, Picture se révèle être un bon album de rock sophistiqué et soigné avec des titres qui savent s’étirer en longueur (9’ pour Losers Day Parade ). Sans que l’on puisse encore une fois les caractérisés de franchement prog. En tout cas, pas dans la veine 70’ ou traditionnelle. Pas grave ! La qualité de leur instrumentation et l’orchestration en font des pièces à forte valeur ajoutée y compris les « courtes » comme Picture (2’) qui clôt l’album. Le chant, assuré par Mitchell, le guitariste d’Arena, atteint le même niveau d’excellence que lorsqu’il officie avec The Urbane et ses comparses ne sont pas en reste. La liste est longue des formations pop rock à qui la musique de KINO peut s’identifier; The Urbane bien sûr mais également Toto, Coldplay, Muse, Police, Saga, Rush, Asia, Supertramp etc.. Et si prog il y a, c’est davantage vers la scène néo qu’il convient de regarder, Marillion en tête période Season’s End. En résumé, du beau travail dont l’image policée risque cependant de faire sourire les plus ambitieux. Il est d’ailleurs assez intéressant de noter le nombre toujours croissant de musiciens issus de la scène prog et qui s’encanaillent dans des aventures pop rock borderline et, sans innover vraiment, privilégient un gros son et une énergie rafraîchissante. A la manière d’ACT ou Xinema mais d’un abord plus facile pour la grande majorité « des cerveaux disponibles ». Ce qui n’empêche pas un haut degré de qualité et un résultat au final souvent très bon. Dans cette optique, KINO remplit parfaitement sa mission.


Rédigé par : Karadok | 16/20 | Nb de lectures : 10668