Kingdom Of Sorrow est le projet de 2 monstres de la sphère métal : le gros matou Kirk Windstein, gratteux de Crowbar et Down, et le chien fou Jamie Jasta, hurleur chez Hatebreed et Icepick. Ce duo, sur le papier tout du moins, est absolument excitant, cependant le 1er album de leur union fut quelque peu poussif, clairement bancal même. Nous sommes donc en droit d’en attendre plus pour cette seconde galette intitulée "Behind the blackest tears". Ont-ils vraiment réussi à tirer profit de leur association pour proposer autre chose qu’un copier/coller de leurs formations respectives ?

Premier constat, il y a eu des transferts au mercato, les frères Bellmore (Charlie, guitariste de Phantoms, et Nick, batteur chez Phantoms et Toxic Holocaust) accompagnent désormais Windstein, Jasta et Brunson. Second constat, le son est beaucoup plus heavy que par le passé. Troisième constat, le plaisir procuré par rapport au précédent est un soupçon supérieur car l’album est à mon sens plus homogène. Quatrième constat, la pochette est vilaine et ne représente pas la musique proposée.

La formule n’a pas changée : du Crowbar light avec quelques breaks Hatebreed et 2 mecs qui se partagent le micro, à plus grande majorité pour Jasta. En d’autres termes, du stoner à gros riffs avec une voix vindicative typée hardcore/métal et une plus suave et lourde, version stoner.

Les aboiements de pitbull que Jamie Jasta peut avoir chez Hatebreed se sont métamorphosés en un chant avec trop peu de punch. Ni hardcore, ni métal, plutôt le cul entre 2 chaises, à l’image du dernier album de Hatebreed finalement. On sent clairement que Jamie est attiré par le métal, tout en ayant peur de délaisser le hardcore, et j’ai l’impression qu’il ne se lâche que trop peu. En tout cas, son chant est plus axé métal que sur l’éponyme sauf sur le titre ‘Salvation denied’, pus jus Hatebreed, où il excelle d’ailleurs. La voix de Kirk, quant à elle, est assez banale. Je trippe habituellement sur son timbre poignant de papy résigné, et là je ne ressens pas grand-chose. La paire n’a pas vraiment fait évoluer son style, hormis le côté heavy renforcé, et propose la même tambouille que par le passé. On reconnaît la guitare chaude, les riffs basiques sont sans surprise mais tout de même très groovy, n’est pas Kirk Windstein qui veut. L’album est doté de compos correctes, sans s’extasier non plus. Comme vous pouvez vous en douter, tout tourne autour des 2 stars du combo, les autres protagonistes ne proposant qu’une base solide pour les mettre en valeur.

Ce second album me donne le sentiment d’une recette dans laquelle un ingrédient a été oublié pour qu'elle soit réussie. Dans celle-ci, je trouve que ça manque cruellement d’inspiration et de sincérité. Ca fait beaucoup. Pour des mecs qui ont autant de métier, on était en droit de demander un peu plus. Pourquoi Kingdom of Sorrow n’a pas affûté son tir, n’a pas davantage peaufiné son travail ? Les morceaux sont tout sauf aventureux, ça se repose vraiment sur ses acquis. A chaque titre, je m’attends à une surprise, une montée en puissance, un break incroyable qui nous emmène sur des chemins risqués mais ô combien jouissifs. Non, rien de tout ça, t’es juste sur une autoroute où le paysage ne varie pas pendant 1 heure. Ca sent le devoir d’école terminé à la va-vite car la maîtresse va bientôt ramasser les copies, d’où une grosse quantité de remplissage. On sent que le cœur n’y est pas totalement. Peu de chansons qui te scotchent, c’est assez prévisible, avec peu de patate.

Quand Crowbar me brise les cervicales, Kingdom of Sorrow me fait légèrement dodeliner de la tête et claquer des doigts.
Quand Hatebreed me donne envie de bastonner, Kingdom of Sorrow me donne envie de baisser la tête et suivre mon chemin.

Cet album a tout de même un gros point positif, il est addictif. Ce groove donne envie de se le remettre une fois celui-ci terminé. Non, je ne me contredis pas, je dis juste que "Behind the blackest tears" a beaucoup de défauts, et que nous sommes en droit d’attendre beaucoup mieux de cette doublette de luxe. Mais même Jasta et Winstein en mode petit bras, ça envoie quand même et procure un plaisir non négligeable. Je suis juste déçu car c’est bâclé et on sent que cette alliance n’a pas encore tout offert. Mais le jour où la machine sera rodée, cç peut tout écraser... faut cependant pas que ça arrive pour le 6ème album.

Ca n’a pas la profondeur d’un Crowbar, et ne te mettra pas une droite dans la tronche comme peut le faire Hatebreed. Ca n’a pas non plus le riff qui te fait dresser le poing dans les airs, ni la ballade qui te tire la larme. Entre un Kirk plutôt bon sans exceller, et un Jamie Jasta qui se cherche, le résultat est un album convenu avec peu d’ambition. Cependant, la marque des vrais messieurs est de tout de même proposer un album très agréable, là est tout le paradoxe. "Behind the blackest tears" est meilleur que son prédécesseur, et ravira quelque temps les aficionados de all star band sans pour autant rester dans les annales du métal extrême, ni même dans les mémoires…


Rédigé par : Bras Cassé | 14/20 | Nb de lectures : 13402