Dans la mythologie hindoue, Kartikeya est le nom de la divinité de la guerre. Il fallait y penser, et c’est bien évidemment un bon choix de nom de groupe pour un groupe de Metal bien guerrier, qui de plus a choisi la mythologie hindoue comme thème lyrique. KARTIKEYA est donc un groupe moscovite formé en 2004, initialement sous le nom VELIAL. Après deux démos, le groupe sort un premier album en 2007 (The Battle Begins), puis sortira le grand jeu pour son second disque, en le faisant précéder de 3 singles. Une signature chez le label russe Grailight et hop, voilà que débarque la seconde offrande du sextet russe nommée Mahayuga. Et là, baffe. Grosse baffe.

Enorme. Epique. Epoustouflant. Brutal. Original. Superbe. Impressionnant. Tuerie !

Mais tout d’abord, KARTIKEYA c’est quoi ? Difficile à dire au premier abord, tant le mélange proposé par les Moscovites est inédit. Le terme de « Death ethnique » a été croisé sur la toile, terme qui avait titillé ma curiosité et m’avait fait découvrir le groupe. Cette appellation simpliste cache en fait un death-metal résolument moderne mais à la fois brutal et atmosphérique, tout en étant un chouïa technique. On pensera donc à certains égards à du BEHEMOTH ou à du HOUR OF PENANCE (sans le chant guttural) pour le côté maousse costaud, et surtout à du NILE pour la tendance ethnique et mystique. L’aspect purement ethnique, lui, penchera vers les groupes à tendance « orientale » façon MELECHESH (le côté violent y compris), ORPHANED LAND ou SEPTIC FLESH (le côté atmosphérique et épique y compris). Un mélange qui me fait penser à ce que THE MONOLITH DEATHCULT avait fait sur Trivmvirate, en remplaçant les effets electro/indus par des instruments ethniques et en évacuant le second degré. On pourra aussi penser à leur compatriote SENMUTH, en remplaçant le concept égyptien par des thèmes hindouistes et en rajoutant une bonne grosse louche de Death dans la musique. Donc voilà, pour résumer sur Mahayuga KARTIKEYA joue une sorte de Death brutal moderne oriental et épique. Si les quelques noms cités au-dessus vous parlent, courez vous procurer Mahayuga avant même la fin de la chronique. Pour les autres, à moins d’être allergique à toute forme de Death brutal ou de tout ce qui est « oriental », tentez l’aventure car vous risquerez bien d’être surpris.

Et l’aventure se déroule sous la forme d’un voyage initiatique dans les Indes, avec bon nombre d’étapes remarquables. L’intro ethnique aux instruments traditionnels, "Sarva Mangalam", pose bien l’ambiance, avant de se terminer avec des chœurs entraînants à souhait accompagnés de riffs coup-de-poing. Et le voyage métallique démarre sérieusement avec "He Who Carries Head of Brahma" (le dieu créateur-démiurge de l’hindouisme). Les grosses guitares death s’enchevêtrent avec les divers passages folk (chants, orchestrations) à merveille, le tout soutenu par une prod tellement puissante qu’on croirait qu’elle provient des studios Hertz. Le chant de Mars, de facture assez classique, est pourtant particulièrement accrocheur tout du long de Mahayuga. La facette plus épique de KARTIKEYA se retrouve au sein des singles "The Path" et "Neverborn", de véritables hits en puissance. Couplets en rouleau-compresseur, compos inspirées et efficaces, refrains en chant clair épiques et inoubliables, montées en puissance salvatrices, breaks atmosphériques de toute beauté… comment ne pas succomber ? Et KARTIKEYA sait aussi se montrer rentre-dedans comme il faut, en témoignent l’ultra-véloce "Fields of Kurukshetra" (champ d’une bataille dynastique entre clans frères) avec ses riffs incisifs, son batteur qui envoie et son excellent refrain assuré par le brailleur de RUDRA, avant un final plus ethnique superbe ; et les 9 minutes de "Utpavana" qui se terminent dans un déluge de blasts particulièrement jouissif, surtout avec les orchestrations en toile de fond.

KARTIKEYA sait donc se montrer poutratif tout autant qu’il pose à la perfection ses ambiances orientales, bien amenées par les nombreux breaks et par les magnifiques interludes que sont "Moksha" et "Exile". Mais ce n’est pas tout et le sextet russe va pousser encore plus loin son concept avec la dernière partie de l’album (qui dépasse 70 minutes au total). Ce sont les 4 parties de "Mahayuga", ce qui correspond aux 4 âges du monde selon la cosmogonie hindoue. La première partie ("Satya Yuga", l’âge d’or) est une intro 100% ambiante, qui enchaîne sur une autre partie instrumentale ("Treta Yuga", l’âge d’argent) présentant une ambiance symphonico-martiale majestueuse à souhait, toujours accompagnée par des guitares écrasantes. La troisième partie ("Dvapara Yuga", l’âge de bronze) est un morceau plus classique mais terriblement accrocheur, grâce aux riffing plus syncopé, et toujours avec des breaks épiques comme jamais. La dernière partie ("Kali Yuga", l’âge de fer) est nettement plus sombre (voire Black-Metal) et violente, terminant Mahayuga en trombe avec des sonorités différentes. Enfin terminant, c’était sans compter le goût qu’a KARTIKEYA pour surprendre son auditoire. Mahayuga compte une dernière piste cachée à la fin de "Kali Yuga", qui est une reprise. Et après avoir repris "Babylon" de SOULFLY sur The Battle Begins, les Russes reprennent ici "Eyes Like Yours", un tube de… SHAKIRA ! Et la surprise est grande, car ce morceau passé à la moulinette Brutal Death ethnique est tout simplement excellent, entraînant et accrocheur avec son chant clair et ses chœurs, et son refrain ultra-rapide. Génial ! Comme tout le reste du disque, qui est tout simplement une tuerie.

Alors voilà, de par son mélange original, bluffant et efficace entre du Brutal Death moderne et du Metal épique oriental, KARTIKEYA fait mouche avec son second album, et signe pour moi très probablement l’album de l’année (je défie quiconque de faire mieux dans un genre à peu près similaire avant la fin 2011). Le groupe russe a tout d’un grand et j’espère qu’il fera parler de lui très vite et à plus grande échelle (déjà que la distribution de Mahayuga par Grailight est cantonnée à la Russie, vous pouvez cependant vous le procurer chez certaines distros comme Solitude Prod), et ça semble déjà en marche vu que le groupe vient d’enregistrer un nouveau single avec Logan Mader. En attendant la suite, reste plus qu’à déguster encore et encore cet énormissime Mahayuga qui ne quitte plus ma platine depuis un petit moment déjà. Chef-d’œuvre !


Rédigé par : ZeSnake | 18/20 | Nb de lectures : 16710