Ami métalleux, tu as peut-être vaguement entendu parler de Jarboe que comme l’un des (nombreux) électrons libres de la galaxie Neurosis, voire comme l’ancienne chanteuse des très expérimentaux et barrés Swans entre 1982 et 1997 dont la musique biscornue et froide a fait le lien entre la cold wave, l’indus et des groupes comme Godflesh ou Scorn. Eh bien sale porteur de veste à patches, sache que le nouvel album solo de la dame te fait des œillades comme une fille de joie à l’encontre d’un innocent touriste au porte-monnaie un peu trop voyant. ‘Mahaklai’ n’est pourtant pas en soi un disque de metal au sens strict du terme. Mais son ambiance, lourde et malsaine, et surtout son casting plein de tatouages de monstres à cornes et de poils va te faire faire pipi dans ton caleçon Mickey : Vincent Signorelli d’Unsane à la batterie, Josh Graham de Neurosis (tiens, tiens) aux grattes, Kris Force d’Amber Asylum au violoncelle (ça, c’est pour les groupies de Relapse Records) et surtout Phil Anselmo (celui qui dit ‘qui ?!’ sort) et Attila Csihar de Mayhem qui apparaissent sur un titre seulement chacun mais dont les prestations à elles seules valent leur pesant en cacahuètes… Alors oui je sais, Jarboe nous a (presque) fait le même coup il y a quelques mois avec J², son ‘projet’ avec Justin Broadrick (ex-Godflesh, Jesu) qui nous a involontairement rejoué la blague de ‘paf le chien’. (Mais si vous savez, c’est l’histoire de ce chien qui traverse la rue, une voiture et… Bon ben… Enfin ‘paf le chien’ quoi). Heureusement, pas besoin d’acheter trois barils de Calgon, il n’y aura de seconde tache vilaine refusant de partir à la machine car ‘Mahakali’ se hausse largement au-dessus du niveau de son prédécesseur, ce qui n’était pas il faut le dire franchement dur.

Pourtant, la mise en forme n’a pas (trop) changé et la voix de Madame prend toujours autant de plus dans le mix, quitte à un peu écraser tout le reste. M’enfin c’est peu un album solo quand même non ?! Or justement, c’est bien ce fond qui fait ici la différence. On navigue pourtant grossièrement dans les mêmes eaux post-rock où nos valeureux galériens crachent leur goudron au son d’un tempo souvent pachydermique, avec en plus quelques apartés plus tribales. Sauf qu’on a là un vrai groupe et pas un guitariste à la limite de l’autoparodie faisant mumuse avec une boîte à rythme. Et surtout, miss Jarboe semble-t-il ne s’est ici pas contentée de donner de la voix sans faire attention à ce qui se passait derrière elle. Or vu que son arsenal vocal reste d’une amplitude assez impressionnante, même sa prestation ‘black-metal’ sur « A Sea Of Blood » impressionne, cette coordination réussie décuple donc la puissance émotionnelle de ce disque. En fait, malgré son enrobage ‘arty’ - en plus d’un concept un peu obscur sur la déesse indienne Kali, des interludes entrecoupent les morceaux et le tout ne choisit pas la facilité en dépassant au total les soixante-dix minutes – on tient peut-être là son enregistrement le plus accessible, en tous cas le plus cohérent. C’est surtout celui qui semble s’être le plus attaché à la notion de ‘chanson’, même si les participations très réussies de Csihar, plus torturé que jamais, et d'Anselmo, parfait pour ce blues puant le bayou qu’est « Overthrown », ont tendance à éclipser tout le reste. Le tout, franchement atypique, mérite que l’on s’y attarde un peu, histoire au moins de crever moins con. Et puis n’écoutez pas Prince de Lu, il n’y a pas que Striborg dans la vie merde…




Rédigé par : Olivier 'Zoltar' Badin | 16/20 | Nb de lectures : 12152