L’adolescence est l’âge souvent ingrat qui définit le passage de l’enfance à l’âge adulte. Boutons, cheveux gras, appareil dentaire, voix hésitante et rébellion contre toute autorité... Qui n’a pas vécu cela? Dans le cas des apprentis musiciens, cela s’est souvent soldé ces dernières années par la pratique du Black Metal, valeur refuge de la colère et du mal être. Les années et la pratique aidant, la larve se fait imago et apprend, entre autres, à accorder son instrument. Le “Djeunz” fait alors courir ses doigts boudinés sur une touche en rosewood qui devient un prolongement phallique et plutôt valorisant de sa propre anatomie. Le Black Metal originel se métamorphose petit à petit en quelque chose de plus construit, aboutit... le Death Metal.
Nombreux sont les groupes qui ont suivi cette voie, la caricature en moins (quoique?). EMPEROR fut peut-être le premier symbole de cette démarche. Aujourd’hui, c’est IN BATTLE qui a vieilli et dont l’évolution conduit vers de nouveaux horizons musicaux.

Death Black? Black Death? La musique d’IN BATTLE est difficile à définir car très versatile. Après une seconde d’intro discordante et symphonique puis une courte montée en puissance, l’album démarre sous de blasts augures. Les guitares se font dissonantes et égrainent des accords, des lignes complexes avant de plonger dans des rythmiques plus lourdes et Ô combien plus efficaces. Si les mélodies semblent plus s’orienter vers le Black malsain, froid, l’efficacité, elle, est forgée dans le Thrash et dans le Death bruts. Les riffs suintent une rage nihiliste, contenue, dont la bride n’est vraiment lâchée qu’en de rares occasions au cours de l’album (le très mid-tempo “Follow the Allfather” en est l’illustration parfaite). Les soli, très techniques et souvent mélodiques finissent toujours par frôler l’hystérie. Même la voix hésite entre growls bestiaux ou hurlements de haine. Cette ambiance sombre et pesante est seulement troublée par le remuant “Terrorkings”, petite ode au headbanging qui paraît presque déplacé.

Avec “Kingdom of Fear”, IN BATTLE ne révolutionne pas le métal extrême pas plus qu’il ne réinvente son propre style. C’est au contraire un groupe qui risque fort d’être taxé d’opportunisme ou d’un manque cruel de personnalité tant il épouse les courants au fil des albums: Black, Viking Black, Death... Pourtant, “Kingdom of Fear” possède une réelle atmosphère, une haine intrinsèque qu’il est rare de rencontrer ces derniers temps dans un album de Death, où la brutalité et la technicité ont tendance à aseptiser le style. Le son même, très brut, grésillant renforce l’ambiance malsaine mais le mixage des guitares, hélas, sonne aussi trop artificiel, en contradiction avec les sentiments organiques véhiculés par la musique.

“Kingdom of Fear” est une dose de violence brute. Un soin palliatif à tous ceux qui rêvent d’éteindre leur clope dans l’oeil du type qui regarde leur gonzesse la bave aux lèvres, qui ont envie d’aller chier dans le lit de leur belle-mère ou de filer des coups de canifs dans les pneus du voisin. Un hurlement primaire craché à la face du monde, efficace et soulageant.




Rédigé par : La Myxine | 15/20 | Nb de lectures : 10497