La Krocobra:
Groupe référence de par sa longévité, INHUMATE s'est octroyé le sceptre du Grind Core français grâce aux litres de sueurs qu'il verse sur scène depuis 1990. Leur foi ne semble pas s'essouffler. Immuable. Un nouvel album en guise de dix-neuvième bougie sur un gâteau qui n'apporte rien de révolutionnaire…

Si les prestations live de INHUMATE valent – d'après le terrible DVD sorti en 2005 - leur pesant de cacahuètes, leurs albums studio ne m'ont en revanche jamais fait franchement frétiller. Et même si ce "The 5th Season" est sans conteste leur meilleure galette, il reste entaché de cette relative morosité. Dix-neuf titres d'un Grind Core traditionnel enraciné dans les marmites d'antan. Du blast pépère, du grunt gras et grognon secoué d'aigus et de bizarreries d'œsophages endoloris et toute une tripotée de riffs qui restent calmes, assis au premier rang de la vieille école... Voilà le menu de ce "The 5th Season". L'amour indéfectible que voue INHUMATE au Grind du terroir constitue la force et la faiblesse du groupe. La recette marche, les titres envoient le pâté comme il faut mais au bout des quelques écoutes, une impression de déjà-vu reste tenace.

Pour être tout à fait franc, il manque à cet album la patate que le groupe possède sur scène… Du Grind Core franc et massif mais trop posé pour se faire péter la ruche. Les groupies de DISRUPT, NYCTOPHOBIC, BRUTAL TRUTH ne pourront être déçus: tout pète! Ca décape du sol au plafond... Par contre, ne cherchez pas dans "The 5th Season" l'hystérie et la sauvagerie qui agitent la cervelle de PRETTY LITTLE FLOWER, CAPTAIN CLEANOFF ou F STANDS FOR FUCK YOU… En même temps autant demander à GOREFEST de ratatiner autant que du SKINLESS. C'est tout le fossé entre Old School et New School!
Non, ce qui est dommage, c'est que la puissance et l'envie live semblent rester sur le seuil de la porte du studio…

Niveau prod', INHUMATE perpétue le son grassouillet du Grind roulé sous les aisselles… un poil brouillon mais les prods à l'eau bénite j'y nettoie mes vieux tire-jus! Quitte à pinailler, on pourra dire que les voix sont un peu trop en avant et ont tendance à bouffer les grattes. A part ça? Ca grind sans trève… jusqu'au dernier titre où l'appelé Baleine chouine un titre bonux bien singulier…

Pour faire simple, INHUMATE sort un très bon album de Grind Core mais qui reste extremement classique.

La Krotonton du vieux crouton:

Il y aurait beaucoup à dire sur INHUMATE avant même de parler de ce cinquième album venant couronner leurs quelques 19 années d’existence. Apôtre du grind français, fier de son éternel statut de groupe « qui s’est fait tout seul », brandissant son dogme d’autoproduction comme de jeunes catholiques le feraient avec leur pucelage, taliban de l’underground, toujours grande gueule lorsque c’est nécessaire et parfois même lorsque ça ne l’est pas, donneur de leçon, provocateur et adepte d’un franc parlé assassin, horripilant pour les uns, respecté et voire même adulé par les autres, le moins qu’on puisse dire c’est que le groupe alsacien ne laisse personne véritablement indifférent lorsque son nom est lancé.

Pourtant l’arrivée de cinquième opus n’est pas véritablement un événement même s’il aura fallu presque cinq ans au groupe pour revenir avec une nouvelle galette. Comme ils se complaisent à nous le rappeler, INHUMATE n’est pas un groupe signé sur un quelconque label et ne bénéficie pas d’une distribution « classique » chez les multinationales qui remplacent peu à peu nos p’tits disquaires et VPC. Ils n’ont pas recours à la grosse artillerie médiatique d’une agence promo ni à des espaces publicitaires dans les magazines. La sortie d’un nouvel album d’INHUMATE se fait donc par le biais d’un réseau d’initiés et d’une promotion gérée par le groupe lui-même et plus précisément par Fred, leur bassiste, unique rescapé de la formation originale, véritable activiste de la scène alsacienne, qui se démène depuis longtemps pour perpétrer sa vision de la musique et de l’underground jusqu’à élargir son champ d’action à l’organisation de concerts et festivals.

Alors oui, INHUMATE nous gonfle parfois copieusement à nous brandir sous le nez son insolente intégrité de mes deux et pourtant… il y a derrière toute cette gouaille une idée de la musique que je rejoins volontiers. A sa façon INHUMATE nous rappelle que NON la musique n’est pas un produit et que tout n’a pas systématiquement un prix. Une notion de liberté qu’on retrouve invariablement sur chacun de leurs albums. Le groupe alsacien ne suit pas de mode qui leur ferait préférer tel ou tel producteur/studio/label/tendance musicale. Dans une démarche proche de l’entêtement, INHUMATE pratique un grind à l’ancienne bourlingueur et « The Fifth Season » s’inscrit dans cet exact registre ;
un grind sans éclat, sans technicité particulière, ne cherchant pas la surenchère de la rapidité mais plutôt l’efficacité d’une musique directe et testiculaire.
Certes, le groupe distille ici et là quelques petites touches personnelles qui apportent un brin d’originalité mais la démarche d’INHUMATE se veut directe et rentre-dedans. Il manquerait peut-être un peu plus de riffs accrocheurs pour que j’en fasse l’un de mes disques de chevet mais on passe un moment sympa de grind authentique. Ça en fera hurler plus d’un mais le fait de chroniquer ce disque pour ce qu’il est me paraît presque anecdotique.
Avec l’acquisition d’un album comme « The Fifth Season » on adhère à autre chose qu’à de la musique mais plutôt à une idéologie qu’on aimerait voir s’étendre davantage et bousculer le concept aberrant de la « musique consommable ».

Alors oui, INHUMATE nous gonfle mais l’idée de savoir qu’il demeure ce genre de bastion de résistance est aussi rassurant que respectable. INHUMATE ne doit rien à personne et s’est construit lui-même depuis bientôt 20ans, souhaitons que cela continue…
Pour un peu, ils pourraient paraphraser le Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand. « Ne pas monter bien haut peut-être mais tout seul ».
Total support !!!


Rédigé par : Cobra Commander & Tonton | 13/20 | Nb de lectures : 12858