Tonton: Difficile d’expliquer ce qui peut bien se passer dans la carrière d’un groupe culte pour qu’il sombre tranquillement dans une routine et engendre des disques de plus en plus moyens ? Sont-ce les affres de changements de line-up qui a vu défiler une quantité hallucinante de zicos ou tout simplement l’érosion progressive de la motivation, mais INCANTATION commençait à roupiller tranquillement sur son piédestal, si bien que nous étions nombreux à avoir décroché. Le mythique INCANTATION était en passe de devenir un combos de « has been » qui vivait d’avantage sur son passé que sur l’avenir.

Et puis l’improbable arriva avec le second départ de Mike Saez, la décision de John McEntee d’assurer lui-même le chant et un beau contrat tout neuf avec Listenable. Cette conjoncture allait permettre à INCANTATION de rebondir avec un « Decimate Christendom » chroniqué dans VS de façon fort pertinente par un Sheb auréolé de bon sens et de lucidité (à croire qu’il était sobre en rédigeant l’article) ; un album qui avait tôt fait de me réconcilier définitivement avec le trio de Johnstown, Pennsylvanie. Confiant quant au second souffle qui avait permis à McEntee de revenir au sommet de son art blasphématoire, c’est sans appréhension que je m’attelais à l’écoute de ce huitième album « Primordial domination ».

Fidèle à son registre le trio McEntee, Severn et Lombard nous revient avec neuf titres impies taillés dans le death metal old school qui avait fait la réputation du groupe. Outre les tempos changeants mais principalement lourds, les riffs puissamment assenés et ponctués de gros riffs lâchés, on retrouve le chant un peu moins monocorde d’un John McEntee qui a progressé dans ce domaine et qui s’essaye même à quelques timides mais convaincantes modulations éraillées. Fort du succès de son prédécesseur et des tournées qui en ont découlé, INCANTATION semble avoir mis les bouchées double sur le plan de la composition.

Mais ceci s’explique peut-être également par un fait sans précédent dans la carrière du groupe. C’est en effet la première fois, depuis ses débuts en 1989, qu’INCANTATION parvient à aligner le même line-up sur deux albums consécutifs. Il semblerait qu’avec cette « tri thérapie » musicale, INCANTATION soit enfin parvenu à une stabilité salutaire pour son death metal. Ce qui nous amène à l’excellent « Primordial Domination », à ses riffs majestueux, à ses intros épiques et surtout à ses ambiances oppressantes et morbides.

Pourtant, INCANTATION n’a pas découvert le secret de la pierre philosophale et encore moins la machine à courber les bananes. On reste dans l’utra-classique, un death metal relativement basique dont la réussite repose uniquement sur les facultés de composition de ses membres et sur les ambiances qu’ils parviennent à planter en l’espace de quelques accords. Et c’est exactement ce qu’INCANTATION réussit à faire en l’espace de neuf titres bien sentis. En prenant peut-être davantage de risques qu’avec « Decimate Christendom », la bande à McEntee nous revient avec un disque bien couillu et accrocheur. Vivement le prochain !

Sheb: Qu'il est triste de vieillir. Notre cher Tonton en fait aujourd'hui l'amer constat tout comme l'ensemble de la rédaction qui ayant bu les paroles du ministre de la santé se montre solidaire avec son ancien. Cette semaine c'est moi qui suis de garde, qui doit le surveiller, et veiller à ce qu'il ne se mette pas à nous chroniquer des groupes que la décence et le respect dû à son grand âge m'empêchent de dévoiler ici, ce qui lui arrive parfois quand il oublie de prendre ses cachets.

Pour celle-ci il n'a visiblement pas oublié de les prendre, il n'a pas confondu le groupe avec IMMOLATION, signe d'une inespérée lucidité. Il a également noté que le line-up était le même que pour l'album précédent, et ce pour la première fois... voilà qui n'est pas mal pour un groupe qui sort là son huitième album studio en quinze ans. Musicalement comme l'a bien dit le patriarche, pas de surprise, pas de featuring de Dr Dre, ni de remixes de Rudy Ratzinger, juste le bon vieux death old-school anti-chrétien auquel le groupe nous a toujours habitué. Reste juste à savoir si la cuvée est bonne. "Decimate christendom" avait montré un sursaut d'orgueil après quelques albums plutôt poussifs. Et cette cuvée est effectivement plutôt bonne. Rien de bien neuf ici mais des compos plus travaillées, plus inspirées et un chant un peu plus varié qui donnent au final un album plutôt sympa à écouter et dont les 40 minutes s'écoulent sans le moindre signe de lassitude.

Le groupe sera en tournée européenne en 2007 avec ROTTING CHRIST, CARPATHIAN FOREST, MALEVOLENT CREATION et NEURAXIS. Une date est d'ores et déjà prévue à Paris le 21 février. A vos agendas.




Rédigé par : Tonton & Sheb | 16/20 | Nb de lectures : 16565