Metal/tropicale... Metal/country... Metal/biguine... les idées manquent rarement aux groupes qui souhaitent évoquer le métissage et la folie-folie musicale. Ifif Between ne mixe donc pas la musique des îles avec le metal, vous l'aurez bien compris. Par contre, ils aiment quand c'est bizarroïde et ils ne se privent pas pour nous livrer ce que je qualifierais de "Free Metal" à forte consonance 70's, semblant être des enfants bâtards des Doors, de Mr Bungle, de Janis Joplin et des King Crimson. Alors oui l'évocation des noms ci-dessus ne fait pas référence à des manchots mais plutôt à des techniciens très ouverts, laissant leurs vagabondages musicaux s'exprimer à travers des voyages aux itinéraires tortueux.
Donc la question sera de savoir les IB sont des bons musiciens et s'ils ont les idées à la hauteur de leurs ambitions. Mais bon, on en est pas encore là.
Le groupe se situe entre Toulouse, le Thor et Marseille (c'est donc des gens du Nord) et ils ont déjà sortit un premier Maxi 5 titres. C'est donc avec "Speaking dog" que le groupe nous arrive pour nous présenter son œuvre.
Comme je le disais, cet album, a une atmosphère qui appartient à des temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître (en fait puisqu'on parle de 70's, c'est des temps que seul VS papy a pu connaître). Le plus surprenant c'est que le groupe ne semble pas chercher volontairement à sonner 70's... c'est un peu comme s'ils s'étaient trompés d'époque.
Quand je dis ça, ce n'est absolument pas une critique car il y a énormément de groupes qui essayent de trouver cette vibe sans jamais y arriver. Une chose est sûre, Ifif Between n'est pas branché par le côté le plus extrême de la musique barrée... mais ce n'est pas pour autant qu'ils sont facilement accessibles (ça fait même plutôt du bien de ne pas entendre les sempiternels plans polyrytmiques "à la Meshuggah"). On notera tout de même quelques passages un peu "méchants" (avec notamment la fin de "M 32" avec sa lourdeur et ses growls death metal).
Les riffs à la guitare privilégient les mesures sophistiquées, les harmonies lorgnant vers le jazz tout en restant tout de même assez musclées dans l'esprit. Bien qu'il n'y ait pas vraiment de démonstrations techniques type sweep ou Legato, le travail à la six cordes est très convaincant. Au niveau de la section rythmique, pas grand-chose à reprocher non plus, les garçons ont même le bon goût de se mettre systématiquement au service des chansons plutôt que de vouloir étaler leur savoir-faire instrumental. Pourtant si on en juge par "I don't want to disturb you", le bassiste en a sous le pouce et je regrette presque qu'il ne se mette pas plus en avant tant le travail qu'il réalise sur ce morceau est stupéfiant.
Le chant est assuré par une jeune fille aux faux airs de Janis Joplin qui, bien que montant très haut, a un timbre assez grave. Il est pas forcément évident de comprendre ce qu'elle raconte, d'autant que ses interventions fourmillent d'onomatopées et de borborygmes divers par moments très "pattonniens" et à d'autres plus personnels.
Les parties "calmes", chantées sont bonnes et à aucun moment il n'y a tricherie sur ce qu'elle envoie dans le mic. Alors bien évidemment, puisque c'est du "sans filet", il y a quelques passages un peu "justes".
Il faut préciser tout de même que la chanteuse module sur des gammes pas forcément évidentes et que les moments "out" au chant apportent clairement aux ambiances, rendant les morceaux encore plus spaces que ce qu'ils ne sont à l'origine.
Les morceaux sont souvent longs (dépassant souvent les cinq minutes) et suivent une progression presque naturelle. L'écriture n'est ici pas séquentielle pour un sou, ce qui donne aux morceaux de véritables identités et gomme le côté patchwork qu'ont parfois les groupes qui collent les riffs comme s'ils réalisaient un herbier musical.
En parlant d'herbier d'ailleurs, et comme l'avait fait Patton et Impaled Nazarene, on est à plusieurs moments proches des cris des animaux (encore une fois je ne dis pas ça d'une manière péjorative) dans les intonations au chant. A des moments plaintifs comme les miaulements d'un chat, ou chevrotant comme si Julien Clerc se mettait au metal. A d'autres moments, comme sur "..." on a franchement l'impression d'écouter ce qui passerait dans un conseil d'administration s'il était composé de Gremlins, de Critters et de Jawas.
La prod est convenable, un peu faiblarde par moments (en tout cas en ce qui concerne les passages les plus musclés) mais suffisamment claire pour pouvoir tout bien entendre et apprécier en même temps le côté "Old School" de l'ensemble.
Mais le plus difficile reste d'apprivoiser les chansons et les mélodies, le tout étant comme je le disais plus haut complexe et alambiqué. Complexe mais pas pédant, le groupe ne brade pas sa personnalité quitte à manquer de se crasher. L'album s'ouvre sur "Teddy Bear" et au final le petit ourson reste une très bonne définition de l'univers de Ifif Between. Allez teddy tourne le bouton et chante-nous des chansons.


Rédigé par : pamalach | 13/20 | Nb de lectures : 12147