Helfahrt est un groupe teuton qui nous vient de la banlieue de Munich. Il fut fondé en 1999 par Maximilian Marquard, désormais ancien bassiste de Sycronomica. Le projet est au départ solo et n'a pas eu le temps en neuf ans de traduire sa bio en anglais. Ma haute maîtrise de l'allemand me permet tout juste de deviner que le reste du quintette a débarqué à partir de 2005, muant la musique de Helfahrt de l'acoustique au pagan metal. S'ensuivent deux démos, Aufbruch (2005) et Sturmgewalt (2006), puis un album également intitulé Sturmgewalt en 2006 qui sera mis en boîte aux Helion Studios (où est passé plusieurs fois Lunar Aurora) par René Berthiaume (guitariste d'Equilibrium). Et nous voilà devant Wiedergang qui sort en juillet 2008 chez mes amis Trollzorn. Enfin, nous voilà surtout devant la locution "pagan metal", bien trop galvaudée de nos jours pour apporter un réel sens du contenu musical.

Disserter sur les subtiles nuances entre pagan metal, folk metal, viking metal, black folk et autres contorsions du metal extrême avec des éléments traditionnels ressemblent de plus en plus à un chemin sinueux sur lequel peu de monde ose s'engager de crainte de voir débarquer de soporifiques contradicteurs. Néanmoins, il va bien falloir que je m'engage quelque part si je veux vous décrire un minimum le travail des flatulents Allemands de Helfahrt. Loin de moi l'idée d'essayer d'imposer une définition rigoureuse à ces différents styles qui s'entremêlent. Si un point stylistique vous semble discutable dans ce que je vais raconter plus bas, je ne peux que vous inviter à créer un sujet sur le forum de VS, qui n'attend que ça. Le sujet est intéressant pour ceux qui aiment couper les étiquettes en quatre et je me ferai un plaisir d'y participer. En attendant, concentrons-nous sur ce Wiedergang. Je remonte mes manches.

Pagan metal, de nos jours, peut s'appliquer à des formations musicalement fort éloignées. La récente mise en lumière du folk metal a poussé les groupes du genre à globalement se définir pagan. Si l'étiquette était déjà revendiquée par certains pour leurs amours d'une thématique païenne (alors que beaucoup pratiquaient du black metal), j'avoue ne pas trop saisir la nuance musicale qu'apporte cette locution pour différencier le nouveau peloton de jeunes loups de l'ancien, étant donné que beaucoup pratiquent un mélange de heavy/thrash/speed avec les mêmes textes que leurs ainés alors étiquetés folk metal. Déjà que la nuance entre folk metal et viking tenait parfois à trois bouts de texte et un casque à cornes, le fourre-tout est désormais complet avec des groupes qui sont étiquetés black folk sur le simple fait de mettre une voix black sur du heavy ou plus généralement pagan metal sans que l'on comprenne vraiment le lien musical entre tous ces gens. Ayant lu récemment que le groupe russe Arkona pratiquait du black folk (?!?), il me semble adéquat de débroussailler un peu les choses sur la base de quelques exemples afin de ne pas égarer tout le monde. Des groupes comme Belenos, Primordial, Ensiferum ou Obtest ne chassent pas les mêmes proies.

Le terme pagan metal associé à Helfahrt, je vais l'évacuer immédiatement en ce qui concerne l'appréhension musicale du groupe. Devenu trop générique, il ne nous aide pas à mettre des notes sur les mots. Et si je prends mon idée précise de ce qu'est le pagan metal, on retombe sur ce que certains appellent le pagan black metal, c'est-à-dire pour être concis Errances Oniriques de Belenos. Helfahrt ne propose pas une boule de haine épileptique qui souffle la colère des Dieux. Donc, j'abandonne la locution pagan metal, pas très bien adaptée pour notre cas. Je délaisse aussi le terme viking metal. Bien que tout leur zinbrec soit en allemand, les Boches semblent orientés sur une thématique païenne et non nordique. Le style folk metal ne me semble pas non plus leur convenir, car il sous-entend qu'on a affaire à un metal traditionnel (heavy, thrash, speed) mêlé d'éléments folkloriques. Si le curseur peut être baladé très fortement entre ces deux pôles, le mélange ne donnera jamais le black metal qu'on peut entendre chez Helfahrt. Bon, j'ai été un peu long, mais j'espère avoir réussi à vous faire comprendre pourquoi je parlerai tout simplement de black folk et de rien d'autre.

Helfahrt propose une musique structurée sur des éléments black, avec de nombreux blasts et des guitares en tremolo. Des passages plus lourds font leur apparition, ainsi que des moments mélancoliques où interviennent la flûte ou la guitare acoustique. Mais l'ossature est un black metal rentre-dedans sur lequel se greffent des éléments plus traditionnels du folk metal. Si nous ne sommes pas ici sur du pur black folk à mon sens (c'est-à-dire un black composé avec des mesures inspirées de la musique traditionnelle mais ne déviant pas de son moule black d'origine, hop! pour l'exemple The Shadowthrone et Nemesis Divina de Satyricon), il s'agit bien de black folk dans sa définition plus étendue (black avec des inserts folkloriques). Une référence d'écoute me semble ici être le groupe allemand Helrunar. Pas mal de riffs des rythmiques se rapprochent de leurs compatriotes. A la nuance près que Helfahrt s'avère moins radical et "germanique" que leurs voisins patronymiques. Le son plus "groove" se rapproche à ce titre plus des groupes scandinaves de black folk. Ecoutez "Irrlicht" sur le MySpace et vous aurez des relents de la pulsation de Kampfar sur la partie centrale. De même pour "Wiedergänger", autre extrait proposé sur le MySpace avec sa mélodie centrale pulsée par une double qui ressemble à des riffs des Norvégiens.

Et, j'ajoute même que le black folk des Germains est de bonne facture. Une vraie bonne surprise vivifiante. Certes, rien ne laisse penser que l'empreinte dans les mémoires sera indélébile. Helfahrt ne propose pas une personnalité qui pourrait laisser des traces. Mais les dix compos sont efficaces et variées, avec des enchaînements plutôt bien foutus entre des rythmiques agressives et des passages acoustiques plus méditatifs. Wiedergang s'avère un album bien correct et donne une bonne patate, propre à taper du pied ou à secouer la tête selon votre humeur du moment.

Helfahrt est retourné aux Helion Studios pour enregistrer et la production est vraiment bonne, avec une exécution impeccable. Le son un peu rond de l'ensemble, qui laisse une grosse place aux fréquences basses, est franchement agréable et donne un côté organique et puissant aux 49 minutes de l'opus. Etant donné que la recette semble identique sur leur première sortie, cet album m'a donné envie de m'y intéresser de plus près.

Hé oui, tout finit par arriver un jour. Et voici un album de Trollzorn qui récolte plus que la moyenne sur VS. Il était grand temps. Si l'Enfer semble moins sentir bon que prévu, son Wiedergang s'avère une bien bonne transition avant de s'envoyer le dernier Kampfar. Glop glop.


Rédigé par : Prince de Lu | 14,5/20 | Nb de lectures : 11223