Cela faisait un sacré moment qu'on était sans nouvel enregistrement du duo Haemoth. Si des compilations de démos ont vu le jour chez Nihilward l'année dernière, le dernier EP Kontamination datait tout de même de 2005. Et puis Debemur Morti a laissé suinter l'info: oui, Haemoth était de retour. Et le troisième album du projet francilien a été placé sous la lumière blafarde des étals en novembre dernier.

Avant d'aller user ses cordes chez Spektr, Haemoth (guitare/basse/vocaux) nous avait laissé avec un Kontamination bien affirmé. Un black racé qui déroule des trémolos glacés et pose son ambiance mortuaire. Les riffs tronçonnés et le martèlement furieux de la batterie ouvrent la transe hypnotique d'un black ambient glacial. Si je vous cause du précédent EP, c'est que In Nomine Odium reprend les choses exactement là où elles en étaient restées. Limite, on pourrait croire que c'est la même session d'enregistrement, à la production près. On oublie la gangue sonore sourde de Vice, Suffering... et on garde les guitares acérées aux aigus crissants, les vocaux sifflant une haine presque inhumaine et les blasts secs et impitoyables d'une machine de mort lancée à plein tube.

Le riff est longuement répété avec fougue, laissant le temps de s'immerger dans ce tapis de notes sépulcral. Les morceaux présentent de nombreuses similitudes, livrant une gangue homogène dont il est difficile de s'échapper. La redondance fait partie du style adopté, et elle est ici appuyée par la mise en place épurée d'un Haemoth qui ne fait pas dans le détail. Le godemiché n'a pas été usiné et calibré, il vous sera introduit violemment et sans ébavurage préalable. Ça blaste d'un côté, ça envoie du trémolo de l'autre alors les accords sont arpégés. Mais malgré tout ce déferlement, c'est quand le tempo ralentit qu'une grand bouffée d'air vicié est accordée à l'auditeur. C'est lors de ces expirations que je perçois la meilleure inspiration: le passage central de "Son of the Black Light" (finalement trop peu développé), l'arpège final de l'album aussi simple et dépouillé que bandant.

Pourtant dans les riffs, je dois avouer que Haemoth me laisse un peu sur ma faim. In Nomine Odium reste tellement dans la ligne droite du parti qu'il nous prive aussi de tout grain de folie. On ne peut pas blâmer l'artiste de s'entêter dans ce qu'il sait faire de mieux, mais l'adhésion de mon côté est moins là. Et il faut dire que le chemin du black ambient a été maintes fois foulé ces dernières années. Mais des formations plus jusqu'aux-boutistes (comme Darkspace) ou plus barrées (comme Spektr, justement) sont passées par là depuis. Et malgré toute sa vigueur, malgré sa soif d'en découdre, Haemoth fait presque figure d'enfant sage face, par exemple, au déferlement sidéral de fréquences des Suisses. In Nomine Odium s'écoute trop sereinement, surprenant d'autant moins son auditeur.

Si vous êtes un mordu du genre, il est fort probable que ce gruot d'outre-tombe vous paraisse un mets bien doux. Si vous n'exigez que le meilleur de chaque style, nous n'avons pas atteint la cote d'excellence d'un grand cru cette fois-ci. A vous de voir quel est votre niveau de subjectivité.




Rédigé par : Prince de Lu | 14/20 | Nb de lectures : 13201