Non, madame, la neige, la barbe drue, les cornes à boire et les vénèr Vikings ne sont pas l'apanage de la Scandinavie. Pour lutter contre les idées reçues, il devient impératif d'évoquer les grandes invasions vikings en provenance du Portugal. En 793, au moment même où les Scandinaves se ruaient sur Lindisfarne, débutant à cette occasion une longue période où les barbus allaient gentiment demander leur route à des moines, les farouches guerriers portugais s'élançaient de leurs côtes pour conquérir le monde et terroriser tous les ports du sud de l'Europe. Si les livres d'histoire ne disent pas un mot de cette incroyable épopée, c'est peut-être parce que l'expédition tourna court rapidement, les Vikings portugais ayant la fâcheuse habitude de carreler entièrement leurs embarcations. Le défaut sera corrigé plus tard avec l'invention du linoleum, mais les Vikings portugais avaient raté le coche.

Et si vous trouvez cette introduction débile, imaginez ma lassitude au moment de chroniquer un énième groupe qui loue des valeurs ancestrales tirées d'un livre pour enfants. Les poses avec les grosses n'épées et leur neige ajoutée sur Photoshop sont à l'avenant d'une musique digne de l'écurie Trollzorn catalogue automne-hiver 2009. Bref, ça fantasme du Viking à grands coups de synthé chez Gwydion. Tiens, une question me vient: les Vikings avaient-ils des synthés? Aaaah, on me dit que les grandes nappes de Bontempi sont censées donner un côté épique au bazar. Ben non, raté. J'aurais préféré entendre un minimum les guitares, nos joyeux lurons en oubliant qu'ils sont avant tout un groupe électrisant.

"Three Horns, Tryskelion!", voilà le genre d'hymnes qu'on se tape pendant 50 minutes. Gwydion essaie de cacher la misère à grands renforts d'une production bien gonflée (mixage au norvégien TopRoom Studio par Børge Finstad, s'il vous plaît). Les chœurs masculins pètent autant au nez qu'ils sont vides. Un chant féminin opératique tente d'apporter une touche mélancolique sur "Oflussa", qui s'avère tout aussi "bidon". Ils auraient pu s'arrêter là mais les guerriers ajoutent encore une intervention féminine malvenue sur "The Terror of the Northern". Et je n'ose évoquer les parties de gratte tellement on s'approche dangereusement du trou noir.

Il manque à Horn Triskelion une énorme dose de riffs pour espérer intéresser un minimum. Gwydion repompe Ensiferum et la moitié des groupes allemands du genre, mais la formation ne parvient pas à donner la moindre touche d'humanité à une musique impersonnelle et chiante comme la pluie. Boudiou, qu'elle est encore loin la fraîcheur de la neige. Encore du viking metal de salle de bains, tout juste bon à déguster une bière au bar. "Three Horns", tavernier!


Rédigé par : Prince de Lu | 09/20 | Nb de lectures : 12612