Cela faisait un petit moment que nous n'avions plus parlé dans ces pages du label Antiq Records. Pour ceux dont la mémoire n'est plus très vivace en ces jours d'apéros estivaux, nous avions découvert ensemble et il y a quelques années déjà les débuts du catalogue de ce label pas tout à fait comme les autres. Nous avions donc fait la connaissance de groupes tout à fait remarquables (comme YELE SOLMA, THEORIA ou CATHEDRALE DE GLACE), des combos beaucoup plus difficiles à appréhender (ORDOS BLASPHEMUS, Ê) et des musiciens aux concepts carrément pas évidents à comprendre comme LA CHAMBRE ARDENTE.
Si les premières sorties du label se caractérisaient par un son ultra crust, le temps a fini par amener le label à proposer des prods beaucoup plus claires et au final bénéfiques aux groupes et à leur musique. Cependant, aucune des sorties « récente » n’est dénuée de cet état d'esprit si particulier à Antiq. Attaché aux artistes qui creusent leurs concepts de manière très fouillée et réfléchie, Antiq n’a pas changé son fusil d'épaule avec GRYLLE, combo de « Traditionnel/Black – Folk/ritual » dont nous allons parler aujourd'hui.

GRYLLE nous propose donc avec "Monstres et Merveilles" son premier album de musique médiévale haineuse. Uniquement disponible sur K7, l'artwork n'est cependant pas dénué de cachet et d'ornements puisque le livret est peint à la main et à l'or (?!) et présente un aspect parfaitement en lien avec l'univers évoqué par le groupe.
Comme je le disais dans l’introduction, difficile de parler d’Antiq sans parler du son et des productions parfois rustres qu’il nous proposait au début de son existence.

Ici, force est de constater que tout sonne d’une manière particulièrement claire, limpide et sans accro… ce qui est évidement un plus énorme quand on joue un style de musique comme Grylle où chaque instrument doit trouver sa place dans l’harmonie générale. Je regrette juste le son du Charley qui sonne de manière beaucoup trop forte par moments et couvre le reste des instruments, mais pour le reste, c’est niquel ! Les voix, tantôt black et criardes puis chantées ou déclamées trouvent bien leurs places dans le mix et agrémentent agréablement le tout, puisque l’instrumental a ici une place de roi. Plus murmurée que hurlée, la voix « black » fait penser à un sorcier reptilien crachant son venin sur les hommes, les lyrics des chansons étant particulièrement en lien avec cette haine qui transpire de la gorge du chanteur.
Flûtes, psaltérion, tambour, triangle, Saz Baglamas, uth, basse, batterie, cymbales, la liste des instruments traditionnels (et modernes) utilisés pour l’élaboration de cet album est assez dodue et garantie sans utilisation de synthétiseurs. Un peu redondante car jouée sur des tempos qui varient assez peu, le coté froid et hypnotique de la musique prend rapidement des airs menaçants, les lyrics singuliers des chansons venant encore rajouter à l’atmosphère particulière de GRYLLE. Des exemples ?

« De Audacibus Germanibus » traite de la bravoure, le tout hurlé en Germain ancien, « Sauvagerie et Oursitude » parle du ressentiment que ressentent les ours par rapport à leurs voisins dits « civilisés », les Hommes, « Des grylles, têtes à jambes et chefs dépourvus de corps » : description de ces créatures étranges vues par Marco Polo, « Le Chant du caladre », description de la bête mythique guérisseuse de maux et « Jay nom d’espérance » instrumental plus lumineux que les morceaux précédents.
Je retiendrais personnellement « Le chant du Caladre » qui avec son chant récitatif et son ambiance majestueuse m'a fait rappuyer sur play plusieurs fois et « Des Grylles... » qui avec son atmosphère un peu claustrophobe fait mouche dès la première écoute.

Premier essai donc très convaincant pour ce groupe de passionnés qui connaissent très bien le sujet dont ils parlent. C'est le sieur Hyvermor qui a chapeauté le concept et on sent sa passion de cette époque pointer du début à la fin de la K7. C'est certainement d'ailleurs cet intérêt profond pour l'histoire qui amène le bonhomme à détester tout ceux qui n’abordent le sujet que sous l'angle des panneaux pour touristes et vulgarisent donc les sujets pour les rendre plus accessibles ou commerciaux. A vous de voir si vous kiffez ou pas, en tout cas, le petit prix de l'objet justifie largement qu'on y prête une oreille et qu'on accorde une chance au projet.




Rédigé par : Pamalach | 14/20 | Nb de lectures : 21672