La fin d’année est déjà là avec son cortège de boules multicolores, de guirlandes et de festivités clinquantes. Alors, si cette atmosphère joyeuse vous plonge dans les affres d’une misanthropie profonde jusqu’à haïr tonton Robert qui va écluser son stock de blagues graveleuses de débats de bistrot lors du repas de famille, Sepulchral a pensé à vous. Le label québécois vous fait rien de moins que le remake de Godzilla vs King Kong avec la rencontre au sommet de Gris et Sombres Forêts. Après le Sui Caedere, on peut dire que cela aura été une année fondée sur les projets spéciaux mâtinés de latinisme dépressif pour nos Canadiens.

Je dois bien avouer qu’à la réception du colis, je fus plutôt sceptique car si on peut apprécier les deux groupes séparément, j’avais de sérieux doutes de ce qui pouvait sortir de différents voire d’original de la collaboration de deux entités oeuvrant dans des univers finalement proches.

Il semble que les combos avaient besoin d’un partenaire pour oser s’affranchir des carcans de leur style habituel et crier à la face du monde son admiration pour le Shining dernière période car on retrouve la même velléité à exploser le style en vagabondant allègrement vers des sphères moins balisées.

La procession commence son périple par les accords funèbres d’un piano sur lequel va venir se greffer une guitare grésillante. C’est la surprise dès l’entame du premier titre avec l’apparition d’un riff agressif et menaçant. Par la suite ce morceau se fait progressif avec l’arrivée d’un passage que l’on pourra qualifier de post à tendance chaotique. On retombera délicatement sur nos papattes grâce à des arpèges typiques du black dépressif et on se finira sur une note atmosphérique.

Etonnement à nouveau lors du quatrième morceau subtilement baptisé "IV" qui s’avère être un instrumental. Ce titre démarre par un riff bien lourd et bien gras limite rock’n’roll et fera sa route avec des riffs en saccade très post-core pour se finir délicatement dans les volutes atmosphériques d’un post-rock subtil.

Difficile de passer sous silence le morceau titre avec ces guitares dissonantes alternées par des passages acoustiques et surtout il faut absolument évoquer le chef-d’œuvre de la galette : "Senectus".
Morceau qui laisse les guitares à l’arrière pour mieux mettre en valeur le piano, des plages de cordes et des chœurs fantomatiques. Le titre se montre réellement poignant de bout en bout.
L’album se pare de suffisamment de mélodies pour que l’auditeur se laisse attraper malgré un certain degré d’implication pour appréhender toutes les nuances.

Ce vagabondage éclectique entre différents styles demeure cohérent et subtilement agencé jusqu’au bout. A ce titre, la batterie montre un feeling léger et versatile quasiment jazzy par instant. La prod sobre et naturelle renforce ce sentiment de fluidité et de simplicité. On pleure, on headbang et on est séduit par tant de diversité et de sobriété.

Les vocaux et la batterie se partagent entre Annatar et Icare. On remarque à peine le changement de vocaliste. Les textes fort « joyeux » sont hurlés à la fois en anglais et en français. Je ne suis pas chauvin mais je préfère les passages francophones qui par le biais de la prononciation apportent plus de caractère au chant.

Au bout du compte, ce skeud complètement inattendu s’apparente à un très beau moment. Cette odyssée triste et progressive s’insinue subtilement sans faiblir même si je dois avouer que les premières écoutes ne se sont pas montrées immédiatement attachantes. L’album demande de l’attention et de la disponibilité. Une superbe surprise pleine de mélancolie qui s’avère bien moins tape à l’œil que le dernier album du modèle déclaré (Shining) qui m’avait bien épuisé avec ses soli inutiles et son pathos un poil surfait.

Une pépite à la fois noire et subtile qui vous fera réchauffera le cœur lors de ses déprimantes fêtes de fin d’année.


Rédigé par : Dark Rabbit | 16/20 | Nb de lectures : 12595