No Fun. No Mosh. No Core. No Trends.
No Flyer. No IRC. No Address. No Answer.
No Interviews. No Photo. No Face. No Contact.

No Review ? Avouez que c’est tentant… mais il serait dommage de passer à côté d’un texte argumenté pour cette sortie. Mais pas vraiment pour en souligner la qualité musicale, plutôt pour essayer de créer un débat sur ce projet au « discours » bien curieux.

GLACIATION est un projet de Black-Metal français formé en 2011, qui possèderait pour seul membre ***, ou plutôt une « entité multiple ». Son premier témoignage musical, EP sorti aux formats vinyl et cassette, se nommera 1994. Pourquoi ? Parce que le projet dit avoir été confronté pour la première fois au Black-Metal en 1994, tout simplement. D’emblée, et au vu des quelques visuels, on sent bien que GLACIATION cherche juste à rendre hommage à cette période dorée du BM. « The projects depicts how we were, how it should have remained = untouched, and how ridiculous it became », bref le discours de base « le BM c’était bien en 1994, il ne fallait pas le faire évoluer, depuis il n'y a eu que de la merde », qui plaira ou pas. On s’attend donc à être confronté à un disque de BM bien grim et roots, à la old DARKTHRONE, BURZUM et SATYRICON, avec une production 4 pistes, une absence d’éléments « vntrve » comme le clavier ou le chant clair, et des riffs simples mais prenants. « GLACIATION » oblige, on s’attend à ce que le tout sonne bien glacial. La réalité va être bien plus complexe que ça…

D’emblée, j’annonce juste que mon avis va être 666% subjectif (comme toujours me direz-vous, l’objectivité c’est pour les trends), je ne cherche pas avec cette chronique à faire une analyse musicale mais à créer un débat. Car il faut qu’on m’essplique. Oui, il faut qu’on m’essplique qu’est-ce que ce projet a de si exceptionnel musicalement. J’ai pu croiser sur VS (et un peu ailleurs) des commentaires souvent dithyrambiques sur le projet, souvent à la seule écoute des teasers vidéo, sans autre argumentation que « c’est génial ». Les chroniques déjà parues sont très positives également. Pourtant, j’ai bien du mal à saisir ce que GLACIATION a de plus que les 1994 autres groupes de BM un peu atmo et old-school. 1994 est globalement un bon EP, avec des riffs inspirés, des trémolos épiques enflammés, des vocaux déchirants très prenants, et une atmosphère glaciale à souhait. Mais voilà, ce style de BM court les distros underground, et le groupe n’a vraiment rien de plus qu’un groupe ou qu’un autre. C’est bien mais sans plus quoi, le groupe ne sort pas vraiment du lot. Le but, c’est juste l’hommage au BM de 1994 me direz-vous, après l’originalité ou l’intérêt du truc on s’en tamponne un peu tant que ça tient la route. Je pourrai comprendre la démarche, mais comme je le disais, la réalité est bien plus complexe que ça…

Car GLACIATION, c’est quand même bien plus que du simple BM début années 90. Et le projet, taxé d’« Anti-Black Metal » résoluement nostalgique qui semble jetter l’opprobre sur le mauvais BM post-1994, est pourtant bien confronté à tout le BM « tendance » qui pullule depuis quelques années déjà. Car oui, sortir son EP uniquement aux formats vinyl et cassette, c’est tendance. Poster des teasers sur Vimeo, c’est tendance. Se la jouer anonyme et mystique, c’est tendance. Le foin autour de l'artwork cousu dans le dos, c'est tendance. Faire du Metal old-school revendiqué haut et fort, c’est tendance. Même dire « c’était mieux avant » est tendance. Pire encore, 1994 comporte quelques éléments musicalement bien « tendance ». Grim Black-Metal ? Certes, 1994 nous balance un Black « traditionnel », mais figurez-vous que bon nombre de groupes tendance utilisent de nombreux gimmicks du BM old-school. Et GLACIATION va alors progressivement repiquer chez ces groupes quelques gimmicks qui lui font tendre vers du « Black à casquette », constat qui se fait bien insistant dès le second morceau de la face A, "Glaciation". Allons-y gaiement : Intro au clavier saturé à la PAYSAGE D’HIVER ? Tendance. Trémolos mélodiques et cristallins qui se taillent la part du lion ? Tendance. Vocaux arrachés sous-mixés ? Tendance. Litanies en chant clair post-rock discrètes mais bien présentes ? Tendance. Breaks acoustiques façon DSBM ? Tendance. Dans l’ensemble, GLACIATION penche quand même très nettement vers un BM atmo à la mode, plus que vers un BM furieux façon Transilvanian Hunger. Certes, le tout possède une filiation évidente avec BURZUM qui a plus ou moins créé le genre Black Atmo, mais tous nos amis à casquette et chemises revendiquent aussi cette influence… GLACIATION veut revenir au BM de 1994, mais se place quand même dans la lignée musicale d’une certaine scène honnie par bon nombre de beumeux puristes. Et quand on constate que la face B de l’EP, "Eûs (Notre Rechute)", est un morceau 100% acoustique avec uniquement du chant clair, totalement hors-sujet à une quelconque forme de Black-Metal, on a du mal à comprendre quelle est la vraie démarche du groupe… si ce n’est se faire remarquer. Ou alors, tout est un gros foutage de gueule depuis le début. Mais, et je suis peut-être un peu naïf sur les bords, j'ai du mal à y croire...

Dommage, car il y avait de quoi faire quelque chose de cool (même si le cool, c'est pas true). "1994" est un bon morceau mais le reste de l’EP offre d’autres perspectives pas forcément heureuses. Après tout, pris comme du vrai Black à casquette un peu plus porté sur les riffs que les atmosphères, 1994 est un bon EP pour le genre, mais encore une fois GLACIATION n’a pas vraiment de personnalité propre pour se démarquer. Ce ne sera ni le premier ni le dernier groupe à faire ce style, et à revendiquer un esprit « old-school » pour enrober le tout. Alors quand en plus la démarche et la « communication » me semble être antinomique avec ce que le style proposé est devenu aujourd’hui (sauf dans l’optique d’un foutage de gueule bien évidemment), je ne comprends pas. Et je ne comprends pas pourquoi le projet recueille tous les suffrages. Même s’il y a un minimum de qualité pour retenir l’attention, tout cela me semble être un plan marketing mal ficelé. Reste alors les paroles de "1994", véritable témoignage d’une nostalgie pour une époque révolue, mais qui encore une fois me semble être assez vain compte tenu de la démarche purement musicale. Extraits choisis :

- Tous les arpèges en pluies acides / martelant tous les riffs en plombs / abritant mon amour lucide / pour les pseudonymes à la con.
- C'etait le Mordor à Meudon / et sa forêt périphérique. / Le paganisme ésotérique / qu'on pratiquait sur nos balcons.
- C'était Ctulhu à Charles Michel / c'était Jean-Paul Bourre à Javel / sans une gonzesse aux alentours / et nos poignets pour faire l'amour.
- La vie en capitales gothiques, / pur porc et sans chant féminin, / des photocopies oniriques / et pas trouvables en magasin.
- Et pas trouvables en magazine, / ces traitres qui ne comprenaient rien! / Des torche-culs en trou-de-pine / qu'on lisait pourtant, clandestins.
- Et j'allumerais plusieurs chandelles, / par tous les bouts, au nom d'hier / du Metal Noir tu restes fier, / ou tu finis à la poubelle.

Alors j’ouvre le débat : démarche sincère ou pur trollage ? Vrai BM old-school ou Post-Black-trendy non assumé ? Et par-dessus-tout, quelles sont selon vous les réelles qualités musicales de ce projet qui justifieraient son succès ? Est-ce que comme d’habitude, je n’ai rien compris… ?


Rédigé par : ZeSnake | No Note/ | Nb de lectures : 19809