Vous vous souvenez de ce petit objet nommé 45 tours ? Mais si vous savez, cette petite galette où l’on mettait une chanson par face seulement… Pour les plus, ahem, ‘matures’ d’entre nous (enfin ceux qui ont – snif – plus de trente ans minimum donc), c’est souvent par son intermédiaire que l’on a fait nos premières découvertes et que l’on a eu nos premiers orgasmes musicaux. Ah là là, la nostalgie m’étreint d’ailleurs de mes mains veules et grassouillettes quand je repense aux murs de ma chambre de sage élève de CM2 résonnant jusqu’à plus soif des échos assourdissants du « Final Countdown » d’Europe, le numéro 1 du Top 50 (« salut les petits clous ! ») à l’époque… Eh bien plus de deux décennies plus tard, sachez que ce format a priori obsolète refuse de crever la bouche ouverte. Alors certes, le vinyl, qui est devenu désormais un objet de collection, survit avant tout via le 33 tours. Mais quelques irréductibles – neuf fois sur deux membres de la tribu ‘grindcore’, toujours aussi fana du bon vieux split - continuent malgré tout de défendre son petit frère contre les méchants envahisseurs numériques.

Or les causes perdues, les nerds de Funerot les connaissent bien: rien que l’année dernière, ils avaient édité non seulement un maxi 10 pouces (‘Nova II’) uniquement en vinyl mais aussi une bonne vieille K7 de l’une de leur répét’ (‘Rehearsal July 2007’), comme au bon vieux temps. Manquait plus donc à leur tableau de chasse qu’un bon vieux 45 tours et c’est aujourd’hui chose faite avec ‘Stranded in Time’. Alors oui, comme dirait Jean-Pierre Coffe, cela sent le terroir : quatre morceaux pour une durée totale de même pas huit minutes, un label inconnu, une pochette en noir & blanc signé par le batteur/chanteur fou du groupe, Reuben Storey, et en guise d’info, une simple feuille photocopiée recto-verso glissée dans l’emballage. Sauf que pour les deux fans et demi de leur punk/thrash foutraque rempli de monstres de science-fiction de série Z et de textes absurdes balancés à la vitesse de la lumière qui n’en peuvent d’attendre un successeur à leur, pour l’instant, unique album ‘Invasion From Death Dimension’, ce petit instant d’éternité est un bonheur intégral tant il est à contre-courant de 99% de la production actuelle. Plus que jamais, Funerot y sonne comme le croisement digne d’un vieil épisode de ‘Star Trek’, de DRI et de Voivod, dont le type de riffs refusant de faire un angle droit squattent ici tout l’espace. On pourrait même dire à l’écoute du morceau-titre que l’influence des Canadiens est devenu largement prépondérante, aussi bien musicalement que textuellement, tant cette histoire de savant-fou coincé entre deux couloirs temporels aurait pu sans problème échouer sur ‘Dimension Hatröss’. Après, tout est une question de références avec Funerot et ‘Stranded In Time’ n’échappe pas à la règle. Parce que si vous ne partagez pas leurs goûts pour les bandes dessinées ringardes, la science-fiction de supermarché et la culture ‘trash’ des années 80, vous ne rigolerez sûrement pas plus de deux secondes et demie à leurs vannes d’adultes attardés ou à leur reprise style musique de cartoons du « Funzone » du comique américain Al ‘Weird’ Yankovic, spécialiste de la parodie musicale. Par contre, si vous êtes capables de réciter par cœur les dialogues de ‘Retour Vers Le Futur’, si vous avez conservé toute votre collection de ‘Strange’ et si vous portez toujours en cachette vos baskets à languettes, amis neuneux, vous n’êtes plus seuls ! En gros, Funerot est à Municipal Waste ce que ‘Critters’ fut à ‘Gremlins’ : une variation foutraque et fauchée mais au final plus fendarde, à condition d’aimer les taches de ketchup bon marché.


Rédigé par : Olivier 'Zoltar' Badin | 3/5 | Nb de lectures : 10772