Ouch.
Celui-ci, on peut dire qu’on ne l’avait pas vu venir, pas comme ça en tout cas.
Il faut dire que la carrière de FLESHGOD APOCALYPSE semblait prendre une direction somme toute « classique ». Pris au départ comme un simple side-project de Francesco Paoli de HOUR OF PENANCE qui fait du HOUR OF PENANCE en moins brutal et plus technique, FLESHGOD APOCALYPSE a rapidement évolué. Peut-être trop rapidement ? Après un Oracles (2009) très bon mais pas encore inoubliable, le groupe semblait continuer son petit bonhomme de chemin avec l’EP Mafia (2010) qui ne présentait pas grand-chose de neuf. On aurait aimé voir le groupe italien développer un peu plus son concept « néo-classique ». Paoli ne faisant désormais plus partie de HOUR OF PENANCE (dommage, son débit ultra-rapide de chant manquera beaucoup), FLESHGOD APOCALYPSE peut désormais se laisser exploser et laisser tous ses musiciens s’exprimer. Et c’est là que débarque le deuxième album du désormais quintette, Agony.

Eh bé…
La première surprise arrivera avec le premier single, "The Violation". FLESHGOD APOCALYPSE a désormais pleinement intégré son concept dit « baroque » à son Death-Metal léché et Agony sera un album véritablement symphonique. Un mix de blasts et d’orchestrations à tout-va, sous couvert d’un Death rentre-dedans sans être foncièrement brutal ni véritablement technique, mais toujours efficace. Le chant clair fait également son apparition (tout en restant discret, comme les quelques passages en chant féminin). Et l’aspect sympho, présent à l’état d’interludes sur Oracles englobe le tout et devient la première chose que l’on retient de FLESHGOD APOCALYPSE. "The Violation" s’était donc avéré être une excellente surprise, montrant un groupe qui devenait vraiment original et novateur. L’attente pour découvrir l’album complet fut donc émaillée de plusieurs questions, sous couvert de la crainte que le groupe allait soit en faire trop, soit délivrer un disque révolutionnaire…

Œuvre singulière ou vaste fumisterie ?
Performance musicale ou délire mal assumé ?
Second degré ou premier degré ?
Chef d’œuvre génialissime ou gros n’importe quoi bordélique ?
Opus abouti ou expérimentation foirée ?
La masse de questions qui se sont soulevées trouveront-elles leurs réponses avec l’écoute complète de Agony ? Difficile à dire, il est même plus aisé d’avouer que cet album va diviser les foules. La première chose, c’est que ceux qui ne supportent pas le sympho peuvent illico-presto passer leur chemin, c’est évident et c’est dit. Les autres vont maintenant devoir faire un effort. Imaginer un DIMMU BORGIR ou un SAMAEL (de par le chant souvent martial) qui pète les plombs et qui se met à faire du Brutal-Death à gros blasts peut déjà donner une idée de la bête. Le fond musical n’évolue pas tant par rapport à Oracles, à savoir un Death mi-brutal mi-technique très rapide, mais tout le reste a changé. Pour le meilleur et pour le pire. Chaque écoute de Agony se termine par la même sensation de postérieur entre deux chaises, partagé entre le fait d’avoir entre les feuilles un truc globalement excellent et ultra-jouissif, mais qui se base sur un mix incohérent loin d’être totalement réussi (à ce stade de la carrière du groupe). L’impression qui m’est donnée, c’est de voir l’album joué dans une boule de cristal, avec les effets sympho se présentant sous formes de masses bleues tournant autour du groupe qui joue, avec un set de batterie bien en évidence au centre. Tout ça pour dire que le déséquilibre dans les instrumentations de Agony est grand, les orchestrations (pas très étoffées et se résumant à des violons dans tous les sens) et les blasts de batterie prenant le pas sur tout le reste, hormis peut-être le chant (qui est ici assuré par Tommaso Riccardi et non par Francesco Paoli, même si à peu près tout le monde fait des backings et que leurs vocaux sont similaires) toujours aussi bien mené et prenant. Alors donc, à mon sens le mélange bâtard du nouveau FLESHGOD APOCALYPSE ne fonctionne pas très bien car pas encore totalement maîtrisé et quelquefois bien bordélique. Pourtant, le charme opère, mais pas forcément pour les raisons attendues…

Car Agony est tout de même un bien bon album de Brutal-Death moderne percutant comme il faut. Du bien chaloupé "The Hypocrisy" (avec des riffs géniaux) au très rapides "The Imposition", "The Betrayal" et "The Oppression" (tendance très violent), en passant par l’accrocheur "The Violation" (vraiment un sacré tube, le seul morceau où le mix sympho/death est bien amené) ou les plus épiques "The Egoism" (au départ bien incisif) et "The Forsaking", Agony présente tout de même un aspect death particulièrement efficace, entraînant à souhait, et souvent jouissif de par l’apport des orchestrations (et des solos tous excellents). Même si tout n’est pas parfait, on a quand même envie de se renvoyer Agony assez régulièrement pour se décalotter les tympans. Mais en observant la bestiole d’un peu plus près, quelques petites ombres au tableau apparaissent. Une certaine linéarité se dégage de l’ensemble, notamment sur les 3 premiers titres (hors intro) plus à prendre comme un bloc en pleine face, ou encore "The Oppression" qui aussi bon soit-il, n’apporte rien de plus (notamment au niveau des lignes de chant clair stricto-sensu identiques à celles de "The Hypocrisy"). FLESHGOD APOCALYPSE se répète un peu pendant les 49 minutes que durent Agony et c’est bien dommage, la variation des tempos n’étant pas assez marquée, les passages les plus bourrins étant ceux qui retiennent vraiment l’attention. Mais l’efficacité est toujours de mise, et de ce côté la prod de Agony encule. Bref, si on se vide un peu le cerveau, Agony passe comme papa dans maman (ceci n’ayant rien à voir avec le terme que j’utilise pour qualifier la prod une ligne avant).

Chacun en pensera ce qu’il voudra, Agony pouvant paraître génial et novateur pour les uns tout autant qu’il apparaîtra insupportable et prise de tête pour d’autres. Opus complètement différent d’Oracles, il est donc quasi-impossible de dire « si vous avez aimé le premier, vous aimerez/n’aimerez pas celui-ci ». Un gros n’importe nawak qui s’avère pourtant jouissif sur la durée, avec des passages qui donnent envie de headbanger ou de taper frénétiquement du pied pour suivre les blasts. FLESHGOD APOCALYPSE prend donc une nouvelle direction, très osée et risquée, et de ce fait pas encore au point. Agony est un bon départ dans ce nouveau style, mais le groupe arrivera vraiment à convaincre lorsqu’il fusionnera un peu mieux ses orchestrations sympho à son death rentre-dedans, et qu’il lèvera un peu le pied pour mieux gérer ses tempos. En tout cas, il y a ici du gros potentiel, qui nous prouve que le « baroque » peut aussi être violent quand il le veut bien.


Rédigé par : ZeSnake | 14/20 | Nb de lectures : 15361