“Fen” signifie “marais”, et le groupe anglais, Fen, qui officie dans un registre annoncé comme du black metal atmosphérique s’est justement monté dans une volonté de rendre hommage aux paysages envahis de marais qui caractérisent l’est de l’Angleterre. Il n’est donc pas surprenant de retrouver ces tons de brun terreux et cette lande désertique sur l’artwork très réussi de leur disque, «Ancient Sorrow », annoncé comme un EP malgré sa durée de presque une demi-heure tant il est vrai que seulement trois titres le composent.

Si le groupe reprend effectivement à son actif certains éléments typiques du black metal, comme les nappes de guitare limite shoegazing et les voix de sorcières, le tout fortement traité à l’écho, le premier élément qui saute aux oreilles et qui différencie le son de Fen est la batterie. En effet, le traitement de l’instrument est à 1000 lieues des standards du métal, qu’il soit black ou pas : un feeling très indie ou post-rock se dégage de l’instrument la plupart du temps, en dehors de quelques passages de blasts plus dans l’esprit originel (ou « trve » selon la terminologie officielle). Les rythmiques sont amples, le plus souvent mid-tempo, et le son très roots pour l’ensemble des instruments.

Les trois longs morceaux qui composent cet EP semblent tourner autour d’une thématique plutôt païenne et naturaliste (voire celtique ?) que sataniste à proprement parler. Le feeling qui se dégage de l’ensemble est indéniablement sombre, et exprime des sentiments telles que la mélancolie et la douleur, associées à une certaine exaltation traduite par le côté épique que l’on retrouve tout au long du disque. La musique n’est donc pas strictement black metal, et s’il est vrai que le genre ne se limite plus à un style particulier depuis longtemps, Fen développe une sensibilité qui s’inspire aussi du folk, du rock progressif ou encore de l’ambient, ce qui pourrait évoquer des formations comme Tarantula Hawk (avec l’utilisation de claviers), ou parfois Pelican dans une certaine mesure, mais agrémentées de voix. Voix qui prennent une place non négligeable dans le son du groupe puisque le guitariste et chanteur principal se voit soutenu par le bassiste et le clavier qui se chargent aussi de certaines parties vocales. Le résultat est d’ailleurs assez convaincant, alternant les hurlements torturés et caverneux typiques du genre, des parties chuchotées, ou plus chantées et mélodiques, voire des chœurs ou encore des spoken words.

Au final, si on voulait jouer avec les étiquettes, on pourrait qualifier le son du groupe de post-black metal ambient et atmosphérique, de par la présence de réminiscences post-rock ou core induisant parfois une certaine transe limite psychédélique (ou en tout cas hippique, pas celle des chevaux, celle des hippies) pas si éloignée de ce qu’un groupe tel que les Tchèques Lvmen, fleuron du post-hardcore intelligent européen, peut proposer.


Rédigé par : NicoSata | 12/20 | Nb de lectures : 10195