EWIGKEIT - Radio Ixtlan (Earache/M10) - 08/10/2004 @ 09h14
Ewigkeit déboule chez Earache nanti d'un passé black metal sans étincelle. Il y avait donc anguille sous roche. Ladite anguille pointe le bout du museau dès la lecture de la bio: Ewigkeit pratique désormais un patchwork avant-gardiste tour à tour “futuriste mais folk, intellectuel mais tribal”, et décrit sa propre musique comme le ““Dark Side of the Moon” de la nouvelle génération death metal”. Description alléchante qui se fonde bien évidemment sur un mensonge: s'il suffisait d'aligner les distorsions, les samples déroutants et les couplets de chant sous antalgiques pour faire un nouveau “Dark Side of the Moon”, Ewigkeit n'aurait plus qu'à prendre un ticket et à attendre son tour... “Radio Ixtlan”, qui n'en est pas moins un album intéressant, mériterait une publicité plus à sa mesure pour éviter les déceptions.
Le truc c'est qu'à la base, les digressions polyculturelles aléatoires d'Ewigkeit sont en souffrance de justification. Concrétement il ne semble y avoir aucune raison pour qu'une chanson débute par des chants incantatoires indiens, qu'une autre mixe à la volée slides galactiques, sample de discours martial, synthé typé Summoning et refrain oriental déclamé par une gorge féminine sans visage, etc. Aucune raison, sauf si... “Radio Ixtlan” était conçu, comme son nom l'indique, à la façon d'une radio universelle dont chaque morceau illustrerait une fréquence. En d'autres termes l'album est une expédition impulsive aux quatre coins de la planète par le truchement d'une simulation de grandes ondes, dont la caractéristique est de ne jamais repasser deux fois par le même méridien. Théorie confirmée par le fait que les secondes de blanc entre les plages soient comblées par le son d'un tuner manuel que l'on ajuste à la recherche du programme suivant. Certains diront que c'est un moyen discutable de couvrir l'incohérence syncrétique des cultures abordées, mais il ne faut pas perdre de vue que la vertu première d'Ewigkeit et de son mystérieux autodidacte Mr Fog (prénom Phileas?) est de balancer des compos accrocheuses qui respirent par les guitares avant de revêtir des couleurs locales. Et en parlant de guitares, elles ne sont pas tenues par un manche. On pense à la touche désabusée d'un Katatonia allégé sur les morceaux les plus “rockisants”, tandis que les territoires conquis par des récifs de percussions complexes font davantage appel à un riffing saccadé, souvent lâché en décalage avec le click pour un effet ethno appuyé. Pour faire bref et explicite, les arrangements sont solides, l'exécution parfaitement en place, les atmosphères convaincantes quoique forcément trop concises tant on switche vite d'un décor à l'autre.
“Radio Ixtlan” n'est donc certes pas l'icone d'une “nouvelle génération death metal” (pourquoi “death” metal d'ailleurs? Il n'y a pratiquement pas de vocaux hurlés), mais un petit laboratoire agencé de façon méthodique et très personnelle, qui devrait intriguer les moins rabat-joie des amateurs de psyché-rock 70's et les gens du mélange de tous horizons. Derrière la naïveté de certaines parties et un aspect global un peu trop lyophilisé, Ewigkeit propose de nombreux exemples alternatifs de ce qu'on peut faire aujourd'hui avec du matériel et des idées. C'est déjà pas mal.
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Le truc c'est qu'à la base, les digressions polyculturelles aléatoires d'Ewigkeit sont en souffrance de justification. Concrétement il ne semble y avoir aucune raison pour qu'une chanson débute par des chants incantatoires indiens, qu'une autre mixe à la volée slides galactiques, sample de discours martial, synthé typé Summoning et refrain oriental déclamé par une gorge féminine sans visage, etc. Aucune raison, sauf si... “Radio Ixtlan” était conçu, comme son nom l'indique, à la façon d'une radio universelle dont chaque morceau illustrerait une fréquence. En d'autres termes l'album est une expédition impulsive aux quatre coins de la planète par le truchement d'une simulation de grandes ondes, dont la caractéristique est de ne jamais repasser deux fois par le même méridien. Théorie confirmée par le fait que les secondes de blanc entre les plages soient comblées par le son d'un tuner manuel que l'on ajuste à la recherche du programme suivant. Certains diront que c'est un moyen discutable de couvrir l'incohérence syncrétique des cultures abordées, mais il ne faut pas perdre de vue que la vertu première d'Ewigkeit et de son mystérieux autodidacte Mr Fog (prénom Phileas?) est de balancer des compos accrocheuses qui respirent par les guitares avant de revêtir des couleurs locales. Et en parlant de guitares, elles ne sont pas tenues par un manche. On pense à la touche désabusée d'un Katatonia allégé sur les morceaux les plus “rockisants”, tandis que les territoires conquis par des récifs de percussions complexes font davantage appel à un riffing saccadé, souvent lâché en décalage avec le click pour un effet ethno appuyé. Pour faire bref et explicite, les arrangements sont solides, l'exécution parfaitement en place, les atmosphères convaincantes quoique forcément trop concises tant on switche vite d'un décor à l'autre.
“Radio Ixtlan” n'est donc certes pas l'icone d'une “nouvelle génération death metal” (pourquoi “death” metal d'ailleurs? Il n'y a pratiquement pas de vocaux hurlés), mais un petit laboratoire agencé de façon méthodique et très personnelle, qui devrait intriguer les moins rabat-joie des amateurs de psyché-rock 70's et les gens du mélange de tous horizons. Derrière la naïveté de certaines parties et un aspect global un peu trop lyophilisé, Ewigkeit propose de nombreux exemples alternatifs de ce qu'on peut faire aujourd'hui avec du matériel et des idées. C'est déjà pas mal.
Rédigé par : Uriel | 13/20 | Nb de lectures : 8773