Bon, pour commencer, on va faire une mise au point, histoire qu'il y ait pas de malentendus. Jamais, au grand jamais, même au plus fort de ma jeunesse néo-baggy-representanowherefamilia, je n'avais vraiment pu piffrer Eths. Et c'était pas faute d'avoir essayé. Si la seule originalité clamée par beaucoup était d'avoir une fille au chant, c'était foiré de mon côté, la voix de Candice, aussi maîtrisée puisse-t-elle, m'a toujours laissé de marbre, voire rebuté. Et niveau musical c'était... banal, tout simplement. Rajoute à cela des textes wahou-trop-morbide et un univers qui attire autant les gothopoufiasses "je me scarifie parce qu'on a encore eu des petits pois à la cantine" qu'un Big Mac dans un village soudanais et tu visualises un peu tout le dédain que je pouvais porter au groupe.

Et puis, il y a quelques semaines, un extrait du présent album, NaOCL en l'occurence, est mis en ligne sur myspace. Je n'attendais absolument rien de leur part, hormis la possibilité de les descendre une fois de plus, mais ma curiosité maladive m'oblige à poser une oreille. "Tiens donc, c'est pas aussi mauvais que d'habitude..." Non, cela ne peut, je ne peux me fourvoyer... Allez, on va aller vérifier si les cages à miel sont bien décrassées et on y retourne. "Bah merde, en fait c'est pas mal, il est même bon ce titre..." Bon allez, je vais quand même pas aller voir un ORL, je me résigne à le dire: ça bute. Voui, sur le coup ça m'a fait mal au cul.

Car en plus, l'album des Marseillais ne s'annonçait pas sous les meilleurs auspices. Roswell et Guillaume, respectivement bassiste et batteur, quittent le groupe suite à des problèmes internes, en pleine composition de l'album. Pour le reste de l'album, les trois survivants font appel aux collègues du collectif Coriace en les personnes de Daniel de Tripod et Donat de Fis(ch)er pour la basse, et Pierre de Lofofora pour la batterie. Sans section rythmique stable, on ne donnait pas cher de la solidité et la cohérence de l'album.

Et pourtant, il n'en est rien. Eths a changé, et dans le bon sens. Il y a vraiment eu un renouveau, les compos sont d'une richesse stupéfiante, beaucoup plus travaillées et arrangées que par le passé. La voilà la différence. Les riffs, qui ne m'avaient jamais marqué, m'ont sévèrement latté la gueule, phénomène amplifié par le fait que je ne m'y attendais pas. Et quelle variété! Exit les plans néos jumpy-jump, ça rigole plus: gros plans death, riffs plus stoner-rock, mélodies sournoises... Il y a vraiment quelque chose de très fort, d'étouffant qui se dégage des guitares. Le jeu de batterie est dévastateur, la double te ratatine la ganache (mange l'intro d'Ondine et on en reparle) et témoigne d'un très gros travail de composition, alors que j'aurais misé sur du poum/tchak de dépannage. Candice a encore progressé au chant, son timbre hurlé n'est plus irritant comme il a pu l'être à mes oreilles, ses parties growlées sont monstrueuses et les parties en voix claire sont superbes. Les passages où elle superpose ses lignes de chant sont tout bonnement magnifiques (Ondine encore!). Par contre, j'accrocherai toujours aussi peu au contenu des textes, même si force m'est de reconnaitre que la plume qui les a pondus est bien foutue.

Une putain d'ambiance malsaine se dégage de cette galette, bien plus qu'à l'accoutumée, en grande partie grâce aux samples et à l'incorporation de quelques instruments, très intelligemment utilisées. Pianos freakys, nappes de claviers, orgues glauques voire titre totalement électro-indus (l'interlude Rythmique de la bête, une réussite). La prod' a bien participé à la mise en place de l'ambiance, à la fois puissante, crade et étouffante. Le premier tiers de l'album justifiera à lui seul l'acquisition de "Tératologie", de par sa brutalité (pour du Eths hein, vous attendez pas à du Last Days of Humanity), alors que le dernier tiers se fera beaucoup plus lent et maladif, mais aussi un peu longuet.

Je me serais fait une joie de lapider ce disque à grands coups de chamallows, mais vu la qualité de ce dernier ce serait être d'une mauvaise foi sans commune mesure. L'artwork, à en démaquiller Brigitte Bardot, est mignon comme tout (où qu'il est Jeannot Lapin?) et les autres visuels trop choubidous eux aussi sont disponibles sur leur myspace. Eths a vraiment franchi un pallier avec ce "Tératologie" et j'encourage tous ceux qui ont pu cracher sur eux à leur donner une dernière chance. Même si tout le monde ne sera pas convaincu, je suis certain que beaucoup d'entre vous reverront leur jugement à la hausse voire revirerons totalement leur cuti, et pas seulement pour pouvoir se frotter à de la poufiasse maquillée à la truelle en live. A noter qu'ils viennent de stabiliser leur line-up, avec Geoffrey (ex-Keishah) à la basse et Matt de My Ruin derrière les fûts. Marrant, ce sont les sosies capillaires des anciens... Bref, retenez qu'Eths, avec ce "Tératologie", n'usurpe plus (à mes yeux) son statut de gros groupe français. Handclaps.


Rédigé par : Crown_me | 16/20 | Nb de lectures : 14278