Si vous demandez à un artiste quel est le but qu’il se fixe en créant une œuvre, il vous répondra à coup sûr que son intention est de faire réagir les personnes qui seront mises en présence de celle ci. Alors si on s’en tient uniquement à cette définition, Eros necropsique est bien un artiste et cet album est une œuvre à part entière parce que depuis sa sortie il a fait réagir beaucoup de monde. Le problème c’est que les réactions engendrées par l’écoute de «Crises de lucidité» ne sont peut être pas celles souhaitées à la base.
Je ne vous le cache pas, je ne fais pas parti de ceux qui vont crier au génie (faut pas pousser quand même), je ne vais non plus me tordre de rire comme certaines personnes ou partir dans un démontage en règle, d’autres l’on déjà fait. Le fait est que je ne comprends pas très bien la démarche du groupe et que par conséquent je suis complètement hermétique à leur musique. Une chose est sûre il existe chez Eros necropsique un besoin de provocation évident que l’on va retrouver dans les paroles. Prenons pour exemple celles du nécrophile (plus ridicules que provocantes à mon sens): je suis nécrophile/je suis magicien/j’insuffle la vie/dans le corps des morts; gardons quand même à l’esprit que n’importe quel groupe de grindcoreux charcutiers de l’extrême a pondu des choses bien plus ridicules, mais eux ne se prennent pas au sérieux (j'espère). C’est bien dommage de toucher le fond au niveau textuel, surtout juste après un titre comme la fable du lisier qui propose quelque chose d’un tout autre niveau. Mais pour mieux comprendre les paroles un peu d’histoire est nécessaire. En 1998 un morceau bafouant la religion chrétienne présent sur le sampler d’un magazine avait déchaîné les foudres d’un parti politique (celui qui est socialement à gauche, économiquement à droite et nationalement de France) et avait conduit le dit magazine devant les tribunaux (quant on pense à ce que les groupes de black racontent). Cinq ans plus tard, Eros necropsique règle les comptes d’une façon assez poétique:
Oyez ci braves gens la complainte lointaine/de deux petits canards chantant la liberté/qui furent crucifiés au nom de puritaines/convictions qui voilaient d’extrémistes fiertés
Il était en effet une communauté/de cochons qui vivaient reclus en un domaine./ils avaient pour discours un flot d’absurdités/et pour idole un borgne qui suait la haine.
Je n’en dit pas plus mais vous invite à lire la suite. Si tous les textes avaient été aussi soignés, nul doute que l'appréciation générale de l'album aurait été différente.
Après les paroles, une autre caractéristique du groupe est la façon dont elles sont déclamées. Olivier, le chanteur, souffre du syndrome «king diamond»: on adore ou on déteste, pas de juste milieu! A l’image du king, et c’est un bon point pour eux, ce type de chant est assez unique, après ce n’est qu’une histoire de goûts personnels. Me concernant, autant les cris de chauve souris du king m'envoûtent autant les litanies de ce moine sous acide me martyrisent les oreilles. J'ai beau essayer, il n'y a rien à faire, je ne peux m'empêcher de penser à un moine hérétique en train de s'époumoner.
Au niveau purement musical, il s'agit toujours de dark poético gothic ambient ou quelque chose d'approchant. Les morceaux sont essentiellement axés autour des lignes de chant, des nappes de synthés et d'un riff de guitare, le tout dans un dépouillement certain. Le groupe semble avoir du mal à faire la différence entre simple et simpliste. Il me semble que les arrangements sont plus «travaillés» que par le passé mais on ne m'enlèvera pas l'idée que c'est quand même de l'ultra light au niveau composition. Forcément les détracteurs y verront une pauvreté d'inspiration; les défenseurs, eux, y verront des lignes épurées. Quoi qu'il en soit, répéter un riff indéfiniment a ses limites, la lassitude s'installe rapidement et force l'auditeur à zapper (surtout quand le son de la guitare est assez brouillon). Pourtant lorsque des groupes d'ultra doom jouent à ce petit jeu j'arrive à accrocher, ce doit être une question d'ambiances et d'émotions dégagées et le problème est là : désolé pour les fans, mais pour moi la musique d'Eros Necropsique me fait ressentir tout au plus un sentiment d'ennui profond.
Bref, il s'agit là d'un album (et d'un groupe) non conforme qui juste pour ce côté marginal mérite d'être écouté au moins une fois, histoire de ne pas mourir idiot. A qui cet album s'adresse t'il ? Bonne question, le mieux c'est encore de laisser la parole aux fans dans les commentaires. Concernant la notation je veux bien être large et proposer une fourchette conséquente: quelque part entre 2 et 18 pour les plus extrêmes d'entre nous. Moi je mets un 6/20, une chanson de bien sur l'album ce n'est pas suffisant.


Rédigé par : dark tranquilou | 6/20 | Nb de lectures : 10617