On connaissait surtout le catalogue de Metallian Editions pour la collection de samplers qui ont fait les heures de gloire du mag' et permis à nos oreilles d'adolescents échevelés de découvrir le meilleur (Golden Dawn) comme le pire (Vondur) de la scène extrême au milieu des années 90. Aujourd'hui l'aventure prend un nouveau tournant avec la sortie du MECDP01 augurant -pourquoi pas- la naissance d'un grand label pour les années à venir. Ce code anodin connaîtra-t-il la même renommée que le célèbre MOSH00 ornant la tranche de bon nombre des cds cramoisis de notre discothèque? C'est tout le mal que je leur souhaite.

Et c'est plutôt bien parti avec la signature des Grenoblois d'Ellipsis qui ne sont pas à proprement parler des bleus vu que « The grace decapitated » constitue leur quatrième album. Un album qui arrive à point nommé pour rebondir sur le débat agitant les pages du forum, je parle bien entendu de la fébrilité présumée du metôl, : ça sent le sapin ou pas, ça tourne en rond ou bien et autres Ah ma bonne dame c'était mieux dans le temps. A titre personnel je trouve que le bébé se porte à merveille, une conviction renforcée par le sentiment qu'une vie entière ne suffirait pas pour sonder les possibilités d'un genre qui s'ouvre progressivement à toutes les mouvances des musiques actuelles et dont la nature se révèle bien supérieure à la somme de toutes ses composantes. Une définition qui s'applique également à la musique de Ellipsis dont la structure en poupée russe propose une aventure au moins aussi exigeante qu'excitante (du moins si la perspective de regarder sous les jupes des Matriochkas vous émoustille).

Passons sur l'appellation « psycho metal » qui n'est à mon sens qu'une campagne promo un brin abusive et sur la charte graphique de la cover qui me laisse perplexe, il n'y a rien d'autre à jeter. Croyez-moi, pour qu'un album arrive à me faire danser en peignoir de bain et me lancer dans un grand numéro de air guitar avec un balai il doit pas être mauvais. Ce n'est pas que je sois particulièrement extraverti -ce serait même plutôt l'inverse- mais la musique d'Ellipsis est traversée d'un souffle libérateur, à l'image de compos qu'on devine affranchies des contraintes inhérentes à un marché encourageant la frilosité artistique.

Souverains dans leur démarche donc ; buissonniers également, toujours prompts à surprendre quand on croit avoir anticipé la couleur d'un titre. Pour autant toute la famille devrait y trouver son bonheur : pas mal de riffs oscillant entre heavy et thrash, des break fameux dans la tradition prog', quelques titres à la tonalité carrément rock -on flirte avec Alice in chains ou Soundgarden- et beaucoup d'ambiances plongeant subitement dans l'obscurité poisseuse du dark metal. Détail notable, il semblerait que le groupe ait beaucoup gagné en purgeant sa musique des parties au clavier, l'identité sonore s'en retrouve affinée et le résultat final bien plus efficace. Enfin ce chant d'une singularité renversante, où les textures éraillées typées black se mêlent au groove de la pop et la pureté du heavy, ce type est un bosseur amigos! Pour émettre un bémol malgré tout, j'aurais peut être accordé à la production un mix un peu moins massif afin de souligner la filiation rock ; il faut dire que les compos sont en elles mêmes suffisamment dynamiques pour économiser sur le gras des guitares.

Au-delà de la charge émotionnelle dégagée par l'album et de la puissance d'impact des morceaux j'ai envie de retenir la créativité jouissive qui baigne l'ensemble. Tant que ce genre d'album émergera de la scène metal, fut-elle en proie au doute, je ne me ferais pas le moindre souci quant à sa pérennité. De toutes façons, ça ne me concerne pas, il y a de fortes chances pour que mon système auditif ait rendu l'âme bien avant les premiers signes de déclin.


Rédigé par : #Guillaume# | 17/20 | Nb de lectures : 13563