Qui a écrabouillé le Hellfest 2009 ? Toutes les têtes dodelinantes, les yeux mi-clos, les sourires béats et admiratifs devant la déferlante Electric Wizard. Regards tournés vers la jolie Liz ou le charismatique Justin, les fumées rigolotes s’évaporant dans les airs du chapiteau. Ce concert restera une claque, de ceux dont on se souvient et cite en exemple à ceux qui parlent métal à longueur de temps mais ont toujours une excuse pour ne pas être au Hellfest.

Electric Wizard nous revient 3 ans après le très bon "Witchcult Today". Comme à chaque fois, les 4 de Dorset nous offrent du doom… mais pas seulement. Le son n’est plus aussi underground qu’à leurs débuts, mais ça on le sait tous, et on en attend autre chose. Le cru 2010 est donc un doom aux relents rock, avec ce son rétro (la cover annonce déjà la couleur), 70’s, toujours grésillant. L’évolution vers le gentil côté de la force se poursuit, alors que beaucoup souhaite un retour au malsain et crade. Guitares à la technique inexistante, mais ô combien groovy avec ces riffs interminables ancrés dans la mémoire dès la première écoute. Ces grattes entêtantes qui vagabondent peuvent ne pas satisfaire les fans de la première heure, sauf qu’elles sont tout simplement excellentes. Chaque titre ayant son riff de tueur, qui impressionne et hypnotise par sa simplicité et son impact archi jouissif. Riffs simples donc, tourbillonnants, fait de fuzz, distorsions et autres… que même le bassiste pourrait jouer. La basse justement et la batterie sont assez effacées, vraiment en retrait. Beaucoup d’effets judicieux aussi sont insérés ici et là. Justin Osborne et sa voix claire, lointaine, entonne des paroles éculées, presque débiles, mais son timbre, son charisme, et ce mix en retrait te rendent marteau et possédé. La prod’ volontairement étouffée manque d’impact, mais accentue le côté vieillot. Ces nouveaux morceaux sont comme les précédents, des ballades faites d’hallucinations sonores, avec une forte aura mystique et noire.
"Black Masses" n’est pas difficile d’accès, il m’a scotché dès la première écoute. Mais ce feeling, catchy sans l’être, est bizarrement atmosphérique presque, totalement psychédélique.

Quand je passe ce disque en société, je demande quasiment aux gens de se taire lors du riff d’intro de "Scorpio Curse", le refrain de "The Nightchild", les interminables plaintes sur "Black Mass", la guitare haut perchée sur "Venus in furs"… Je pourrais faire étalage pendant longtemps car il est bourré de pépites. Quelques titres te tirent presque la larme tellement c’est beau.

Plutôt que de s’entêter dans un style et perdre de son excellence (comme beaucoup de groupes en mode tout schuss sans réfléchir), les 4 de Dorset évoluent et proposent toujours une version différente de leur vision du métal. Ils ne font ni plus ni moins que du EW, et tiennent leur rang de maîtres du style, comme d’hab. L’évolution qu’ils ont choisie peut ne pas plaire, certes, mais reconnaître la qualité de leur discographie est juste la marque de ceux qui aiment le doom, et plus généralement la musique. Chaque album a son univers, sans redite et sans empiéter sur le précédent. Ces 8 titres ne dérogent pas à la règle.

2010 a enfanté de 3 joyaux du genre : Ramesses, The Wounded Kings et ce nouveau Electric Wizard. Cette remarque ne tient qu’à moi bien entendu, et ce podium, mon trio doom tout du moins, n’a pas d’ordre, mais celui qui osera poser une oreille sur cette petite merveille qu’est "Black Masses" ne devrait pas être déçu.

Adhérer à cet album, c’est laisser un grand groupe s’exprimer, et jouir de ce qu’il a à proposer. Cette galette est indispensable dans la discographie du combo puisqu’une fois n’est pas coutume, Electric Wizard frappe très fort et marque les esprits. Un des albums essentiels de cette année.


Rédigé par : Bras Cassé | 16.5/20 | Nb de lectures : 14859