A l’heure où SEPULTURA creuse un peu plus sa tombe à chaque disque et où seul SOULFLY semble à même de proposer un neo thrash tribal honnête, la persévérance d’EKTOMORF pourrait finir par payer. Septième disque des hongrois et troisième de l’ère Nuclear Blast (sans compter le live sorti l’an dernier), «Outast » suit exactement la même recette que ses grands frères et que ses cousins brésiliens, inventeurs de ce savant dosage de riffs gras et groovy, de basse ronronnante, de patterns de batterie tribaux et de musique ethnique.

Sur la forme, difficile de prendre EKTOMORF en défaut tant le mimétisme avec SOULFLY est parfait, jusqu’aux vocaux et aux paroles voire aux titres des chansons (« I Choke », « I’m Against », « Outcast »)! Même un fan absolu de m’sieur Cavalera s’y tromperait. Encore faut-il aimer SOULFLY me direz-vous. Certes. Alors que ceux qui ne sont pas dans ce cas et que le petit bonhomme aux dreads de couleur et aux maillots de foot débecte, sortent de la pièce et aillent faire un tour dans les autres chros, ce qui suit risque de vous ennuyer… Je reprends : l’album est varié tant dans les tempos que dans les atmosphères et les passages world, comme l’outro « Chamunda », façon RAJNA, qui incite à la méditation après plus de trente-cinq minutes d’agression sonore. Quelques morceaux sortent immédiatement du lot : « Ambush In The Night », thrash tribal rapide qui incite au headbanging, « Who Can I Trust », prière acoustique rappelant les heures de gloire de SEPULTURA (« Kaiwoas »), « Fuel My Fire » et ses interventions de clavier-klaxon à la RAMMSTEIN sur le refrain…

Pas facile de résister au balancement autistique qui ne manquera pas de s’emparer de vous, voire au sautillement épileptique pour les plus sensibles ! Si « Outcast » était sorti il y a six ans, il serait probablement passé inaperçu, noyé dans la masse des groupes plus ou moins opportunistes qui se sont jetés à la suite de KORN et SEPULTURA. Mais nous sommes en 2006 et les Roumains se retrouvent quasiment seuls maintenant, les albums du style se comptant sur les doigts de la main, ce qui donne presque à « Outcast » un parfum de nouveauté ! EKTOMORF est resté imperméable au metalcore, aux refrains désenchantés à la finlandaise, aux rythmiques de brutes du thrash/deathcore, et il faut avouer que c’est quand même bien bon ! Pas toujours d’une inspiration transcendante, mais d’une efficacité redoutable dès qu’il s’agit de faire bouger nos petits culs de hardos.

Reste le problème du fond : « Outcast » est agressif, vivant, explosif, parfois même tripant, doté d’un très gros son (merci à Tue Madsen (DAGOBA, ABORTED, ILLDISPOSED), dont le travail des basses est encore une fois magistral), mais il n’a aucune personnalité et n’est, comme les précédents albums d’EKTOMORF, qu’une excellente copie de SOULFLY. Pourtant, je le dis souvent dans mes chroniques, tant que les chansons sont bonnes, pourquoi se focaliser sur les influences d’un groupe ? Dans le cas d’EKTOMORF on ne peut cependant plus parler de source d’inspiration mais bien de reproduction à l’identique et c’est cela qui dérange un peu, parce que la valeur d’un album tient aussi à ce que ses compositeurs ont mis d’eux à l’intérieur. C’est ce qui freine mon enthousiasme et qui, je le crains, empêchera EKTOMORF d’atteindre le statut qu’il pourrait espérer atteindre s’il tentait quelque chose de plus personnel, même si, d’un autre côté, ils gagneront certainement (si ce n’est déjà fait) une estime méritée auprès des puristes.


Rédigé par : Dungorpat | 13,5/20 | Nb de lectures : 13169