Parmi les formations Indus des années 2000, je voyais les Teutons d'Eisbrecher comme un groupe sympathique mais pas forcément le plus original ou le plus personnel. La sortie de "Sünde", 3ème opus du groupe m'inspirait un bon moment, mais pas un voyage transcendant et expérimental. Une petite heure sèche, métallique, mais pas forcément beaucoup plus.
J'admets qu'outre-Rhin, quand on décide de se lancer en avant, certains s'en sortent bien. D'autres mieux. Eisbrecher est dans le second tableau.

Nettement plus distant de leurs influences à la KMFDM et autres piliers allemands, "Sünde" est un album efficace et offensif. Les premières minutes ne laissent pas vraiment présager d'une grande évolution, et pourtant... La bande d'Alexx part nettement plus loin dans les différents courants industriels. On retrouve de manière générale la teneur des premiers disques du groupe, comprenez le chant à effet très mis en avant, des instruments assez minimalistes et des beats et effets omniprésents. Seulement, ce CD ne s'y limite pas. Sautant de morceaux secs, lourds et jouant sur le clivage pauvre/grandiloquent, en un mot assez typiques, à des expérimentations surprenantes, parfois planantes – comme "Herzdieb", un morceau entièrement tenu au duo clavier ambiant, limite atmo/synthpop, et voix rythmant, martelant et conduisant le reste des instruments pour un rendu léger et délicieux – ou carrément EBM – avec un "Heilig", morceau à part, efficacement taillé pour les dancefloors –, cet album varié témoigne de l'ouverture massive, et réussie, des horizons du quintet. Le travail des compos est soigné, les effets sont bien pensés et l'utilisation de plusieurs registres dans les différents morceaux réussit à créer un atmosphère particulière à chacun d'eux.

Il en est d'ailleurs difficile, à la première écoute, de trouver une véritable unité dans cet album. Les pistes nous promènent d'un bout à l'autre de l'electro/indus rock et metal. Seulement, en prêtant une véritable attention à l'ensemble, l'auditeur, ou du moins moi, réalise que ces jeux de sons, de mix et de variations convergent. Il n'y a pas de totale unité, mais bien des variations, un jeu sur plusieurs niveaux, une marque de qualité dans le genre.
Ajouté à cela une production très soignée, peut-être parfois un peu trop propre pour les moments les plus sévères, qui sert à merveille les cotés dramatique de cette galettes, et vous voilà en présence de "Sünde" (« péché » chez Molière), un album riche et complet. On s'en laisse convaincre, par la mise en scène des thèmes, que chaque élément illustre une facette de ces péchés...

Si vous aimez les beats, la richesse et la langue de Goethe, c'est par-là que ça bouge !


Rédigé par : Aneria | 16/20 | Nb de lectures : 11328