Le timing est presque trop beau, presque trop parfait. A l’heure où la grippe dite porcine plonge le monde dans la psychose la plus irrationnelle, le groupe le plus ultra-militant de la scène hardcore revient frapper à nos portes. Earth Crisis is back. Ils nous avaient pourtant prévenus, fallait pas déconner avec Mère Nature et ses rejetons, de quelques espèces qu’ils soient. Voilà ce qui arrive quand on écoute pas ceux qui savent.

Earth Crisis est de retour et avant de passer à la suite, je dois dire que ça fait sacrément plaisir. Bon on va tailler des pipes plus longtemps, j’adore Earth Crisis tant sur le discours que sur la musique et c’est pas avec cet album que ça va changer. Non ExC n’a pas vraiment changé, juste un peu évolué. Influencé par leur expérience commune dans Freya, on retrouve un peu du son de celui-ci dans "To The Death", on peut même y distinguer, légèrement saupoudré par endroit, en filigrane, une petite touche de Path Of Resistance sur certains refrains ou chœurs, mais malgré ça, rien de neuf sous le soleil. D’ailleurs il ne faut attendre que 2 minutes et 17 secondes pour entendre le terme « Straight edge » susurré par la douce, suave et mélodieuse voix de Karl. En même temps, on voulait qu’ExC reviennent faire du ExC et pas autre chose. Karl ne s’est pas subitement transformé en Mike Patton, Dennis Merrick ne s’est pas mis au free jazz, le duo de six-cordistes Scott Crouse, Erick Edwards ne se sont pas lancés dans l’étude approfondie du luth à 12 cordes et Bulldog ne s’est pas renommé Caniche.

Les hommes sont restés les mêmes, les thématiques abordées aussi : le végétalisme, les vertus du straightedgisme, la technologisation du monde, les méfaits de la drogues et bien sûr l’exploitation et l’industrialisation de la vie humaine mais surtout animale. Les opinions du groupe sont toujours aussi tranchées et sans équivoques que par le passé. « Violent drug gangs are terrorists. Track the chaos to it’s source ». Voilà qui ne demande pas d’autres explications.

Les hommes sont les mêmes, les thématiques sont les mêmes mais qu’en est-il de la musique ? Eh bien grosso modo on a droit à du Earth Crisis pur jus mais avec par-ci par-là, une petite innovation. Au niveau du mix déjà, le son, en partie signé Tue Madsen, est moins massif, moins dense. L’impression de se faire couler une dalle de béton dans les tympans s’est atténuée et laisse place à un son plus chaud presqu’organique. J’aurais envie de dire que ExC sonne presque comme un groupe de hardcore cette fois-ci, impression renforcée par la voix Karl, plus scandée, plus vindicative que par le passé mais qui, de fait, perd en monolithisme et en puissance brute. A l’image du T-800 dans Terminator II, le cyborg s’est humanisé ce qui rend la musique plus vivante. L’album s’ouvre sur les deux titres dévoilé en avant-première par le groupe, à savoir « Against The Current » et « To Ashes ». « Against The Current » s’avère sacrément groovy avec cette influence de Freya sur le riff principal du morceau, très dansant et rehaussé par une basse hyper claquante, une constante qu’on retrouve sur tout l’album d’ailleurs. Le titre se termine par un passage tout en chœur dévastateur « Keep my head above the surface. Straight edge against the current! » Un titre qui va rapidement trouver sa place en live et qui va faire pas mal de dégâts. Un des titres les plus hardcore du disque. « To Ashes » est un morceau typiquement ExC dans sa construction, bâti sur un riff tout droit sorti de Destroy The Machines. Parmi les autres compos je retiendrai aussi « When Slaves Revolt », son riff de plomb, son refrain impeccable et son mini solo, « What Horrifies», un morceau tout en lourdeur et un « To The Death » destructeur qui clôt les hostilités. Pour moi, le meilleur titre de l’album.

Voilà, on peut dire que le retour est réussi puisqu’on retrouve en pleine forme le groupe qu’on avait quitté huit ans plus tôt. La recette est la même, riffs d’influence slayerienne, matraquage rythmique et militantisme SxE mais avec quelques petites nouveautés disséminées tout au long de l’album. Alors bien sûr, le son a un peu changé, donc l’identité du groupe s’en trouve altérée, c’est vrai, mais ce que le combo perd en lourdeur et en densité, il le gagne en hargne et en rage. Les parpaings dans la gueule ont été remplacés par des cocktails molotovs. L’ensemble est plus hardcore et moins métal, plus direct aussi, la plupart des titres restent en tête pendant un bon moment et le skeud dépasse à peine la demi-heure. Un léger changement dans la continuité en gros mais « To The Death » reste fidèle aux dogmes du groupes et ne tardera à se trouver une place de choix, aux côtés de « Gomorrahs Season’s End » et « Firestorm » dans la discographie des Syracusiens. Que la nation straight edge se rassure, le roi est de retour et plus prompt que jamais à défendre les siens.


Rédigé par : Seb On Fire | 18/20 | Nb de lectures : 13551