Formé en 2006 dans la quiétude d’une petite bourgade hollandaise, DR DOOM est un projet regroupant en son sein d’anciens ou actuels membres d’ABORTED, DODECAHEDRON et ATROCITY.
Exutoire extrême sans prétention ? Ou véritable canal parallèle d’expression d’une passion ? En tout cas, ce projet parallèle, année après année, tournées après tournées, a acquis de plus en plus d’importance, tant dans la tête de ses géniteurs que dans celles du nombre grandissant de fans.

On ne peut être dévoué à une musique aussi extrême et authentique que le grind, sans un minimum d’implication et de sincérité.
Tout musicien jouant du Grind (et dérivé) ne peut décemment pas faire semblant, l’absence d’artifices et d’accompagnements musicaux en tout genre opérant comme une absence de masque et de costume pour un acteur.
Seule l’énergie réellement délivrée transparaît alors, le groupe se trouvant obligé, par la force des choses, de faire face à lui-même, sans autre possibilité que de se livrer corps et âme. Sans pouvoir dissimuler ni fausser les sentiments. C’est ce qui fait entre autres toute la puissance et tout le charme du Grind.

DR DOOM est de ces groupes qui évoluent sur un fil mince, sans filet, au-dessus d’un précipice sans fond. Il avance à pas feutrés, exprimant un subtil équilibre entre impulsivité et contrôle de soi. Le résultat est ainsi lié, et on retrouve dans "Everyone Is Guilty" cet équilibre bancal, oscillant entre une furie salvatrice et une lourdeur trop réfléchie.
Le grind n’est pas fait pour être réfléchi, il doit venir des tripes et retranscrire des impulsions primaires. Le problème est que "Everyone Is Guilty" est par moments trop cérébral, et pas assez viscéral.

Je pense que les sentiments et la hargne exprimés sont sincères. J’ai en revanche l’impression que les gaillards n’ont pas totalement réussi à se détacher de leur fonctionnement habituel avec leurs autres groupes (passés ou présents), et qu’ils n’ont pu s’empêcher par moments de travailler et retravailler leurs compos ; mode de composition pas forcément adapté au Grind.
Car c’est aussi (surtout ?) en laissant sa fougue naturelle prendre le pas sur le cerveau qu’un groupe réussit à privilégier son authenticité/fougue viscérale à la réflexion.

C’est ce qui fait défaut par moments avec DR DOOM ; à qui, rétrospectivement, le format « EP » convenait bien mieux. Il en résulte un manque relatif d’impulsivité ; "Everyone Is Guilty" est un album certes défoulant et violent, mais un peu trop calculé, pas assez cru ou impulsif.
L’évolution musicale est franche, DR DOOM aime FUCK THE FACT, TRAP THEM et CONVERGE, et le fait savoir. Il a choisi de se réfugier dans l’expression d’un chaos sonore structuré, aux éclats d’extrémité et à la rugosité HardCore du style ‘Deathwish’.
L’album n’en reste pas moins plaisant et violent, révélant un GrindCore arraché et révolté. D’où suintent des passions musicales sincères, rappelant la talentueuse scène scandinave, GADGET, ROTTEN SOUND ou NASUM. Une valeur sûre.
Nombreux sont les ralentissements et les morceaux lourds, étirés et opaques. Un peu trop à mon goût. Mais fort heureusement ponctué par des morceaux courts et furieux.

J’aime la furie primaire des titres rapides. J’aime moins la lenteur lancinante des morceaux étirés. Par le passé, le groupe privilégiait l’impulsivité aux ralentissements ; il semble désormais s’être recentré sur une relative équité entre ses deux faces...
5 années après son premier (et excellent) EP, DR DOOM sort donc enfin son premier album. Qui satisfait, mais (me) laisse tout de même un goût d’inachevé en bouche. Qu’importe, ne boudons pas notre plaisir de passer une grosse demi-heure agréable et furibonde en compagnie de notre quartet allumé. Dont la violence canalisée devrait plaire aux fans de Grind tels que NASUM, NAPALM ou FUCK THE FACT.


Rédigé par : ..::Ju::.. | 14/20 | Nb de lectures : 12683