Bon alors, de quoi peut-on causer dans cette chronique qui n'ait pas déjà été étalé partout sur internet? Probablement de rien, tant le projet ukrainien est salué partout sur la toile. Et profitant de l'engouement quasi-général (fort mérité, à mon humble avis), Season of Mist, via son sous-label Underground Activists, aura eu la judicieuse idée de récupérer le bébé des bras de l'anglais Supernal. Pas fous, les Sudistes...

Elle pourrait être casse-gueule cette chronique, à vouloir latter du Slave à tour de bras tellement il est agaçant de les voir dans le "move", le même qui pousse DSO et Shining en tête des skyblogs. Ca serait défoulatoire, mais sincèrement pas fait pour les bonnes raisons. Un peu à l'image de la charge de la cavalerie légère de Metallian, qui aura soufflé son monde des mois avant que la concurrence ne puisse jeter une oreille à la galette. Toujours à la pointe de l'actu, Metallian a-t-il eu accès à des titres masterisés au tractopelle, à une cassette de Chantal Goya prise par erreur dans la disco personnelle de Roman Saenko ou à un promo CD avarié car léché par une brigade complète de facteurs tuberculeux? Les protagonistes s'en expliqueront peut-être un jour. En tout cas, je vous évacue illico les remarques sur le son de Microcosmos. La production est digne de la discographie du projet de Kharkov, ni plus ni moins. La batterie a même retrouvé sa place et son humilité, me semblant bien moins envahissante qu'à l'écoute d'Estrangement. Même dans les frappes les plus lentes, où le batteur se lâche sur la caisse claire (partie centrale de "Everything Unsaid Before", par exemple), rien ne m'a agressé comme sur l'album précédent. Non, le son me paraît tout à fait bon cette fois, avec des guitares saturant mielleusement dans les mediums, des frappes de peaux viriles et des hurlements toujours aussi rageurs. Le nombre des solos de guitare a même été réduit, pour me pousser encore plus vers le bonheur. Mais je vous rassure, il y en a encore pour parachever un riff de cinq minutes et ils se sont lâchés sur le début de "Everything Unsaid Before". Bref, rien à redire côté production pour ma part.

C'est plutôt du côté des riffs que je reste un peu sur ma faim. Il faut avouer que Drudkh a produit tellement énorme qu'il est difficile de ne pas en attendre beaucoup. Probablement trop. Si des titres portent une atmosphère de fin du monde glacée (avec un bâtonnet au milieu), ils n'effacent que bien trop aisément certains autres moments. Les deux premiers tiers de "Decadence" sont superbes, mais le blast qui suit et son lead donnent subitement une tournure bien trop joyeuse au bazar. De même, le démarrage de "Ars Poetica" est un poil trop youpi matin, heureusement contrebalancé par la seconde moitié du titre qui retrouve le terreux parfum d'une réelle descente dans les abysses. Drudkh souffle le mélancolique certes, mais son irrégularité produit une atmosphère bien moins funeste que sur un Blood in our Wells. Et c'est bien le principal reproche que je ferai à cet album, soufflant l'instant ténébreux comme le passage juste sympathique de la part de types qui ont déjà fait bien mieux.

Encore une fois, Drudkh propose de la bonne came, un black atmo racé aux accents slaves reconnaissables dès les premières secondes. Toujours une encablure devant la concurrence, le groupe voit toutefois se réduire l'avance qu'il a prise sur la meute qu'il a lui-même inspirée. Une coudée devant, les Ukrainiens n'en ont pas moins du mal à rivaliser avec leur discographie antérieure à leur album de folk miteux, jalon qui a peut-être marqué une remise en question au goût d'inachevé. Microcosmos ne s'avère petit que par l'ambition d'un groupe qui reste dans ce qu'il sait faire de mieux. Ils le font bien, et ça plaira encore. L'album s'avère moins abrupt et bancal qu'Estrangement, même si les suites d'accords en sont aussi moins intenses. Mais c'est le manque de surprises qui finit finalement par peser un peu chez un projet qui donne l'impression d'avoir déjà beaucoup dit. Les riffs sentent moins la mort imminente du voyageur agonisant, abandonné de tous, dans la forêt enneigée. Il faut dire qu'on a du mal à se sentir seul au monde avec des roubles qui arrivent directement d'Occident.




Rédigé par : Prince de Lu | 15,5/20 | Nb de lectures : 13467