Le voici le voilà, le tant attendu nouvel album de la bande à Anselmo, après 5 ans d'attente et de frustration, après un live épique à l'Elysée Montmartre en 2006 ainsi qu'une série d'une dizaine de dates Outre-Atlantique en ouverture notamment de Megadeth, Motörhead et Heaven & Hell. J'ai pu m'entretenir avec Jimmy Bower il y a quelques mois et il m'assurait : "que cet album serait sûrement à interdire aux moins de 18 ans tellement il serait adulte et mature, on perdra peut-être des fans, mais on fait la zik qu'on aime et si tu nous aimes alors tu nous suivras jusqu'en enfer". Des paroles à prendre très au sérieux quand on sait à quel point le groupe a été touché par la destruction massive de leur ville (la Nouvelle Orleans, pour les attardés qui nous rejoignent et qui ne connaissent pas encore la Dream Team) par l'ouragan Katrina.
C'est donc après un an de macération, depuis que Anselmo a rappelé ses petits camarades Pepper Keenan (Corrosion Of Conformity), papa Kirk Windstein (Crowbar), Rex Brown (Pantera) et tonton Bower (Eyehategod, Superjoint Ritual), que sort ce "III Over The Under", qui évidemment est le troisième album du groupe.

Un an, une éternité quand on sait que le "Down II: A Bustle in Your Hedgerow" a été composé et enregistré en seulement 28 jours !! Et le "DOWN III" est bien l'antagoniste du II dans la contenance et l'ambiance véhiculée, et c'est là la première surprise. Surprise, car il faut être sincère on s'attendait à un album ultra sombre non seulement à cause de la destruction de NOLA, mais aussi après la disparition de Dimebag (Anselmo et Brown ne s'étaient jamais exprimés musicalement sur le sujet depuis les faits) ainsi que des gros problèmes physiques d'Anselmo (blessure et opérations récurrentes du dos) avec une addiction profonde à certaines substances et médicaments qui lui vaudront un beau séjour en détox en début d'année (et non il n'est pas clean depuis 2002 comme dit dans Rolling Stone mag).
Et bien malgré tout cela, leur musique et message n'a jamais été autant positif ! Pepper Keenan déclarant que : "Ces dernières années n'ont pas été faciles pour tout le monde, mais qu'il fallait rester positif. Ce qui n'empêche pas d'écrire des chansons agressives, sur la frustrations engendrée par tout cela". Et de l'agressivité, le groupe n'en a jamais autant fourni !

"Down III" commence d'ailleurs sur une belle brochette de compos très Heavy (dans le sens Sabbathien du terme) et power stoner. "Three Suns and one Star" ouvre le bal de fort belle manière après une petite intro typique Down) , riffs pêchus et break de batterie qui pète la nuque, et là deuxième surprise...LA VOIX DE PHIL ANSELMO !!
Putain que son passage en désintox lui aura fait le plus grand bien. Bien sûr il garde toujours ce grain et cette voix éraillée, travaillée au bourbon et à la clope (il y a des clopes plus "vertes" aussi), mais il y a une maîtrise vocale qu'il n'a jamais eue avant (depuis les premiers Pantera en fait). Un timbre bluesy impeccable qui lui permet aussi de retaper dans les aigus qu'il avait oubliés depuis bien longtemps (on se souvient tous du massacre lors des lives de Superjoint Ritual). Suit la cabotine et southern metal "The Path" avec son riff bien lourd qui rampe. La puissante et très power "N.O.D" déverse ensuite une rythmique accrocheuse et se termine en apothéose sur en mid tempo ultra lourd soutenu par la voix métamorphosée de Anselmo. Cette chanson traitant en fait de l'addiction à l'héroïne, Nod faisant référence à la "nodding head", phénomène de dodelinement de la tête et de brève prise de conscience en intermittence avec le trip lui même une fois la dose injectée (on en apprend des choses dans cette kro hein!?). Puis arrive le "tube" annoncé de l'album "I Scream", avec "On March The Saints" qui lui succède. Etrangement ce sont les deux chansons qu'on a pu écouter quelques mois avant la sortie de l'album, la première en vidéo sur internet après que le groupe l'ait jouée en live, la deuxième sur les ondes radios de la Nouvelle Orléans bien avant les vacances d'été (on pouvait l'écouter à différents moments de la journée si on avait la fréquence radio et son lecteur winamp).
"I Scream" est bien sûr irrésistible avec la dualité vocale Anselmo/Keenan, son pont bien doom et son riff Downien (forcément). "On March the Saints" est la surprise bonux de l'album, la chanson la plus positive de DOWN. Écrite en hommage à toutes les personnes qui ont reconstruit la ville et qui l'ont aidée à se relever après l'ouragan, le morceaux vise en particulier l'équipe de foot US des Saints qui avait prêté leur stade aux sinistrés et avait soutenu la ville en continuant à jouer par la suite à domicile au lieu de se délocaliser (comme le voulaient certains actionnaires du club et promoteurs). Sur ces deux titres Anselmo est impérial dans le rôle du vocaliste transfiguré et renaissant (exit l'auto-destruction et les vieux demons).
Mon pti chouchou de la galette "Never Try" scinde ce disque en deux parties, la première étant très "renouveau, positive attitude, riff festif champomy qui fait du bien à la nuque", la deuxième étant plus bluesy, sombres et avec certaines prises de risques. "Never Try" est LA chanson blues et southern rock de "Down III", c'est aussi la réponse directe et opposé à "Learn From This Mistake" qui apparaissait sur "Down II" (elles ont même une position identique sur la track-list). Là où "Learn From This Mistake" nous entraînait dans les méandres de l'affliction et de la solitude, "Never Try" nous dit de nous relever et de marcher si on est pas une tarlouze. Le texte de Anselmo, très personnel, traitant de ses blessures dorsales, des moments frustrants qu'il a dû passer sur son lit et de son envie de se soigner. A noter les solis ultra raffinés typés blues du maître Pepper Keenan qui s'en donne à coeur-joie, prouvant par-là même son talent de compositeur (à la limite il n'avait pas besoin de le prouver, les précèdents albums de Down et COC le faisant pour lui). "Mourn" est le titre où Anselmo s'explique sur la confusion et la peine qu'il a eues lorsque sa présence à l'enterrement de son camarade Dimebag Darrell lui a été refusée. D'un point de vu musical "Mourn" est excellente, voix incroyable, solo heavy, gros riff comme seul papa Kirk sait en faire et une bonne batterie bien lourde de Bower (qui était jusqu'à lors le seul point plutôt palot).
La très bonne "Beneath the Tides", où l'on sent bien la patte corrosive de Keenan (elle n'aura pas dénoté sur "In The Arms Of God), et la planante/mystique "His Majesty The Desert" change encore un peu la direction de l'album, comme dit précédemment, vers une fin plus sombre et rageuse. "Pillamyd", "In the Thrall of it All" entièrement composé par Anselmo (à part les superbes solos bien sûr) et l'énorme "Nothing in Return (Walk Away)" concluent ce "DOWN III", qui s'avère bien moins accessible qu'il n'y paraît et qui va dérouter plus d'un fan de "NOLA" ou "A Bustle in Your Hedgerow".

Le seul point négatif que je relèverai c'est la timidité du jeu de Jim Bower ! Pour une fois il est plutôt en retrait et carrément effacé par rapport à ses camarades qui eux sont en forme olympique. Rex Brown est nettement plus impliqué que par le passé, ce qui l'aura sûrement décidé à réenregistrer les parties basse de Windstein sur "NOLA" pour la futur réédition de l'album. Windstein avait dépanné à l'époque, Todd Strange (Crowbar) devenant le bassiste sur les lives. Brown l'a remplacé par la suite quand il avait préféré arrêter la musique en 2000 pour se consacrer à sa vie de charpentier !! (Info people, le Todd a eu des problèmes en 2004 après avoir poussé son gosse contre un mur lui pétant quelques veines au cerveau...).

La version Digipack de l'album offre un titre en plus, titre INDISPENSABLE, pour moi l'un des meilleurs de DOWN. C'est aussi le plus malsain de l'album (très Sabbath, St Vitus), avec un riff maléfique et lourd doublé à la tierce, qui donne une mélodie lancinante qui imprime le cerveau.

DOWN fait du DOWN, mais en montrant une nouvelle facette qu'on ne leur soupçonnait pas, le groupe s'échappe un peu de leur sentier battu faisant un album plus "power" et bien moins torturé que par le passé. Un virage qui ne lâchera dans le fossé que le peu de monde qui ne jurait que par le cultissime "NOLA" et qui avait commencé à lâcher avec "DOWN II". Mais dans la vie on grandit, on devient plus mature et on espère la même chose de la part de l'auditeur... c'est sûrement ce qu'a voulu dire Bower dans le propos qu'il m'a tenu.

Personnellement, je les suis. Et vous ?


Rédigé par : Layne | 18/20 | Nb de lectures : 15974