Souvenez-vous des années 90... Oui, l'explosion du "grunge" d'accord, mais la scène indé française, et plus particulièrement l'émergence de la scène dite "noise" ça cause à certains d'entre vous? DRIVE BLIND? PORTOBELLO BONES? CONDENSE? (etc?) Il est vrai qu'aucun de ces groupes n'aura survécu à cette décennie faste, mais citons tout de même SLEEPPERS, TANTRUM (la suite de DRIVE BLIND) ou BASEMENT par exemple, comme perpétuateurs du son noise 90's "à la française"... et DOPPLER donc, dans un certaine mesure.
Car bien que plus jeunes que les "légendes" précitées, les Lyonnais de DOPPLER prêchent la bonne parole noise depuis une petite dizaine d'années, quelques EP, splits (dont l'un avec MARVIN), et nous présentent là leur second album: "ça va saturer, il faut que ça gueule" annonce le sample d'ouverture. Le credo est simple et limpide, et si l'héritage "french noise" est clair, il se trouve ici régénéré par l'incorporation bienvenue d'autres influences. D'abord avec des séquences clairement matheuses qui les rapprocherait des excellents (mais trop discrets) KEELHAUL, ou d'autres plus "lâchées" qui rappellent les tout aussi excellents (et trop vite disparus) CITY OF CATERPILLAR sur certaines montées mélodiques urgentes et tendues (émo?). Certes, la parenté avec SLEEPPERS est plus qu'évidente, mais là où l'ancien trio devenu quatuor tend vers plus de mélodie, DOPPLER explore des territoires nettement plus abrasifs tout au long des 7 titres pour presque 45 minutes de "Songs To Defy". Le trio déjà solide et captivant sur scène, comme en témoigne leur concert en compagnie de SLEEPPERS (encore!) à la Maroquinerie en janvier 2008, se montre d'une efficacité redoutable sur son dernier opus, épaulé en cela par une production irréprochable de Peter Deimel: les qualificatifs traditionellement accolés à la terminologie "noise" ne manquent pas, et les lister serait bien trop fastidieux en ce qui concerne DOPPLER tant le groupe excelle dans le style.
Il y a forcément quelque chose dans l'eau à Lyon (sans parler de la Lyonnaise haha), et force est de constater que cette ville s'est toujours montrée généreuse envers la frange "dure" de la scène indé française. Hier les CONDENSE, BÄSTARD et DEITY GUNS, aujourd'hui les NED, OVERMARS (trop de name-dropping tue le name-dropping), la plupart des formations lyonnaises ayant accédé à une certaine "reconnaissance" auront chacune à leur façon proposé une relecture personnelle et inspirée de leur style de prédilection. DOPPLER ne déroge pas à cette règle et nous propose avec ce "Songs To Defy" une noise extrêmement inspirée, concise, puissante et qui devrait assurément faire date.


Rédigé par : NicoSata | 16/20 | Nb de lectures : 10654