Il y a un an à peine, dans sa partie 2, « l’affaire Dominici » qui nous concerne n’a pas déclenché un enthousiasme forcené. (cf kro du 03/05/07). Faiblesse du propos, redondance, manque d’imagination, bref un tableau pas très idyllique. Présumer que la 3 va subir le même désintérêt serait-il fortuit ? Le coup de la trilogie qui ne tient pas la route quand déjà les premiers épisodes s’effondrent au bout d’un quart d’heure, on nous l’a déjà fait. Ajouter à une concurrence impitoyable et à l’attitude « fast-food » des consommateurs, la survie s’avère plus qu’aléatoire. Alors pourquoi ce 3ème volet serait différent ?

Peut-être parce que par amitié pour sa participation aux origines de Dream Theater, on voudrait donner à Charlie une nouvelle chance ? Par sympathie ? Ou encore parce qu’il se montre opiniâtre à ne pas sombrer trop vite ? Pour sa fidélité à la même équipe en espérant faire mouche là où il a échoué une première puis une seconde fois ?

Et si finalement cette troisième partie était vraiment digne d’intérêt ? Hein ? Ça ne coûte rien d’essayer. « Il n’y a que les combats qui ne sont pas menés qui sont perdus d’avance ! » Allez Charlie, montre-nous que nous avons tort de ne pas y croire…

Le concept
Il s’agit une nouvelle fois d’un concept album entièrement écrit par Dominici dont le thème est encore une fois apocalyptique. L’envie est grande d’y voir le côté maniaque de la chose. Certes, l’époque n’est pas à la franche rigolade mais la récurrence de ce thème laisse à penser que le microcosme « métalleux » a apparemment un énorme problème à évacuer. Les sectes millénaristes se frottent les mains sans parler des psy ! Ce à quoi Charlie pourrait nous répondre « Non, c’est de la continuité, de la suite dans les idées… » Moi, j’appelle ça de l’obsession, mais soit !
« C’est donc l’histoire d’un mec (Anthony Dam) qui est flic. Après la 4ème guerre mondiale, il découvre qu’il est l’ultime détenteur de l’ADN qui permettra de reconstituer la race humaine en voie de disparition. Après l’intervention des 7 anges de l’apocalypse, on lui prélèvera une côte à partir de laquelle on (re)créera Eve et tout pourra recommencer. Il deviendra alors Anthony A.Dam. » Voilà voilà !
Un peu tiré par les dreadlocks, non ? Un brin agaçant en tout cas étant donné le contexte « je t’échange une rédemption contre deux contritions ». Et puis « tout pourra recommencer », moi, je veux bien Charlie mais vu le merdier ambiant pour arriver au même résultat, est-ce que ça en vaut la peine ? Tu y crois ? Vraiment ? C’est ton droit. (Encore un qui doit s’endormir avec sa bible sur le nez…)

Une fois évacué le concept « chargé », voyons de quelle manière il est orchestré. Le métal progressif comme moyen d’expression est un formidable vecteur de transmission d’émotions quand il est agencé avec intelligence, justesse et originalité. Pour ce qui précède, tirons un trait sur ces trois chimères en espérant vivement qu’elles soient au programme côté musique. Il n’y a que là que notre indifférence soit asticotée et la ténacité du groupe enfin récompensée car contrairement aux textes, la composition fut un acte collégial.

Alors oui, ce troisième volet offre bien plus de raisons de s’échauffer que son prédécesseur. Les compos sont largement plus fouillées, du coup leur intérêt s’en voit décupler. Par exemple, "King of Terror" 7min 51: ce titre qui ouvre sur l’annonce de l’explosion d’une bombe atomique au Moyen-Orient (CNN ou Al Jazirah en fond sonore ?) se montre extrêmement pêchu et travaillé, comme doit l’être un bon morceau de prog metal. D’ailleurs, la plupart des bons titres de ce troisième volet sont construits de la sorte. C’est le cas pour les pièces les plus longues comme "Enemies Of God" 10min06 et "Genesis" 10min49 qui ferme la marche. A contrario, d’autres titres montrent leur faiblesse quand ils succombent au conventionnel speed metal ("Liquid Lightning" 5min23) ou lorsqu’ils sacrifient à la fatidique heavy ballade ("So Help Me God" 4min23). A cheval entre métal prog et speed, "March Into Hell" (5min58) et "Revelation" (6min56) sont plus au point affichant un dynamisme et une puissance qui font les bons alliages.

Certes, rien de révolutionnaire, plutôt académique même mais bon, on s’en contentera dans la mesure où il est évident que la « machine » Dominici tourne à plein régime et que l’on a du mal à envisager une possible marge de progression. A moins de renouveler l’effectif ou de plancher comme des malades sur des compos plus originales. La surchauffe est même envisageable notamment sur certains shreds outranciers où le « gratteux » avoue ses limites. Ou bien encore et alors qu’il était tout à fait au point dans le précédent volume, le chant de Charlie n’est ici pas irréprochable et se montre même insupportable à de nombreuses reprises. (Serait-ce une explication au fait que sa carrière au sein de D.T a tourné court ?) Imiter une icône y compris lorsqu’elle patine dans le yaourt n’est pas à la portée du premier venu. Car ne tournons pas autour de la gamelle, c’est bien le groupe de l’ex-frontman des New Yorkais qui est en ligne de mire.

Dominici n’est pas né d’hier et s’il est bien placé pour savoir ce qui peut plaire au quidam amateur, il ne trouve pas toujours le moyen de l’exprimer. Donc, tout naturellement, cette vision 3 de l’Apocalypse souffre encore et toujours de quelques imperfections qui semblent ne pas devoir trouver de solutions. Certaines ne sont pas assez rédhibitoires pour avoir envie de jeter le tout aux orties mais elles pourraient l’être suffisamment toutefois pour l’empêcher de marquer les esprits au-delà d’une période raisonnable. C’est-à-dire jusqu’au prochain album du même genre mais pourvu d’arguments disons plus probants.
L’horizon pourrait ne pas être aussi sombre pour Dominici car, bonne aubaine, l’actualité métal prog est calme en ce moment ; pas de grosses sorties en vue à court terme ce qui pourrait finalement lui rendre un immense service.


Rédigé par : Karadok | 13/20 | Nb de lectures : 11086