Uranus est la seule planète de notre système solaire avec un axe incliné (ndzs : car son axe de rotation est pratiquement dans son plan de révolution autour du soleil. En d’autres termes, ses pôles Nord et Sud sont situés là où les autres planètes ont leur équateur). Elle ne tourne pas, elle roule. C’est ainsi qu’est la musique de DINNER AUF URANOS.

Jolie présentation n’est-ce pas ? Il faut dire que côté habillage et concepts mystiques, les divers membres de feu(?)-NOCTE OBDUCTA font toujours fort. Il y en a deux chez DINNER AUF URANOS : Marcel Breuer (guitariste, claviériste et chanteur clair) et Matthias « Matze » Rodig (batteur). On connaissait la recette de NOCTE OBDUCTA : du Black-Metal et des atmosphères progressives. Et après la séparation du groupe -pas tout à fait définitive apparemment- le côté Black s’est retrouvé chez AGRYPNIE : il est donc tout à fait logique que le côté atmo/prog se retrouve chez DINNER AUF URANOS : bingo !

Pour leur premier album 50 Sommer – 50 Winter, Marcel et Matthias (plus deux comparses) ont donc décidé d’explorer plus en détail le côté le plus mélancolique et le plus aérien de leur musique. La tentative avait déjà été faite avec Sequenzen Einer Wanderung, le dernier album -en date- de NOCTE OBDUCTA, qui s’était avéré être une somptueuse pièce de metal très atmosphérique et dépaysante, inattendue et donc d’autant plus surprenante. 50 Sommer – 50 Winter est donc dans la lignée directe de cet album, à la seule différence que la composante metal a été quasi-totalement retirée. Plus de passages épiques à voix Black comme à la fin de "Nebel II" par exemple. DINNER AUF URANOS pratique plutôt un Folk/Rock progressif assez sombre, avec un seul chant clair mélodieux. Le groupe ne tente pas de rentrer dans une case précise et se décrit comme du « German-speaking Rock avec des aspérités et des mélodies captivantes », et se dit influencé par le Post-Rock. Bien que le côté « German-speaking Rock » soit indéniable (forcément, le chant est en allemand et il y a des relents logiques de Black atmo germanique), le côté légèrement bluesy sonne plutôt « américain », ce qui me fait rapprocher DINNER AUF URANOS d’un groupe comme AGALLOCH. Si la filiation n’est pas si évidente que ça (AGALLOCH est tout aussi sombre mais de manière différente, et présente quelques parties de chant extrême), les fans du combo de Portland devraient être intéressés par ce que propose le combo de Mainz.

50 Sommer – 50 Winter comporte 6 titres et est divisé en deux parties : 3 titres pour l’été (Sommer) et 3 autres pour l’hiver (Winter). Il n’y a pas vraiment de différence musicale entre les deux parties, mais plutôt des différences en termes de structure. Sommer est composé de deux titres plutôt longs (8 et 7 minutes) plus une courte pièce de 3 minutes. Les titres "6786" (Bas-Rhin – Vienne ?) et "Zwischen dem Salz und Montpellier" (oui, moi non plus je ne vois pas le rapport avec Loulou Nicollin. 'Pas trop compris le concept « guide du routard » de ce titre bien que les paroles me sont fournies) sont un peu les tubes de l’album. "6786" présente des riffs électro-acoustiques efficaces et des mélodies accrocheuses, le chant (pas de chant extrême sur cet album) est magnifique, pour un morceau de folk-rock mélancolique assez jubilatoire. "Zwischen dem Salz und Montpellier" est un morceau tout aussi accrocheur, mais plus calme et moins dynamique, le chant étant quasi-récité à la manière d’un poème. L’ambiance assez « campagnarde » de ce morceau est saisissante, tout ce qu’il faut pour se laisser emporter dans ce voyage musical (qui est décidemment la spécialité des membres de feu-NOCTE OBDUCTA). "Texas Della Morte" est un court titre assez étrange, très sombre voire psychédélique, avec plusieurs sonorités différentes et un chant très à-propos (qui ressemblerait presque au chant posé et sournois de Till Lindemann de RAMMSTEIN).
Suivent ensuite les 3 titres de Winter. Les courts "Frost 1" et "Frost 2" encadrent le pavé de l’album nommé "Töte das Jahr für Mich", qui allonge 22 minutes (!). Après une première partie très bluesy et sombre, ce morceau part dans des envolées guitaristiques diverses et variées pendant plus de 10 minutes, pour se terminer par une partie atmosphérique mystique dans la lignée de Sequenzen Einer Wanderung et un passage plus percutant tout à la fin. Mais malheureusement ce titre, avec un riff mélodique unique qui tourne en fond tout du long, est assez répétitif et longuet, et l’ennui pointe le bout de son nez après quelques minutes d’atermoiements guitaristiques progressifs. Le tout se termine par l’outro "Frost 2" portée par des riffs acoustiques et des beats électro, et toujours par l’excellente voix claire.

Au final, ce premier effort de DINNER AUF URANOS est un album sympathique, très reposant et agréable à écouter, et… c’est tout. Car, bien que le propos ne se veuille certes pas complexe ou alambiqué, le côté simple et accrocheur de 50 Sommer – 50 Winter ne fonctionne pas vraiment, ou seulement en partie. Il fait son petit effet sur "6786" (qui est un titre franchement excellent et superbe), mais sur le reste de l’album ça a du mal à passer, notamment dès que le groupe essaye de travailler ses ambiances ("Töte das Jahr für Mich"). C’est que je trouve qu’au niveau des atmosphères, 50 Sommer – 50 Winter a du mal à tenir la comparaison avec Sequenzen Einer Wanderung, même si la musique de DINNER AUF URANOS se veut plus directe et moins ambiancée. Le voyage est bien là, mais on ne voyage pas aussi loin que sur l’album-épitaphe -a priori- de NOCTE OBDUCTA, ainsi que sur le 16[485] d’AGRYPNIE. Il en reste que 50 Sommer – 50 Winter est un disque de Folk/Rock très plaisant, bien fait pour être écouté au coin du feu un soir d’été (ou en servant le barbeuc ? la pochette est assez étrange à ce titre. C’est ça la « photographie sombre » ? En tout cas, il semblerait que lorsqu’on organise un dîner sur Uranus, il convient de le servir sous une tonnelle), mais qui ne va pas plus loin que ce simple cadre champêtre. Je suivrai néanmoins avec intérêt la suite de la carrière de DINNER AUF URANOS, qui est tout de même capable de nous proposer de bien belles choses.


Rédigé par : ZeSnake | 13/20 | Nb de lectures : 13043