Cas épineux que ce premier album de DIABULUS IN MUSICA. Récemment signé par le label Metal Blade, le jeune groupe espagnol officie dans un registre metal gothico-symphonique à chanteuse. Son premier album, sobrement intitulé "Secrets", risque d’engendrer des réactions diamétralement opposées. Certains n’y verront qu’une énième formation du genre venue s’engouffrer sur le terrain des EPICA, WITHIN TEMPTATION, THEATRE OF TRAGEDY et consorts. Nous ne pourrons pas forcément leur donner tort. Car les 55 minutes de musique ici proposées ne transpirent pas vraiment l’originalité. De l’introduction obligatoire au violon à la traditionnelle ballade au piano, en passant par quelques titres plus agressifs, sans oublier l’alternance chant féminin lyrique/vocaux masculins et autres chœurs grandiloquents, tous les éléments sont réunis pour que l’auditeur trouve immédiatement ses repères… Chez DIABULUS IN MUSICA on ratisse large pour rafler la mise, et on l’assume.

Pour autant ces préjugés négatifs sont assez vite balayés par un professionnalisme remarquable et peu commun à ce stade de développement, ainsi que par une réelle personnalité qui se dessine progressivement au fil des écoutes. Groupe opportuniste et inintéressant à première vue, DIABULUS IN MUSICA réussit ainsi le tour de force de sortir un premier essai rafraîchissant et inspiré, quand bien même la nouveauté en est absente.

Cet étrange paradoxe a pourtant une explication. Les musiciens ibériques ont su créer une oeuvre solide et calibrée en tous points grâce à un savoir-faire impressionnant pour des débuts discographiques. En s’entourant d’Ad Sluijter (ex-EPICA, tiens tiens…) pour le mixage et de l’incontournable Sascha Paeth pour le mastering, DIABULUS IN MUSICA a joué la sécurité. Le son, massif, ne peut dès lors qu’être excellent et rend justice au travail de composition irréprochable accompli par le groupe. Sans véritable baisse de régime, aux atmosphères variées, "Secrets" est émaillé en sus de quelques titres au-dessus du lot, appelés à devenir de futurs classiques de la formation (l’épique « Come To Paradise », le bien-nommé « New Era » agrémenté d’un extrait de discours de Barack Obama, « Ishtar » et ses sonorités orientales bienvenues, ou le sublime final « St. Michael’s Nightmare »).

Le groupe privilégie par ailleurs le collectif aux démonstrations techniques individuelles, ce qui renforce ce sentiment d’unité. Le claviériste Gorka Elso est ainsi accompagné d’un violoniste et d’un violoncelliste qui contribuent grandement à la richesse musicale de l’ensemble. Néanmoins, c’est bien la jolie chanteuse Zuberoa Aznarez qui se distingue en assurant un sans faute tout au long du disque. Sa voix séduisante (judicieusement appuyée par un chœur de cinq chanteurs) est en grande partie responsable de la bonne tenue de "Secrets". Il faut dire que la musique est taillée à la lettre pour mettre en avant les capacités vocales de la vocaliste, comme sur le « tube » de l’album, « Nocturnal Flowers ».

Malgré les apparences, souvent trompeuses, DIABULUS IN MUSICA n’est pas qu’une vulgaire formation de suiveurs. Bien au contraire, son étonnante maturité en fait déjà l’une des découvertes les plus intéressantes du genre en 2010 et pourrait rapidement l’amener vers les sommets.


Rédigé par : up the irons | 15.5/20 | Nb de lectures : 12702