Qu'est-ce qu'un bon album ? Le sujet a déjà été longuement et à plusieurs reprises débattu dans ces pages et chacun, probablement, a sa propre définition de ce qu'est un bon album. En ce qui me concerne, après tant d'années passées à débattre avec mes amis tout aussi passionnés sur les qualités de tel ou tel disque sans forcément arriver à un consensus, j'en suis arrivé à un point où je me suis dit que, finalement, bien qu'il faille évidemment juger un album sur des critères les plus objectifs possibles quand il s'agit de le chroniquer, ledit album serait déclaré bon quand il reviendrait régulièrement sur ma platine.

Et devinez quoi ? C'est exactement ce qui se passe avec ce premier album de DETORN, groupe de Clermont-Ferrand, qui n'a finalement plus bougé de la pile de CD posés près de la chaîne du salon ou de la pochette de CD pour la voiture depuis sa réception. En gros, il n'a encore jamais été rangé et classé, comme cela arrive trop souvent avec des albums qu'on écoute intensivement pour pouvoir en faire le chronique et qu'on se dépêche ensuite de ranger comme pour valider le travail effectué. Avec « The Dark Passenger », il se trouve qu'un lien plus fort s'est créé et que même quelques mois après l'avoir reçu il procure toujours autant de plaisir.

Son artwork, qui peut en évoquer quelques-uns de DARK TRANQUILLITY et pourrait à tort faire penser que DETORN est un groupe de Death Metal, cache en fait une musique qui a plus à voir avec ALICE IN CHAINS et PANTERA qu'avec la scène suédoise. C'est en effet un Metal couillu, basé sur des rythmiques Power Metal qui souvent se muent en riffs suintant le blues moite de la Nouvelle Orléans que pratique le groupe. Là-dessus se greffent des vocaux death bien gras au phrasé proche de celui d'Anselmo (PANTERA, DOWN) et des voix claires qui, elles, sont directement inspirées de celles d'ALICE IN CHAINS, avec cette tristesse et cette élocution lente, désabusée, qui est la marque de fabrique de son leader Jerry Cantrell. On sent que le groupe a les moyens, s'il le désire, de balancer un Thrash bien bourrin comme « Ashes Of Me » le laisse entrevoir, mais il reste dans un registre mid-tempo, voire lent, concentré sur une ambiance pesante qui sur le deuxième tiers du disque perd de sa consistance, ce qui ne constitue au final qu'un bémol compte-tenu de la qualité globale des compos.

« The Dark Passenger » est un album dense, jouant en permanence sur deux registres, agression et émotion, qui pourraient le rendre confus. Ce n'est pas le cas grâce à une excellente production qui est le résultat de la collaboration du chanteur-parolier Julien Nore et de Brett Caldas-Limas (KALISIA). Julien s'est attelé, comme pour le EP « Locked Inside », à l'enregistrement et au mixage, Brett se chargeant du mastering. Le résultat est bluffant et bien meilleur que de nombreuses grosses productions actuelles. Les guitares sont énormes, velues et précises, les passages plus atmosphériques/ambiancés aussi aérés que les rythmiques sont massives, les instruments sont TOUS audibles, notamment la basse, dont le grondement reste toujours discernable malgré l'accordage assez bas des guitares et les vocaux, death et clairs, émergent du magma sans s'en détacher. Une prod dense, précise, homogène, comme on aimerait en avoir plus souvent.

Pour conclure, DETORN a réalisé un joli coup avec cet album qui, s'il tourne toujours autant chez un grincheux insatisfait comme moi n'a pas de raison de tourner tout autant chez beaucoup d'entre vous !


Rédigé par : Dungorpat | 16/20 | Nb de lectures : 13632