« An Epic Defiance » avait en 2003 révélé DETONATION aux yeux des amateurs de death mélodique en reprenant à son compte la formule utilisée par DARK TRANQUILLITY sur « The Gallery ». L’album était de plus sorti au moment opportun, juste avant que les Suédois ne se décident à revenir à quelque chose de plus violent en intégrant à nouveau des blastbeats et les riffs sautillants chers à la scène thrash/death de Göteborg de la deuxième moitié des années 90. « An Epic Defiance » proposait ainsi un savoureux mélange de mélodie, de brutalité et de technicité qui sera encore mieux mitonné avec son successeur « Portal To Euphobia ». Les Hollandais s’affranchissaient par la même occasion avec ce second opus de l’influence du grand frère suédois et on sentait poindre une certaine identité sonore, impression confirmée par leur dernière onde de choc « Emission Phase ».

DETONATION frappe en effet un grand coup avec son troisième album pour Osmose : artwork plus travaillé (ils ont délaissé Niklas Sundin pour collaborer avec Eliran Kantor (sHEAVY, TO-MERA)), production plus agressive, compos plus matures, « Emission Phase » est un régal de death mélodique sombre et accrocheur. Cette fois, le groupe a décidé de jouer légèrement moins vite, et bien que les blasts soient encore bien présents on trouve également beaucoup plus de parties lentes ou mid-tempo que par le passé. En écoutant bien, on peut même discerner un riff hard rock ou des accords fleurtant avec le black metal (« Invoking The Impact »). Koen Romeijn est plus à l’aise que jamais derrière le micro et ses hurlements sont en parfaite harmonie avec les autres instruments, ce qui n’a pas toujours été le cas dans les albums précédents et c’est peut-être l’indice le plus significatif du palier que viennent de franchir les Bataves. Il pose ses vocaux avec un tel naturel que c’est l’ensemble du morceau qui semble en même temps plus solide et cohérent. Son aisance va même jusqu’à tenter quelques lignes de chant clair, un domaine dans lequel il encore du travail mais une épreuve casse-gueule de laquelle il sort la tête haute.

Plus lents, d’une manière générale les nouveaux morceaux le sont, mais n’y voyez aucune tentative de côtoyer les premières places des charts, « Emission Phase » frappe moins que ses deux aînés mais quand il se met à distribuer les coups, il sont précis, rapides et secs. On ne tombe pas au premier uppercut (parce qu’on est un grand costaud qui écoute du brutal death très brutal et très death), mais DETONATION ne lâche jamais le morceau. Si l’attaque frontale ne marche pas du premier coup, il change de tactique et balance des leurres sous forme de petites mélodies toutes mimis puis charge le couteau entre les dents, soutenu par une section rythmique saturée de testostérone. Pas forcément novateur, mais redoutable.

Les Hollandais se sont donné les moyens de concrétiser leur succès grandissant et s’offrent tout autant qu’ils offrent au public un album très abouti ne comportant guère d’autre faiblesse que d’arriver après la vague suédoise. Il serait cependant triste de passer à côté d’un disque de cette trempe pour cette seule raison, il a en lui tout ce qui fait qu’il y a dix ans tout ce qui venait de Suède ou presque était couronné de succès : brutalité, mélodies accrocheuses, niveau technique élevé et inspiration à revendre.


Rédigé par : Dungorpat | 16/20 | Nb de lectures : 11595