Depuis le temps que la marmite de la scène québécoise était en ébullition, il fallait bien, qu’un jour ou l’autre, ces messieurs des gros labels indépendants se réveillent et se décident à accorder à cette scène l’intérêt qu’elle mérite. Comme de bien entendu, tout le monde s’est réveillé en même temps ce qui nous amène à des singularités discographiques, comme celle de DESPISED ICON. Alors que le groupe vient de sortir un split cd chez Relapse avec les colossaux Américains de BODIES IN THE GEAR OF THE APPARATUS, les revoilà déjà avec un second album, qui marque leurs débuts chez Century Media.
Depuis « Consumed by your poison », leur premier cd sorti fin 2002 chez Galy records, DESPISED ICON a parcouru un bon bout de chemin qui l’a naturellement amené à cette petite surexposition momentanée. Tout d’abord quelques changements d’équipe : Alexandre Erian, l’ex-batteur de NEURAXIS, a quitté son poste pour remplacer au chant l’incroyable Marie-Hélène Landry, partie vers d’autres horizons. De ce fait, le groupe n’a eu d’autre choix que de recruter un nouveau batteur en la personne de l’excellent Alexandre Pelletier. Enfin, les amateurs du métal québécois reconnaîtront le nom de Yannick St-Amand qui ne se contente pas ici de produire, vu qu’il est l’un des deux guitaristes originels du gang de Montréal.
Du côté de ses aspirations musicales, DESPISED ICON a également subi un subtil changement. Le groupe a délaissé les textes en français au profit de l’anglais, nettement plus porteur dans le métal extrême. De même, le style du groupe a quelque peu freiné sur la finesse pour proposer une musique plus radicale, à la frontière du grind, du death et du HxC. Mais, limiter DESPISED ICON à ce mélange hybride serait réducteur car le groupe regorge d’idées et les influences sont nombreuses. En effet, « The Healing process » pourrait bien être l’album de la consécration, pour peu qu’on lui accorde l’attention qu’il mérite. Dès « Bulletproof scales », le premier morceau, DESPISED ICON fait une impressionnante démonstration de sa mise en place comme de la diversité de sa musique. On passe avec fluidité d’un deathcore hargneux à une puissante mosh part, pour partir dans une accélération frénétique ponctuée de curieux petits riffs. Tout l’album est un peu à l’image de ce morceau, à ceci près que les décors plantés par DESPISED ICON changent à chaque fois et que divers ingrédients viennent se greffer sur cette base incroyablement extrême. C’est le cas pour le break apaisant de « Immaculate», ou celui de « Warm blooded », le riff lancinant à la « Roots » de « The Sunset will never charm us », le supersonique « Retina ». En simplifiant, on pourrait avancer que DESPISED ICON est la symbiose entre la technicité hystérique d’un DILLINGER ESCAPE PLAN, la puissance d’un MISERY INDEX et la pugnacité HxC de TERROR mais on serait encore loin du compte.
Tous les titres de « The Healing Process » sont assenés avec la même fulgurance, la même fausse spontanéité mûrement réfléchie et la même méticulosité. La dualité des deux chanteurs HxC et death ne fait que renforcer la dynamique d’un album, décidément, bien concocté. La production de Yannick St-Amand, renforcée par le mixage de JF Dagenais (KATAKLYSM, MISERY INDEX) et le mastering d’Alan Douches (THE DILLINGER ESCAPE PLAN, SHADOW FALL, CONVERGE, SEPULTURA) est tout simplement exemplaire et rendent justice à l’orgasme des guitares sous-accordées. « The Healing Process » impose la suprématie de la Québécoise touch dans ce qu’elle a de plus convaincant. De quoi donner des envies d’expatriation…


Rédigé par : Tonton | 17/20 | Nb de lectures : 12725