A la vision des deux Allemands fondateurs du combo, on peut se demander si le Black n’est pas entré d’une certaine manière dans l’âge adulte. En guise de corpse paint, ils ont revêtu leur plus belle panoplie d’intermittents du spectacle ! Pas trve pour un sou le coup de la parka, du bonnet et des lunettes ! Pis, ils ne possèdent même pas de longues et belles crinières de jais à faire onduler sous les branches d’une forêt misanthropique. C’est donc sans fard ni artifices que les deux compères viennent nous présenter leur première œuvre. Il s’agit en fait du réenregistrement de leur première démo qui fut remarquée par le label Viva Hate.

A cette occasion, quelques changements ont été apportés. Ainsi, à la place de la BAR horripilante, le duo a recruté un batteur à temps plein en la personne de Christian qui fut le batteur live de Heaven Shall Burn. Comme ils sont sympas, l’acquéreur aura même le droit à un titre bonus qui n’était apparu que sur le sampler "Stay Brutal".

Voilà une rondelle qui m’a bien foutu le doute ! Disons plutôt que ce sont mes collègues qui apparemment n’entendaient pas la même chose que moi. J’ai finalement dû me résoudre à me plier à certains de leurs arguments. Effectivement, le duo évolue dans un style de matraquage d’origine suédoise tel qu’il est blasté par leurs compatriotes de Negator ou de Endstille. L’auditeur retrouvera les dissonances virulentes à la suédoise ainsi que des trémolos mélancoliques et désespérés qui font le charme du rouleau-compresseur Endstille.

Mais étrangement, ce n’est pas ce qui m’a sauté aux ruches lors de mes premiers périples au sein de ces 49 minutes de Black blasté. En effet, le duo développe un goût prononcé pour des harmonies et des mélodies proches de la musique classique voire médiévale sur un titre. Ainsi, j’ai perçu plus d’accointances avec un Hyadningar et par conséquent avec toute la scène sympho norvégienne, Obtained Enslavement en tête. Il suffit d’écouter l’instru "Spätsommer" où apparaît une magnifique et solennelle ligne mélodique qui n’aurait pas dépareillé sur Witchcraft et qui rappelle un peu la musique du 17ème siècle. Tous ces trémolos élégiaques, ces crescendo poignants et cette somptueuse mélancolie m’ont aussi énormément évoqué tous ces combos japonais (Hakuja, Arkha Sva…) influencés par les légions noires. On retrouve ce même goût pour le mélange entre vivacité et mélodies prenantes.

Par ailleurs et par rapport à leurs compatriotes, on entend une volonté d’aérer les compos qui s’avèrent assez longues. De ce fait, les morceaux se parent régulièrement de passages plus atmosphériques voire progressifs, de breaks acoustiques et même d’un sample de voix parlée plongeant l’auditeur en transe hypnotique. Ainsi, malgré la longueur de certains titres, la lassitude ne vient jamais rompre le ravissement de ce déluge mélodique.

Au niveau sonore, il est indéniable que le fait d’avoir un vrai batteur apporte un plus non négligeable. En revanche, je trouve la batterie un poil trop en avant peut-être mais surtout un peu trop éditée et frelatée. Disons que ça ne colle pas avec le style. J’aurais préféré un rendu plus organique mais ça reste écoutable, ce n’est pas un vieux baril de lessive.

Typiquement le genre d’album qu’on n'attend pas. Ca sort de nulle part et même si le grincheux relève les défauts inhérents à un premier jet comme un léger manque d’originalité ou un côté patchwork du tracklisting, je ne peux que m’enthousiasmer pour cette petite galette vivifiante et gorgée de mélodies à la fois poignantes et majestueuses.

Une découverte prometteuse qui certes ne finira pas dans les classements annuels mais usera suffisamment votre platine pour en faire une pépite underground.
Classieux !


Rédigé par : Dark Rabbit | 16/20 | Nb de lectures : 13471