Ce CD qui m’a été adressé par mégarde était à l’origine destiné à être chroniqué par mon très apprécié collègue Sheb. Or, si d’aventure la qualité du matériel en présence devait être le reflet de l’estime de VsGreg pour notre sculptural barman au légendaire lainage ambré, il y aurait de quoi béer d’effroi. Car quel rédacteur en chef doté ne serait-ce que d’une moitié de cœur aurait la cruauté de signifier son désaveu à l’un de ses collaborateurs en lui infligeant avec le sourire l’une des besognes les plus ingrates qui soient ? Enfin bon, la réflexion n’a pas lieu d’être puisque ladite besogne ingrate, du coup, elle est pour ma gueule… Et de me demander pour la énième fois avec ce même mélange d’irrésolution et de lassitude : qui mais bon sang qui peut bien trouver un intérêt à signer, distribuer, promouvoir (que sais-je encore…) des trucs aussi innommables ? Sans parler bien sûr de ceux qui en sont à l’origine, en l’occurrence un duo de cosmétiqués plus vrais que nature en provenance du Danemark. Demon Realm, puisque c’est ainsi que se font appeler les intéressés, accusent un inventaire de tares tellement ahurissant qu’il n’est absolument pas nécessaire d’ausculter leur « musique » pour y chercher ce qui ne colle pas, mais plutôt d’y aller à la pince à épiler pour essayer de repêcher ce qui est encore à peu près exploitable – et là accrochez vous ça va aller vite : rien ! Dès l’affolante intro évoquant un fichier midi bricolé en dix-neuf secondes chrono par un sourd-muet planté pour la première fois de sa vie devant une console, n’importe qui est à même de comprendre qu’il est trop tard pour lancer une bouée de secours. Ensuite c’est le naufrage dans les grandes largeurs… La batterie commence à déraper dans des tempos saugrenus dès le premier changement de caisse ; les guitares – réduites à un sifflement lointain et stérile proche d’une scie sauteuse à l’agonie – régurgitent à la volée une macédoine parfaitement inintelligible aux furieuses allures de premier jet aléatoire. Et lorsque le vocaliste aux invraisemblables braillements hermaphrodites a le malheur de se manifester pour la première fois, c’est à peine si l’on n’est pas pris de panique et à deux doigts d’appeler en catastrophe son service après-vente pour demander si la chaîne est encore récupérable… Bref, si la musique était régie par un système fonctionnant sur le principe du code de la route, Demon Realm auraient droit à un retrait d’ampli immédiat et sans cérémonie pour leurs infractions répétées à l’alinéa black du paragraphe metal. La scène black danoise est déjà bien sinistrée, si en plus on ne peut compter que sur des charlatans de cet acabit pour porter son étendard, autant lâcher l’affaire tout de suite. Je suis tout disposé à subir l’émasculation sur le champ s’il se trouve sur toute la France plus de trois gogos pour acheter cette merde.


Rédigé par : Uriel | 02/20 | Nb de lectures : 8374