Surpris. Telle a été ma première réaction en découvrant que le groupe était originaire de Sibérie. Les lointaines provinces de la Fédération Russe stimulent aussitôt l'imagination et je ne suis pas loin de me figurer un groupe de nomades arpentant les terres désolées de la toundra. Les clichés ont la peau dure. Il n'empêche que sur le papier ça sonne aussi exotique que si on m'avait annoncé un nouveau groupe de funeral surf doom hawaïen.
Toute plaisanterie mise à part, le groupe n'a pas hésité à faire enregistrer son disque en Pologne, auprès du studio Hertz -QG de la scène extrême locale- pour garantir la qualité de son album. Je suppose que l'export vers l'Europe est la seule alternative pour un groupe de metal de Novossibirsk, sauf à les imaginer parcourir plusieurs milliers de km pour aller jouer au Kazakhstan.

C'est donc armé d'une forte dose de sympathie à leur égard que je me suis lancé dans la découverte de leur premier album succédant à un EP bien accueilli par la presse. Premier constat : on est manifestement en présence de bons musiciens qui ont pris soin de composer une musique exigeante. L'oreille se dresse pour tâcher de saisir la trame des morceaux ; une douzaine de titres de soft-death plutôt groovy qui ne tombent jamais dans la facilité à défaut de faire mouche à chaque coup. Pourquoi avancer ce néologisme étrange de soft-death? Parce que le groupe n'a rien d'extrême. « Wax » a beau afficher tous les éléments constitutifs d'un album de death, il ne réussit jamais aussi bien que quand il s'en libère. Et c'est bien là le problème.
J'ai le sentiment que le groupe tente en permanence de durcir le ton de sa musique alors que ce n'est visiblement pas leur registre naturel, celui où leurs compositions s'épanouissent. On se retrouve donc parfois avec des parties de blast beat sorties de nulle part, des growls de schtroumpf grognon beaucoup trop uniformes et des accélérations peu judicieuses qui foutent en l'air les riffs.
D'autant plus dommage que les parties en mid tempo balancent vraiment bien et permettent aux guitaristes de développer un jeu hybride où harmoniques, effets atypiques et mesures audacieuses enrichissent considérablement l'édifice musical. Mention spéciale au bassiste qui loin de se fondre dans la structure rythmique envoie lui aussi des lignes mélodiques inspirées et officie bien souvent comme une troisième gratte.
Quelques soucis mineurs avec le mix qui met salement en avant le chant, précisément la partie faible groupe à cause de l'absence de variété de ses techniques et d'un manque de personnalité. D'autres interrogations sur la texture générale du son qui me semble rugueuse et abusivement gonflée sur les mediums, un sentiment d'inconfort à l'écoute s'installe comme si le processus de maturation du son avait été interrompu en cours d'affinage. La tonalité est indécise, à la croisée des chemins et c'est sûrement ce qui caractérise le mieux l'état actuel de Defect Designer.

Pas grand-chose de plus à souligner. Le groupe a toutes les cartes en main pour sortir de la masse anonyme des outsiders du death metal, pourquoi pas en prenant encore plus ses distances avec le genre. A l'image de la cover de « Wax » c'est maintenant à eux de révéler leur véritable identité une fois que le masque de cire aura définitivement fondu.




Rédigé par : #Guillaume# | 13/20 | Nb de lectures : 11084