DEAD EYED SLEEPER - Through The Forests Of Nonentities (Supreme Chaos) - 15/09/2009 @ 09h10
Les œuvres d'art sont d'une infinie solitude ; rien n'est pire
que la critique pour les aborder. Seul l'amour
peut les saisir, les garder, être juste envers elles.
(Rainer Maria Rilke)
Le critique aussi se trouve parfois saisi par une infinie solitude face à une œuvre qui ne se laisse pas appréhender. De là à considérer que l'amour est la panacée du chroniqueur anxieux il n'y a qu'un pas que je franchis aujourd'hui.
De l'amour il en faut pour cette critique. De l'amour pour le Death prog qui produit actuellement des rejetons admirables, de Augury à Between The Buried And Me pour ne citer que ces titanesques exemples. De l'amour également pour le vivier allemand qui fournit intarissablement des musiciens talentueux dans le bruyant style qui nous plaît tant.
Quid de ces musiciens-là ? Issu d'une première mouture de la formation (in)connue sous le nom de LEGACY, le groupe compte dans ses rangs deux membres de AHAB, plus habitués à délivrer leur doom des grands fonds. Tout ce beau monde n'ambitionne pas moins que d'élaborer une forme aussi complexe qu'exigeante de Death, gorgée du groove et du feeling de ces albums qui vous laisse moite et hébété à l'issue du longue nuit d'amour.
Sur le papier je suis déjà consumé par la passion. En pratique c'est un peu moins idyllique. DEAD EYED SLEEPER nous propose une belle pièce de misanthropie avec cet album composé de trois chapitres déclinant l'innocuité du monde contemporain sous toutes ses formes. Les textes, portés sur la spiritualité et souvent abscons, s'articulent autour du cycle mort/mutation/renaissance avec en final la promesse de clore cette errance « à travers les forêts de gens insignifiants ». Pourquoi pas.
Les compos respectent pourtant à la lettre le cahier des charges du prog bourru : les thèmes musicaux sont richement développés par des séries de riffs complexes, de nombreux accords étendus viennent apporter une couleur particulière et les fréquents changements de mesure insufflent une dynamique aux différents titres. Mieux encore, les guitaristes introduisent de redoutables variations harmoniques qui introduisent une étrange dissonance au cœur de la mélodie (cf. « the undercurrent »).
Tout ceci ne parvient malheureusement pas à m'arracher des soupirs amoureux. La faute principalement à une production sèche qui étouffe les compositions. A cet écueil s'ajoute une durée des morceaux un peu courte -5min en moyenne- à peine le temps d'installer un thème et de travailler sa texture qu'on passe à la suite. Les émotions peinent à faire surface à cause de ce manque d'amplitude de la plupart des titres. Par moments, l'album dégage même un air de OPETH en manque d'inspiration. Si j'osais j'émettrais en outre une comparaison avec d'autres Allemands, les trop discrets APOPHIS, qui dans un registre plus féroce élaborent une musique sensiblement plus efficace.
Il n'en reste pas moins que "Through the forests of nonentities" comporte quelques passages d'exception, notamment sur « The sleep », qui ne font que regretter davantage le compromis auquel se trouve confronté l'amoureux éconduit. Avec le recul, les morceaux mid-tempo aux relents doom et les instrumentaux sont encore les plus belles pièces de l'édifice. Tellement mieux, ça devrait sonner tellement mieux.
"l'innocuité du monde contemporain", tiens donc ...
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peut les saisir, les garder, être juste envers elles.
(Rainer Maria Rilke)
Le critique aussi se trouve parfois saisi par une infinie solitude face à une œuvre qui ne se laisse pas appréhender. De là à considérer que l'amour est la panacée du chroniqueur anxieux il n'y a qu'un pas que je franchis aujourd'hui.
De l'amour il en faut pour cette critique. De l'amour pour le Death prog qui produit actuellement des rejetons admirables, de Augury à Between The Buried And Me pour ne citer que ces titanesques exemples. De l'amour également pour le vivier allemand qui fournit intarissablement des musiciens talentueux dans le bruyant style qui nous plaît tant.
Quid de ces musiciens-là ? Issu d'une première mouture de la formation (in)connue sous le nom de LEGACY, le groupe compte dans ses rangs deux membres de AHAB, plus habitués à délivrer leur doom des grands fonds. Tout ce beau monde n'ambitionne pas moins que d'élaborer une forme aussi complexe qu'exigeante de Death, gorgée du groove et du feeling de ces albums qui vous laisse moite et hébété à l'issue du longue nuit d'amour.
Sur le papier je suis déjà consumé par la passion. En pratique c'est un peu moins idyllique. DEAD EYED SLEEPER nous propose une belle pièce de misanthropie avec cet album composé de trois chapitres déclinant l'innocuité du monde contemporain sous toutes ses formes. Les textes, portés sur la spiritualité et souvent abscons, s'articulent autour du cycle mort/mutation/renaissance avec en final la promesse de clore cette errance « à travers les forêts de gens insignifiants ». Pourquoi pas.
Les compos respectent pourtant à la lettre le cahier des charges du prog bourru : les thèmes musicaux sont richement développés par des séries de riffs complexes, de nombreux accords étendus viennent apporter une couleur particulière et les fréquents changements de mesure insufflent une dynamique aux différents titres. Mieux encore, les guitaristes introduisent de redoutables variations harmoniques qui introduisent une étrange dissonance au cœur de la mélodie (cf. « the undercurrent »).
Tout ceci ne parvient malheureusement pas à m'arracher des soupirs amoureux. La faute principalement à une production sèche qui étouffe les compositions. A cet écueil s'ajoute une durée des morceaux un peu courte -5min en moyenne- à peine le temps d'installer un thème et de travailler sa texture qu'on passe à la suite. Les émotions peinent à faire surface à cause de ce manque d'amplitude de la plupart des titres. Par moments, l'album dégage même un air de OPETH en manque d'inspiration. Si j'osais j'émettrais en outre une comparaison avec d'autres Allemands, les trop discrets APOPHIS, qui dans un registre plus féroce élaborent une musique sensiblement plus efficace.
Il n'en reste pas moins que "Through the forests of nonentities" comporte quelques passages d'exception, notamment sur « The sleep », qui ne font que regretter davantage le compromis auquel se trouve confronté l'amoureux éconduit. Avec le recul, les morceaux mid-tempo aux relents doom et les instrumentaux sont encore les plus belles pièces de l'édifice. Tellement mieux, ça devrait sonner tellement mieux.
Rédigé par : #Guillaume# | 13.5/20 | Nb de lectures : 10224