Alors là, dossier lourd. Super lourd. Il est assez rare de voir des groupes changer radicalement de direction musicale, encore plus quand ils changent carrément de scène ! Les amateurs d’électro sombre auront déjà reconnu le nom de DAWN OF ASHES. Et ce n’est pas un homonyme, c’est bien le même groupe originaire de Californie. Groupe formé en 2001 qui avait sorti deux excellents albums de Dark-Electro, In The Acts Of Violence et The Crypt Injection (Sacred Fever n’était qu’une démo full-length). Et le groupe était considéré par beaucoup comme un des meilleurs éléments de la scène, capable de sauver toute la clique Dark-Electro qui commençait sérieusement à se morfondre dans ses clichés. Surtout depuis la sortie de l’horreur Harsh Generation des Hollandais de GRENDEL, un album basique, clichesque et sans intérêt mais qui a été entouré d’une émulation sans précédent, et qui a entraîné la création d’une… génération de clones tous plus ridicules les uns que les autres, une énorme overdose au sein de la scène Dark-Electro (et/ou « Harsh EBM ») qui a même touché les groupes les plus établis, avec la sortie d’une ribambelle d’albums inintéressants et mal foutus (oui, je règle mes comptes). Ainsi, on pouvait croire que DAWN OF ASHES, grâce à la tuerie The Crypt Injection (avec les tubes "Torture Device", "Portait of Homicide", "Still Born Defect"…) allait être le messie qui allait tirer la scène vers le haut. Et pourtant…

Je ne m’étais pas spécialement méfié lorsque, courant 2008, DAWN OF ASHES annonçait sur leur MySpace leur quête d’un « guitariste et d’un bassiste de Death-Metal ». Je pensais que le groupe allait faire tout péter en nous concoctant un mélange de Dark-Electro et de parties Death ! Mais en septembre 2008, le couperet tombe : DAWN OF ASHES balance sur son MySpace cette phrase : « Going from the Industrial scene, now entering the Metal scene. », tout en présentant son nouveau logo très « Deathcore » et ses nouvelles influences pour son style de « Black/Melodic Death Metal based on violence and horror » (rebaptisé par la suite « Extreme Horror Metal ») : DIMMU BORGIR, ARCH ENEMY et THE BLACK DAHLIA MURDER. Et apparemment, et au fil des extraits postés, le groupe n’a plus l’intention de faire de la Dark-Electro, même pas d’intégrer quelques éléments à son Metal horrifique (au visuel et aux maquillages des membres du groupe très travaillés, il faut le souligner), pourtant ça aurait pu donner quelque chose d’intéressant… DAWN OF ASHES et l’électro, c’est donc fini, le groupe annonçant de toute façon avoir « conquis la scène industrielle », tellement que les albums « industriels » du groupe ne sont même pas mentionnés sur la section « releases » de leur MySpace… la scène Dark-Electro devra donc se passer de leurs services pour sortir la tête de l’eau.

Arrive donc leur prem… pardon, leur troisième album nommé Genocide Chapters, prévu depuis plus d’un an avec force teasing et signature chez Metal Blade. Et donc, premier album dans le style Black/Death Symphonique. Disons-le tout de suite, je m’attendais à une grosse bouse, à un album surgonflé « à l’américaine ». Eh bien de ce côté j’ai été assez surpris. Le groupe est souvent présenté sur la toile comme faisant du « Blackened Deathcore », mais il n’y a rien de Deathcore là-dedans (enfin, pas au sens où on l’entend d’habitude). DAWN OF ASHES prend le contrepied parfait de toute la scène des clones de THE BLACK DAHLIA MURDER, point de surproduction et d’overdubs à foison ici : Genocide Chapters est un album crade, morbide, sombre et poisseux. Certes, rien de True-Black ici mais tout est relatif. Après, on ne sait pas si c’est la prod qui est passablement ratée (guitares très sèches, son de batterie quelconque), mais on sent que le groupe a tenté de se démarquer en faisant quelque chose de nettement plus crado et plus lourd (pas de course aux blasts et de gros riffs ici) que la grande majorité de la scène US.

Au niveau des influences, DAWN OF ASHES sonne comme un mélange assez personnel de ARCH ENEMY (surtout au niveau de la voix) et de CRADLE OF FILTH (flagrant sur "London’s Anthem for the Pleasure of Mutilation"), plus que les influs DIMMU BORGIR et THE BLACK DAHLIA MURDER qui sont assez discrètes. Et rien à voir avec SLIPKNOT contrairement à ce qu’indique le sticker (mauvaise pub ?). Le bon point de Genocide Chapters est indubitablement le côté symphonique qui est assez maîtrisé, l’ambiance horrifique, voulue et développée par le groupe, est franchement réussie (et bien appuyée par les illustrations du livret). Cela fait son petit effet sur de nombreux passages comme à la fin de "Conjuration of the Maskim's Black Blood" ou tout du long de "Carnal Consummation in the Empty Space" (oui, les noms des morceaux sont longs). Au niveau du reste de l’exécution, c’est mi-figue mi-raisin. Le groupe est capable de nous sortir des tubes accrocheurs et facilement mémorisables ("Seething the Flesh in the River of Phlegethon"), mais aussi de faire du remplissage avec des morceaux assez basiques et quelconques ("Sacrilegious Reflection"), le côté lourd et poisseux ne marche pas à tous les coups. Les riffs sont, pour la plupart, malheureusement assez simplistes, même s’ils s’intègrent bien à la construction des morceaux. Le côté quasi-MORBID ANGEL de certains passages retient néanmoins l’attention des tympans. Certes, le groupe débute dans le mitöl et donc, se cherche encore, mais c’est tout de même censé être leur troisième album… (Pourquoi diable ne pas avoir changé de nom ?). Le jeu de batterie est également simpliste, et la basse est inexistante (dommage car il y avait de la place pour qu’on l’entende un peu plus). Et bien sûr, il n’y a strictement aucun lien avec les albums précédents. On pourra reconnaître certaines lignes de chant caractéristiques de Kristof Bathory, et quelques sonorités de clavier de Bahemoth (comme par hasard les deux membres restants de la période électro…), mais c’est vraiment tout. Ce n’est absolument plus le même groupe.

Dans sa globalité, Genocide Chapters est un album plutôt correct, qui m’a agréablement surpris (alors que je m’attendais à devoir le descendre). Le groupe ne maîtrise pas encore son sujet et doit encore s’améliorer (bien qu’il se démarque déjà de ses nouveaux camarades) mais est capable de nous sortir de bien belles choses, notamment grâce à l’aspect symphonique plutôt superbe et grâce à quelques titres efficaces. Certains semblent d’ores et déjà croire en eux et on leur a d’ailleurs offert la possibilité d’ouvrir pour DIMMU BORGIR à l’occasion du « Darkness Reborn Tour » en Amérique du Nord. Genocide Chapters est un bon début et promet des choses intéressantes pour la suite, mais je resterai éternellement dégoûté du fait que le groupe se soit tiré de la scène Dark-Electro, alors qu’il avait les moyens de s’y installer durablement et de devenir le meilleur groupe du genre. Peut-être ont-ils compris que cette scène allait couler et ont préféré quitter le navire avant de sombrer dans les abysses avec tout l’équipage… le capitaine est censé partir en dernier pourtant. Enfin bref, si vous ne vous intéressez pas à la scène électro-indus et que vous venez de découvrir DAWN OF ASHES, vous pouvez jeter une oreille discrète à ce Genocide Chapters qui recèle de choses intéressantes dans le style Black/Death sympho sans chichis, malgré des défauts « de jeunesse » (ou plutôt de manque d’expérience) évidents.


Rédigé par : ZeSnake | 13/20 | Nb de lectures : 13230