Metal Blade a déjà fait son chiffre d'affaires de l'année avec Amon Amarth, il peut désormais remplir des étals avec des albums yukulele qui se vendent à trois exemplaires. C'est pas souvent que je m'attèle à une de leurs sorties, les dernières étaient l'excellent Kurbads de Skyforger et le DVD live All Empire Falls de Primordial. Et en parlant de Primordial, nos élus du jour sont justement irlandais. Enfin, pas tout à fait, puisqu'ils viennent d'Irlande du Nord comme Waylander (avec qui ils ont en commun un guitariste qui a officé dans Waylander en 2008). Mais, ne nous laissons pas abuser par un problème de frontière irlandaise mal enfournée dans le fondement des Anglais (ennemi séculaire, je vous le rappelle. Mort aux Granbretons!). La musique de Darkest Era transpire également ces mélodies qui font le bonheur des auditeurs des groupes sus-cités.

La nuance va se jouer sur un côté beaucoup moins doom chez Darkest Era. En somme, du heavy/folk celtique au lieu du celtic doom, pour ceusses qui aiment une étiquette sur leur fromage. Il est évident que mes collègues doomeux auraient été plus vaches que moi avec cet album. Et pourtant, recèle de très bons moments. Les Irlandais m'évoquent le punch d'un Trouble, dans un album aux sonorités empreintes de tristesse mais qui fait preuve d'une vitalité étonnante. Si comme moi votre animal-totem est un corbeau mort depuis trois mois, cet opus subtilement mélancolique devrait vous coller une ouache d'enfer. Ce n'est peut-être pas l'objectif de départ, mais Darkest Era me met en joie, me faisant occulter la grisaille quotidienne pour un rayon de soleil à la "Love is All".

L'album propose des titres percutants aux enchaînements bien pensés, qui donnent l'impression de suivre une ligne mélodique menée tambour battant au fil des minutes (la terrible entrée en matière "The Morrigan", "Visions of the Dawn"). Le groupe joue aussi la carte plus intimiste, évoquant encore largement Primordial dans le torturé "To Face the Black Tide" ou virant carrément musique traidtionnelle avec le long interlude (ou court morceau, c'est selon) "Poem to the Gael". Il faut avouer que l'album contient aussi le longuet "Beneath the Frozen Skies" dont on attend un peu la fin et que Darkest Era n'est pas d'un niveau de densité de la pâte égal sur l'ensemble de la galette. Mais quand ça latte, c'est franchement très plaisant ("Heathen Burial"). Et difficile de ne pas oublier tout ça lors de la lente montée en puissance du titre de onze minutes qui vient terminer l'album.

Mis en boîte au Pays de Galles, The Last Caress of Light est doté d'une production lourde qui fait la part belle aux basses. Ce parti pris place le chant clair de Dwayne Maguire bien en avant. Je trouve que c'est un vrai point fort du groupe, mais là c'est une question de goût. En tout cas, la formation s'appuie largement sur cet atout, l'instrumentation restant en soutien de l'organe et déroulant parfaitement ses parties. Après deux EP et six ans d'existence, les Celtes signent là un premier album dont ils n'auront nullement à rougir.

Darkest Era vient de sortir un de ces albums qui a un goût de revenez-y. Sûrement pas la réalisation de l'année, mais le genre d'opus sur lequel accroche le regard quand on parcourt sa discothèque et pour lequel on se dit "pourquoi pas, tiens, ça fait un moment" avant de le mettre en lecture. Fort plaisant, avec une sensibilité musicale qui me parle beaucoup. J'en demandais pas plus pour être conquis.

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Rédigé par : Prince de Lu | 15/20 | Nb de lectures : 12895