Le hic avec DAMNATION ARMY, c’est que ce one-man band navigue dans une espèce de no man’s land permanent. Complètement ignoré par la scène black-metal à laquelle ses deux supra-limités premiers albums ‘Misanthropic Satanarchy’ (2001) et ‘The Art of the Occult’ (2004) faisaient pourtant beaucoup d’appels de pieds, son unique membre, Thomas Nyholm, fait depuis un peu l’école buissonnière mais sans que cela, hélas, ne semble intéresser guère plus de monde. Il y en a pourtant dans ce ‘Circle of the Brave’ qui évite non seulement l’écueil des albums réalisés par une seule personne (boîte à rythme trop voyante, basse inexistante, arrangements limités) mais fait aussi preuve d’une science bien maîtrisée du syncrétisme musical. Sauf que le tout ne réussit jamais, hélas, à tout-défoncer-sa-mère. C’est pourtant pas faute d’avoir essayer…

Dans sa chronique de ‘Tyrant’, Sheb parlait de « black pas trop méchant » et à ce niveau, ‘Circle of the Brave’ confirme. Déjà que les blasts n’étaient pas légions auparavant, ils ont été carrément rayés ici du menu car ne rentrant pas franchement dans le cadre. Il faut dire que s’enfonçant dans la brèche creusée par SATYRICON, Nyholm s’est ici fortement attaché à respecter à la lettre le format ‘chanson rock’. La sacro-sainte formule couplet/refrain/couplet/refrain/pont/refrain/fin règne donc ici sans partage, quitte à ce que tout le reste passe au second plan, notamment la batterie qui fait surtout attention à ne pas se faire remarquer. Par contre, on sent à l’inverse que le petit Thomas a bossé ses partoches de guitares durant les longues soirées d’hiver car ses progrès sont flagrants, notamment au niveau des solos, variés sans jamais tomber dans le démonstratif non plus. Un détail qui a d’ailleurs son importance car non seulement il donne à l'ensemble un côté plus mélodique, limite NWOBHM par moments, plus lumineux et donc encore moins black-metal. Et surtout, cela accentue sa ressemblance avec certains de ses aînés qui, comme lui, ont commencé à jouer aux pandas tristes les soirs de pleine lune avant de petit-à-petit se dédouaner de tout mouvement, c’est-à-dire KATATONIA (période ‘Discouraged Ones’), mais aussi le DARK TRANQUILLITY de ‘Projector’ et un paquet de groupes de black/death suédois mélodique que NO FASHION RECORDS sortait par wagon entier à la fin des années 90.

Sauf que DAMNATION ARMY n’a ni les crocs assez acérés (cela manque un peu de couilles tout ça quand même nom de Zeus!), ni cette faculté à pondre des passages si poignants de mélancolie qu’ils donneraient envie de se jeter par la fenêtre avec un sourire aux lèvres pour faire la différence. Non, ‘Circle of the Brave’ se laisse en fait écouter pépère dans un hamac sur la terrasse pendant trente-cinq minutes sans jamais agacer, mais sans jamais passionner non plus. Il y a quelques fugaces moments de brillance (le break de « I » par exemple) et deux ou trois riffs sympatoches mais jamais rien qui ne prenne par les tripes, comme si son auteur avait manqué de passion… Un peu comme son label d’ailleurs, qui n’a eu de cesse de repousser cet album, depuis fin 2007, avant de le sortir aujourd’hui un peu en catimini. Tout ça pour un ‘gentil’ album de metal ‘pas trop’ extrême. Je ne sais pas pour vous, mais moi, je ne suis pas persuadé que cela soit forcément un compliment…


Rédigé par : Olivier 'Zoltar' Badin | 11/20 | Nb de lectures : 10297