Cinquième album du combo de Umeá, Suède.
Si “Somewhere Along the Highway” nous avait un peu déçus par son manque d’énergie, cet « Eternal Kingdom » ravive en nous l’espoir de voir cette formation passer du statut d’excellent groupe au statut de groupe « référence ». Pourtant, sur le papier l’objet a tout pour faire fuir, album-concept, lequel, qui plus est, ne semble pas original pour un sou.
Dans le genre des tonnes de groupes ont traité avec plus ou moins de réussite le thème de la folie. Seulement voilà, n’est pas Cult Of Luna qui veut. Le groupe parvient avec cette galette à créer une entité « musique + texte » absolument passionnante. En bref, un carnet est retrouvé dans les cartons d’archives d’un ancien hôpital psychiatrique des années 20 (qui serait devenu le local de répétition du groupe). Un journal intime complètement halluciné dépeignant les délires d’un homme. Celui-ci aurait assassiné sa femme qui venait de perdre son enfant en couche. Sa version (un délire quasi-mystique d’animaux fantastiques, de magie, de forêts mystérieuses) est le concept, l’album est construit autour de cette version des faits.

Musicalement, on est dans le sombre, le très sombre même. Les guitares ont toujours ce grain un peu crade auquel le groupe nous a habitués, le son de basse est rond et chaud, la batterie envoie la sauce sans non plus en faire des tonnes et le chant reste principalement hurlé. C’est peut-être sur ce dernier qu’on pourrait trouver à redire. On chipote, me direz-vous, mais, même si C.O.L. n’a jamais été un groupe à chanteur, les précédents albums nous avaient habitués à une musique plus instrumentale, moins chargée en texte et, du coup, en lignes de voix. Un chant efficace mais peut-être un peu trop présent de par son aspect linéaire. Bref tout cela nous rappelle tout de même que Cult Of Luna n’est pas là pour rigoler. Si C.O.L. n’est pas metal (encore que…), il n’en a pas moins la puissance. Septiques, écoutez le titre « Ghost Trail » juste pour preuve. Du lourd donc, mais aussi quelques passages plus lumineux voire apaisés comme sur le titre « The lure » où les cuivres et le piano viennent se faire une place au milieu des guitares et sur « Österbotten » où l’incartade électro nous permet de reprendre souffle.
La production aux petits oignons vient relever tout ça. Moins propre que sur « Salvation » et « Somewhere Along The Highway », mais plus claire que sur les deux premiers efforts, celle-ci met le tout en valeur afin que chaque instrument, chaque nuance, chaque couleur de son soit discernable dans le magma en fusion qu’est ce disque.
On rapprocherait volontiers ce dernier opus de « Salvation » de par son côté progressif et fouillé dans les ambiances et les détails même si le côté massif serait, lui, plus à rapprocher des deux premiers. Ces divers rapprochements faisant de cette pièce un excellent condensé de leurs précédents travaux.

Tout cela fait de cet album une véritable réussite tant strictement musicale qu’extramusicale (l’artwork est de toute beauté lui aussi) ou conceptuelle. Il devrait réussir le tour de force de réunir sous le même giron les fans des deux premiers albums (le premier « Cult Of Luna » et le second « The Beyond ») avec ceux de la période plus post-rock des deux suivants (« Salvation » et « Somewhere Along The Highway »).
Le (attention gros mot !!) Post-Hardcore teinté de (attention deuxième gros mot !!) Post-Rock de Cult Of Luna fait mouche et, dans un style qui a tendance à se mordre la queue depuis quelques temps, on retiendra, pour sûr, cet album comme un album majeur.


Rédigé par : Dixie Whiskey | 16.5/20 | Nb de lectures : 13264