Willowtip, ou l'écurie des grinderies les plus tranchantes du moment. Entre les phénoménaux Kill The Client qui viennent de sortir le dévastant "Cleptocracy", et autres joyeusetés à la Circle Of Dead Children, c'est au tour des Suédois de Crowpath de revenir avec leur dernière offrande. Après deux albums à la douceur comparable à un ouragan auditif, les chirurgiens de Mälmo viennent distiller une nouvelle fois leur grind/death chaotique avec ce "One With Filth", concept-album sur l'histoire vraie d'un flic suédois serial-killa à ses heures perdues, Dexter style.

Et, impossible de s'y faire une bonne fois pour toutes, c'est pas nouveau, mais leur batteur vient encore nous mettre sur le cul. Ecole Converge/Mastodon/Gaza, Erik Hall fait partie de ces cogneurs au jeu déstructuré à l'extrême, mais la différence avec ses homologues des groupes pré-cités, c'est qu'il donne l'impression de laminer ses fûts avec une précision chirurgicale. Frappes nettes comme un coup de scalpel, avalanches de descentes de toms et de roulements millimétrées, tintements de cymbales irréels, ses parties sont toujours incroyablement fournies, et desservies par ce son clinique et sec si particulier.

Alors, rien n'a changé? Non, pas tellement, et c'est peut-être ça le souci. Les meubles sont restés là où on les avait laissés, mais Crowpath a en plus condamné une ou deux portes en oubliant de varier ses efforts. "Son Of Sulphur" pouvait compter sur quelques titres monstrueux tirant vers le sludge, qui permettaient de casser la routine qui aurait pu s'installer; ici il n'en est rien. Et le quartet donne du coup l'impression d'avoir plus ou moins fait le tour de sa formule en balançant des riffs plus émoussés, "communs" (pour du Crowpath, bien des groupes se couperaient les parties pour en pondre des comme ça), ce qui tranche avec l'inventivité dont fait preuve le poulpe aux baguettes, dont le talent pour broder autour de ses collègues élève le disque à un autre niveau.

Même la voix se fait moins virulente, délaissant les vomissements furieux de "Red On Chrome" pour des growls ou parties blackisantes plus conventionnels. Reste qu'il faut pas déconner non plus, parce qu'on en prend quand même plein la gueule pendant 1/2 heure, que les plans déferlent à une vitesse dingue, et que Crowpath reste toujours en marge de toute la scène chaotique, grâce à une approche plus métallisée et un son à la fois étouffé et limpide reconnaissable immédiatement, au mastering signé Scott Hull.

Bref, voici l'occasion de mettre en pratique l'adage "qui aime bien châtie bien", car je dois bien avouer que Crowpath a ici signé son album le moins prenant. Ca reste toujours du très haut niveau, mais on ne retrouve ni la violence rêche de "Red On Chrome" ni les nouvelles portes de sorties entrevues sur "Son Of Sulphur", (malgré l'instrumental lancinant de mi-parcours, réussi), donc légère déception au bout du compte. Les gaziers nous laissent tout de même une tornade sonore extrêmement technique et dense, qui promet de trèèèèèèès nombreuses écoutes pour être apprivoisée correctement, à la manière de nos défunts Comity nationaux. En tous cas, s'il y a un truc que ces mecs n'ont pas perdu, c'est la palme du logo qui résume le mieux un groupe. Au moins, vous pourrez pas dire que vous étiez pas prévenus:


Rédigé par : Crown_Me | 14/20 | Nb de lectures : 11107