A regarder ce cd rien ne prépare l’auditeur incrédule à son contenu pour le moins particulier. Avec cette réédition européenne Earache renoue avec l’éclectisme délirant de ses débuts, alors que le label anglais nous proposait en 1988 l’unique album des SPAZZTIC BLURR, extraordinaire OVNI réunissant des membres de WERMARCHT et de CRYPTIC SLAUGHTER. Plus de quinze ans plus tard, les choses ont-elles réellement changées ? Il est vrai qu’avec l’avènement de groupes tels CARNIVAL IN COAL, les frontières, jadis sacro-saintes, qui cernaient le métal, ont été bafouées depuis déjà belle lurette ; et la vague des groupes, principalement grind, à tendance humoristique n’a fait qu’accentuer la donne.

Voici donc CROTCHDUSTER, un projet 100% ricain derrière lequel se cache le leader virtuose de CAPHARNAUM, j’ai nommé Jason Suecof. Au programme, plus de quarante minutes d’un véritable caléidoscope musical qui se frotte à tous les genres dans un style aussi absurde que délirant. Si le fil conducteur reste métallique au sens le plus large du terme, les écarts pop, rap, funk, gospel, r’n’b, dance entrecoupent des plans, échantillonnant tous types de métal extrême ou pas. Quelques clins d’œil parodiques se détachent, tel l’incroyable imitation de SLAYER avec un faux Tom Araya hilarant, celle d’OBITUARY ou encore PANTERA qui ouvre l’album.
Il est vrai que ce disque s’avère plutôt déstabilisant et qu’il manque cruellement de cohérence. Ça part un peu trop dans tous les sens. Les titres qui voient se succéder des plans rigoureusement antagonistes ne sont pas amenés par des enchaînements ou autres subtilités. Non, c’est le bordel taille XXXL avec un véritable hachis multicouche qui semble sans fin. De ce fait les morceaux sont totalement impossibles à mémoriser et du reste il n’y aurait aucun intérêt à se lancer dans cet exercice car ce n’est pas le but recherché.

A entendre ce disque, on pense plutôt que les zicos qui se sont coller à ce fourbi ont, avant tout, songé à se prendre un bon gros panard en rendant quelques hommages, parfois à la limite de l’irrespectueux. Il apparaît clair que le niveau technique de ces joyeux cinglés est des plus conséquents et quelques passages purement techno-death sont d’ailleurs là pour nous le rappeler. La palette des styles abordés ici est tellement large qu’on sent bien que le groupe serait à son aise avec n’importe quel défit même s’il faut aller jusqu’à des comédies musicales de Broadway ou des génériques de jeu télévisé. CROTCHDUSTER ne recule devant rien et entrecoupe ses titres de dialogues extravagants, de fausses bandes-annonce de film, de conversations téléphoniques, de faux extraits de films pornos et j’en passe.

Le point culminant de cette aberration atteint son apogée sur le dernier titre de l’album pendant lequel, les membres du groupe lisent et répondent en direct aux lettres de leurs « hypothétiques » fans. Il va de soit que si vous ne bénéficiez pas d’un solide niveau en anglais, vous risquez de passer totalement à côté du délire de « Big fat box of shit ». De même, si vous n’avez pas l’humour requis, l’écoute de ce disque peut rapidement se transformer en véritable calvaire. Il est également vrai que la portée d’un tel disque paraît limitée et qu’on en aura rapidement fait le tour au bout de quelques écoutes. Pourtant, je persiste à croire que cet album peut tout à fait trouver son public dans toutes les couches du métal. Reste à savoir si ce disque se laissera écouter avec autant de plaisir que celui des SPAZZTIC BLURR, qu’Earache a eu la bonne idée de rééditer il y a une paire d’années.

Avec CROTCHDUSTER, le dépaysement est garanti mais reste toutefois réservé à un auditoire averti.
OK j’avoue, ça me fait bien poiler… mais j’ai honte, hein…



Rédigé par : Tonton | 14/20 | Nb de lectures : 12543